Joan Manent Pesas, qui avait fréquenté l’école rationaliste et l’ateneo ouvrier de la rue Arnus à Badalone, avait adhéré à la CNT à l’âge de 15 ans alors qu’il était apprenti. Ouvrier verrier à l’entreprise La Vidriera española à partir de 1918, il fut dès novembre 1920 nommé secrétaire de la FL-CNT de Badalone. En 1922 il était accusé d’un attentat fictif contre Martinez Anido et l’année suivant passait en France pour échapper au service militaire.
Il allait y vivre plus ou moins clandestinement dans diverses régions : à Paris où il travaillait avec Simon Piera Pagés, à Béziers (1924) et à Prades où en 1925 il participait à la reconstruction d’une église. Parallèlement il participait de 1927 à 1930 aux diverses tentatives, dont le complot de Prats-de-Mollo, pour tenter d’en finir avec la dictature. En mars 1927 il avait été l’objet d’un arrêté d’expulsion de France avec notamment Alonso Rosquillas, Adealida Bou, Manuel Portos, Agustin Martinez, Luis et Micheline Saguer et avait alors quitté le département des Pyrénées-Orientales.
Rentré en Espagne après la proclamation de la République et après qu’on ait essayé de l’impliquer dans l’assassinat d’un pistolero du syndicat libre, il devenait le secrétaire de la FL de Badalone et dirigeait avec V. Soler le journal La Colmena Obrera (Badalone, 16 numéros en 1931-1932). Partisan du courant Trentiste, et bien qu’il ait été proposé pour intégrer le Comité régional catalan, il était exclu de la CNT et participait aux syndicats d’opposition. Au moment de la révolution d’octobre 1934 il fut l’un des partisans de l’Alliance ouvrière (UGT-CNT). Membre du Comité d’aide aux prisonniers, il fut arrêté et déporté à Burgos jusqu’en juin 1935. Dès sa libération il participait à la réunification de la CNT et fut en mai 1936 l’un des délégués de Badalone au congrès de Saragosse.
Lors du soulèvement franquiste de juillet 1936, il fut membre du Comité des milices puis du Comité de santé publique de Badalone. Partisan de la collaboration gouvernementale, il fut nommé en octobre Conseiller en assistance sociale, puis en novembre rejoignit Valence comme secrétaire particulier du ministre cénétiste de l’industrie Juan Peiro Belis. En juilet 1937 il retournait à Badalone comme conseiller municipal avant d’être nommé maire de la ville. En février 1938 il démissionnait de son poste de maire et partait comme volontaire au front où il sera blessé.
Exilé en France lors de la Retirada, il fut interné au camp du Barcarès puis sur un bateau-hôpital à Marseille. En 1941 il était à Huisseau (Loir-et-Cher) où il allait travailler comme charbonnier pendant toute la durée de la guerre. A la libération il s’installait à Prades (Pyrénées-Orientales) dans le vain espoir de pouvoir retourner en Espagne. En 1953 il partait pour Paris où il allait rester jusqu’à sa retraite en 1975 avant de revenir à Prades. En octobre 1968 il avait participé avec entre autres Jacinto Borras et Miguel Sesé à une réunion tenue à Montpellier par les opposants à la tendance orthodoxe de la CNT. Dans les dernières années de sa vie il était lié au groupe éditant le journal Frente Libertario. Après la mort de Franco, il effectua en 1980 un voyage en Espagne. Joan Manent Pesas est décédé à Paris le 9 février 1984.
Œuvres : — Records d’un sindicalista libertari catala, 1916-1943 (Ed. Catalanes, Paris, 1976) ; — Pensamiento de Peiro (1959) ; — Mémorias (inédites) ; — auteur des notes du livre de J. Peiro « Trayectoria de CNT » ; — Texte dans le livre « Salvador Segui » (Paris, 1960).