Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

VIGNAUD, Antoine « NEGROT »

Né à Cusset (Allier) le 25 octobre 1861 — Cordonnier — Romans (Drôme) — Londres — Belgique — Paris
Article mis en ligne le 7 juillet 2013
dernière modification le 8 août 2024

par Dominique Petit, ps
Antoine Vignaud

Célibataire, Antoine Vignaud dit Négrot demeurait, en 1894, 16 rue des Archives, à Paris.

Le 7 septembre 1877, il avait été condamné à 3 jours de prison à Cusset pour vol de récolte et le 21 juin 1878, au même lieu, à 3 jours de prison, pour vol.
Il fit 5 ans de service militaire au 22e régiment d’infanterie en garnison à Montélimar (Drôme).

Il résida pendant quelques temps à Romans où il fit une active propagande anarchiste et resta en relations avec les compagnons de cette ville. Il revint ensuite à Paris où il habitait depuis 1889. D’après un rapport de police, Vignaud ne travaillait pas régulièrement et ne vivait guère que de vols à l’étalage.

En septembre 1889, aux élections législatives, il se présenta comme candidat abstentionniste. A cette occasion, il fut signataire d’une affiche apposée sur les murs de l’arrondissement, ainsi que d’un manifeste intitulé Le Père Peinard au populo. Il n’obtint aucune voix.

Le 20 février 1890, le tribunal correctionnel de la Seine le condamna à 8 jours de prison pour outrages.

Il fut arrêté en avril 1890, pour un vol de parapluie et condamné par la 8e chambre correctionnelle le 16 avril à 15 jours de prison. La police avait saisi sur lui, une lettre adressée par un anarchiste de Romans : « J’ai écrit, il y a quelques jours au compagnon Tortelier. Nous attendons sa réponse sous peu. Nous lui demandons de nous transmettre quelle est la ligne de conduite que comptent tenir les groupes anarchistes de Paris pour le 1er mai à l’occasion de la manifestation ou procession organisée par les farceurs sinistres guesdites ou blanquistes. Dans ta réponse, tu pourras nous en dire quelques mots. Je ne pense pas qu’ici, il s’organisera quelque chose ; mais au cas, il est toujours bon, sinon urgent, de savoir ce que pensent les copains de Paris, et à mon avis, je crois fort que si Constans ne veut pas tolérer la procession des Chie-en-lit, ceux qui en ont pris l’initiative vont tout lâcher. L’avenir nous le prouvera. Je compte donc que tu nous écriras sous peu et que tu nous donneras un petit aperçu du mouvement révolutionnaire à Paris ». Signé Salmic. La lettre indiquait également que l’on attendait son retour à Romans où il augmenterait le nombre des militants.
Il ne quitta la prison de Sainte-Pélagie que le 1er mai.

Vignaud, à Paris, participait à toutes les manifestations du Père Lachaise, place de l’Opéra, à la Bourse du travail, le 1er mai.

Il fit partie de la Chambre syndicale des hommes de peine et fréquentait les réunions du Cercle international, rue Aumaire, du Groupe de propagande anarchiste 104 rue Oberkampf et des Trimardeurs, salle Pasquet, 239 rue Saint-Martin. Dans ces réunions, il se vantait de commettre des vols à l’étalage dans les grands magasins et de fabriquer de la fausse monnaie.

En 1892, il fut arrêté à la suite de l’explosion de la caserne Lobau et il fut mis en garde à vue pendant 15 heures.

Début mars 1894 sa présence fut signalée à Paris où le 9 mars il avait participé avec une cinquantaine de compagnons à la « cavalcade anarchiste » en faveur de l’abstention, organisée Place de la République par Eugénie Collot (voir ce nom), avec notamment Constant Marie, il portait la pancarte marquée « Candidat abstentionniste ».

Le 20 mars 1894, le préfet de police délivra un mandat de perquisition et d’amener à son encontre, pour association de malfaiteurs. Le 21 mars, à 6h du matin, le commissaire de police du quartier de Sainte-Avoye se présenta à son domicile 55 rue des Archives. Le concierge leur apprit que Vignaud travaillait avec Maze, un autre cordonnier, dans une chambre au n°22, au 4e étage qui leur servait d’atelier de cordonnier. Vignaud y arriva vers 8h, il fut arrêté et expliqua que son domicile se trouvait au 86 rue des Archives. La perquisition y fit découvrir un numéro de La Révolte du 24 février 1894, une brochure Où vont les anarchistes de Lefrançais. Il fut arrêté et incarcéré à Mazas le 22 mars. Lors de son interrogatoire il avait déclaré : « De fait, je ne suis pas anarchiste, mais théoriquement et philosophiquement, je le suis. Je travaille et ne suis pas de ceux qu’on qualifie de propagandiste par le fait, ceux là sont des révoltés. Je ne suis pas un révolté parce que je gagne bien ma vie et j’ai ce qu’il me faut ». Il avait reconnu avoir participé à des réunions mais avait nié avoir été le correspondant d’un quelconque groupe, puis il avait refusé de signer son procès-verbal redoutant qu’on y ajoute des choses qu’il n’aurait pas déclaré. Le 11 mai, Vignaud fut mis en liberté provisoire.

Au printemps 1894 il demeurait chez un autre cordonnier 55 rue des Archives et travaillait à façon pour un M. Zigler, 25 rue des Blancs Manteaux. A l’été 1894, selon la police, il aurait été blessé à la tête lors d’une rixe avec un autre anarchiste nommé Guyot (?).

C’est sans doute à cette époque que Vignaud — parfois orthographié Vignot ou Vigneaux — s’était réfugié à Londres où il logea notamment chez le compagnon ébéniste Ernest Delebecque puis chez J. Sicard. Il fréquentait Louise Michel, C. Malato, Millet et Vinchon.
En décembre 1894, avec l’aide du groupe Freedom il était parti pour la Belgique où son arrivée fut signalée par la police le 15 janvier 1895. Son nom figurait sur une liste établie par la police française en vue de surveillance aux frontières. Le 15 mai 1895 il fut l’objet d’un arrêté d’expulsion de Belgique.

Le 29 juin 1895, le juge d’instruction Meyer rendait une ordonnance de non-lieu dans l’affaire d’association de malfaiteurs.

En 1902 il demeurait à Paris, 19 passage Gustave Lepeu et continuait de fréquenter les réunions anarchistes. Connu pour ses idées subversives, il était alors sans travail, les contremaîtres se donnant le mot pour ne pas l’embaucher. De plus il avait été blessé d’un coup de poignard au bras lors d’une agression nocturne, ce qui le gênait beaucoup pour travailler.
En effet, le 14 avril 1902, alors qu’il rentrait chez lui, un individu lui sauta à la gorge et lui porta un coup de couteau en pleine poitrine. Il para le coup avec le bras gauche et l’arme lui traversa le bras et ne le blessa que très légèrement au-dessus du sein. Son agresseur réussit à s’enfuir. Il perdit beaucoup de sang et fut conduit à l’hôpital Saint-Antoine pour y être soigné.

Selon le rapport d’un indicateur (28 mai 1902), il cherchait un emploi en dehors de sa profession, mais rencontrait beaucoup de difficulté à trouver parce qu’il manquait « de vêtements convenables » et fréquentait régulièrement l’ancien compagnon Baudoin exclu des groupes en 1894 comme “mouchard”.


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