Dictionnaire international des militants anarchistes
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BERTON Germaine, Jeanne, Yvonne
Née le 7 juin 1902 à Puteaux (Seine) - se suicide le 4 juillet 1942 - Ouvrière - UA - CGT - Paris 14
Article mis en ligne le 23 novembre 2006
dernière modification le 27 octobre 2023

par R.D.
Germaine Berton (décembre 1923)

Fille d’un mécanicien républicain et d’une institutrice très pieuse, Germaine Berton, après le certificat d’études, avait fréquenté l’école des Beaux Arts de Tours avant de devenir ouvrière. Elle fut renvoyée de l’usine Rimailho de Saint-Pierre-des-Corps où elle travaillait comme ouvrière où son patron l’avait surnommée "La vierge noire" puis fut secrétaire adjointe des comités syndicalistes révolutionnaires qui regroupaient au lendemain du congrès de la CGT tenu à Lyon en septembre 1919, les membres de la minorité syndicale. Elle fit partie du conseil des Métaux en 1921 et, après avoir été proche du Parti communiste — elle a collaboré au Réveil d’Indre-et-Loire —, arrivée à Paris en octobre 1921, elle rejoignit les libertaires au début de 1922. Elle raconta : “J’ai adhéré à l’Union anarchiste. Je fus condamnée pour outrages à un secrétaire de commissaire de police et j’ai partagé la même cellule que celle occupée par Madame Bermain de Ravisi. J’ai quitté la prison Saint-Lazare le même jour qu’elle et j’ai voulu faire mon droit avec M. Paul Meunier. Je fus blessée au mois d’août 1922 d’un coup de sabre, au cours d’une manifestation au Pré-Saint-Gervais : à ce moment, je me suis séparée de l’Union anarchiste, dont les tendances étaient libertaires-communistes, alors que je suis une individualiste. Aussi ai-je adhéré au groupe des anarchistes individualistes du quatorzième arrondissement, rue du Château. J’ai travaillé quelquefois, mais, en dehors du produit de mon labeur, je reconnais que j’ai été soutenue par des camarades ; parmi les anarchistes individualistes, il y a des gens très riches” (déclarations au juge d’instruction Devise reproduites par la presse quotidienne).

Début 1922, pour avoir giflé un commissaire de police, elle avait été condamnée à 3 mois de prison et 25 francs d’amende. A sa sortie de la prison Saint-Lazare elle avait été hébergée notamment par Charles D’Avray et Gohary Harmant

Fin juillet (ou début août) 1922, lors d’affrontements à Belleville lors d’une d’une manifestation, elle avait “reçu un formidable coup de sabre sur la tête” (cf Le Libertaire, 4 août 1922) tandis qe plusieurs compagnons avaient été arrêtés.

Germaine Berton milita alors dans le comité de Défense des marins de la Mer Noire. Le 22 janvier 1923, lle se rendit au siège de l’Action Française, avec l’intention de tuer Léon Daudet, tua Maurice Plateau, chef des Camelots du roi, et tenta ensuite de se suicider pour échapper au jugement ; défendue par Henri Torrès, elle fut acquittée le 24 décembre 1923.
A l’audience du 19 décembre, face à Léon Daudet, elle avait notamment déclaré : “J’ai voulu vous tuer parce que vous étiez responsable de l’assassinat de Jaurès. Je suis anarchiste, mais cela ne m’empêche pas de vénérer Jaurès. Mon grand père, un vieux socialiste, me menait dans les meetings pour l’entendre… Hier deux questions me furent posées… En votre présence je vais répondre d’un seul coup à ces deux questions. Je regrette douloureusement d’avoir tué Marius Plateau à votre place” (cf. Le Libertaire, 20 décembre 1923).

