Émilie Lamotte « affranchie de tout préjugé, narguant toutes les idoles, ouverte à toutes les compréhensionsavait était rebelle à tous les asservissements », avait été institutrice dans l’enseignement « libre » pour lequel elle professait une profonde aversion « en frémissant d’indignation lorsqu’elle évoquait les méthodes et l’esprit de cet enseignement »(cf. Lorulot). Collaboratrice assidue depuis 1905 du Libertaire dans des articles sur l’éducation de l’enfance, la limitation des naissances, et surtout contre le militarisme — en 1905 elle défendait le concept de désertion dans le colonnes du Libertaire —, c’est là qu’André Lorulot, jeune homme, l’avait rencontré. Celle qui allait être sa première compagne lui avait ouvert alors des horizons nouveaux « permettant à ma jeunesse de prendre conscience d’elle-même et de s’orienter » (ibid.). Elle collabora alors à L’anarchie et fit avec lui une tournée de conférences dans l’est de la France en 1907.
Adepte des méthodes de la pédagogie libertaire (Ferrer et Paul Robin), elle écrivait à propos de l’éducation : « Pères, mères, éducateurs : tous savent ce que c’est qu’un enfant : un petit être insupportable et merveilleurx qui brise beaucoup d’objets et représente l’avenir…Une seule catégorie d’individus semble se faire de l’enfant une autre conception : pour eux, l’enfant est un être destiné à représenter la tradition. Aussi s’acharnent ils à la lui transmettre dans toute sa pureté sévère. Affreux travail, où le maître perd sa santé et l’élève les plus belles de ses facultés ! Mais cette besogne d’asservissement moral est trop profitable aux dirigeants et aux exploiteurs de toutes sortes, pour qu’ils n’aient pas toujours rivalisé d’ardeur, afin de posséder de façon exclusive cet incomparable outil de domination : l’école. »
Elle était également une propagandiste anti-conceptionnelle « pour éviter de fournir aux patrons et à l’État de la chair à canon ».
Lors de la formation en 1906 de la Colonie communiste de Saint-Germain-en-Laye à laquelle, avec ses quatre enfants — elle participa avec entre autres E. Girault et Jean Goldsky, elle avait le projet d’y ouvrir une école libertaire du type de La Ruche de Sébastien Faure quelle avait visitée, projet qui sera abandonné faute de ressources. Elle travaillait alors à l’imprimerie de la Colonie. Elle fut également une artiste peintre d’un réel talent surtout dans le genre miniatures où elle excellait. Début janvier 1906 elle avait mis en vente au siège du Libertaire, diverses poterie et pièces de vaisselle qu’elle avait décoré de motifs antireligieux dont, entre autres, un plat ovale « à la gloire de notre sainte mère l’église », une tasse, une soucoupe, des assiette dont une intitulée « Leur bon dieu » représentant « Dieu le père reniflant des tonneaux de sang, de larmes, de fange que des anges soutiennent sous sa barbe auguste dans laquelle grouillent des curés », une boite à thé et un pot de chambre intitulé « Pour Dieu, Pour le Tsar, Pour la patrie » avec au fond l’œil de Dieu et décoré de silhouettes de Drumont, Déroulède, Rochefort et Jules Lemaitre (cf. Le Libertaire, 20 janvier 1906).
Fin 1908, avec Lorulot, elle part en roulotte pour faire des conférences dans le Midi de la France. Émilie Lamotte, malade, est décédée lors de cette tournée le 6 juin 1909 sur la route de Saint-Jean du Pain à Alès (Gard).
Oeuvres : — La limitation des naissances” (Ed. Colonie communiste, 1908, 12 p.) ; Elle était également l’auteur d’une brochure sur l’éducation libertaire (publiée sans doute par les publications mensuelles de l’Idée Libre). Certains de ses textes ont été publiés à la fin des années 1950 par E. Armand dans le numéro 12 des Suppléments — L’Unique (Orléans, 1956-1960)