L’Union anarchiste dans l’édito du Libertaire, n° 210, (26 janvier — 2 février 1923), revendiqua “l’héroïque Germaine Berton”. Lors de son interrogatoire devant le juge d’instruction elle avait notamment déclaré avoir “particulièrement haï les royalistes et leurs agents provocateurs” parmi les ennemis du prolétariat. Quand on lui avait demandé si elle regrettait son geste, elle avait répondu : “Je ne suis pas insensible et il m’a fallu vaincre de grandes répugnances avant de tuer un être humain, fut-il mon ennemi. Pourtant ne ne regrette en rien l’acte que j’ai commis et ma conscience n’a pas de remords. Car en abattant le chef de Camelots du roi, je n’ai obéi qu’à mon cœur déchiré par les souffrances de tous les prolétaires, malheureux, parias traqués et asservis’ (cf. Le Libertaire, 9 mars 1923).
Selon Le Libertaire (8 décembre 1923) elle était parvenue à la prison Saint-Lazare, à convertir à l’anarchisme l’une des gardiennes, la sœur Claudia (26 ans) qui abandonna alors la religion et la prison pour fréquenter les locaux du Libertaire. Le journal, dans son numéro du 11 janvier 1924, publia plusieurs lettres de la "sœur" Claudia adressées à Germaine pendant son incarcération…

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Germaine Berton

Après son acquittement, elle entreprit avec Chazanoff une tournée de propagande pour l’Amnistie. À Bordeaux, le 22 mai 1924, il y eut des bagarres ; la conférence qu’elle devait faire au cinéma des Capucins avait été interdite et les portes fermées par la police. Avec 1500 auditeurs elle se rendit à La Croix de Leysotte à Talence où elle harangua la foule. Puis tous étaient repartis à Bordeaux pour exiger la libération des camarades arrêtés. Les affrontements avec la police allaient durer jusqu’à deux heures du matin et plus de 150 personnes furent arrêtées dont Germaine Berton, Jules Richard, Clauzet, Juividow, Bouense et José Victor. Internée au Fort du Hâ, et inculpée de “port d’armes prohibées, menaces et outrages aux agents et excitation au désordre”, elle fit la grève de la faim pendant huit jours et dut être transportée le 30 mai à l’hôpital Saint-André où elle cessait la grève le 31. Le 26 mai elle avait été condamnée à quatre mois de prison, 100f d’amende et deux ans d’interdiction de séjour. Les autres inculpés avaient été condamnés à un mois de prison et 100 f d’amende (Jules Richard), quatre mois et 200f (Bouence), deux mois et 50f (Horgue), six jours (Juvidow et Crouzet). Tous avaient été internés comme droits communs. Bénéficiaznt d’une remise de peine, elle fut libérée à la mi-août 1924.

Le Libertaire du 2 novembre 1924 signala que depuis sa sortie du fort de Hâ à Bordeaux Germaine Berton était sujette à des idées noires ; elle avait tenté de se suicider, mais l’arme s’était enrayée ; elle écrivit alors à la mère de Philippe Daudet, puis deux lettres à Colomer ; le lendemain, vers dix heures, elle alla au Père Lachaise “avec l’intention de s’agenouiller sur la tombe de quelqu’un qui lui était cher” puis elle absorba un poison. Le Libertaire du 3 novembre 1924 mentionna qu’elle fut hospitalisée à Tenon où elle reçut la visite de Madeleine Colomer et reconstitua la lettre destinée à Madame Daudet “seule parente de Philippe qui ayez reçu de sa mort le plus profond chagrin” et elle ajoutait : “Si Philippe est mort pour moi aujourd’hui, je me tue pour lui” (Philippe Daudet s’était suicidé le 24 novembre 1923). Le journal précisait que Germaine Berton portait toujours sur elle un médaillon reproduisant les traits de Philippe Daudet. Il semble qu’elle ne jouissait plus alors de toutes ses facultés.

L’état civil indique qu’elle s’était mariée à Paris (Xe arr.) le 17 novembre 1925 avec Paul Burger.

Germaine Berton se suicida à Paris le 4 juillet 1942.


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