Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

RESPAUT, André, Gaudérique, Jean

Né le 28 septembre 1898 à Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales) — mort le 26 avril 1973 — Maraîcher ; cafetier ; professeur de gymnastique — FA — FCL — SIA — CNTF — Narbonne (Aude) — Paris
Article mis en ligne le 18 avril 2009
dernière modification le 8 août 2024

par R.D.

Membre d’une fraterie de 8 enfants élevés à Narbonne par leur mère après la séparation d’avec un père, mineur de fer, brutal et buveur, André Respaut, après avoir obtenu le certificat d’études, avait commencé à travailler très jeune, devenant apprenti maréchal-ferrand à Coursan afin, comme ses frères de compléter les maigres revenus procurés par les ménages effectués par leur mère. Après la mobilisation en 1914 de ses deux frères aînés Jean et François qui n’en reviendront pas, André était à son tour mobilisé en 1918. Tandis que son frère Arthur s’enfuyait en Espagne pour échapper lui aussi à une éventuelle mobilisation, André, qui était déjà un militant libertaire et pacifiste convaincu, renonçait à s’insoumettre pour ne pas peiner sa mère.

Après la guerre il retrouvait son frère Arthur avec lequel et Fortuné, un frère cadet, il allait travailler jusqu’en 1933 comme maraîcher, puis comme gérant du Buffet de la gare de Narbonne et enfin comme cafetier-limonadier du Café du Chateau d’Eau qui servit de siège à de nombreuses sociétés musicales dont les deux frères furent d’infatigables animateurs.

En 1920 André fondait le groupe anarchiste de Narbonne. Pendant toute la période des dictatures d’Arlegui, Martinez Anido et Primo de Rivera, il allait rendre de multiples services à la CNT catalane. Il était à l’époque considéré par le Commissaire spécial de Perpignan comme « Le secrétaire du parti anarchiste des Pyrénées-Orientales ».

Les 2-4 décembre 1922 il avait été le délégué du groupe de Narbonne au 3e congrès de l’Union anarchiste (UA) tenu à la Maison du peuple de Levallois (voir Haussard). Fin décembre il aurait remplacé A. Glénat au secrétariat de la Fédération de la région parisienne de l’UA.

Au printemps 1923 il fut une tournée de propagande dans le sud (Coursan, Perpignan, Estagel, Rivesaltes et Lezignan). Cette même année 1923 il participait à l’emprunt pour Le Libertaire quotidien.

Le 28 octobre 1923, il prit la parole lors d’une manifestation organisée à Perpignan par l’UD-CGTU et la Fédération communiste en faveur de l’amnistie. Membre de la Fédération révolutionnaire du Languedoc, fondée lors d’un congrès régional tenu à Béziers le 19 octobre 1924, il participa à ses divers congrès dont celui des 15-16 août 1925. Il collabora à cette époque à la revue trilingue La Revue internationale anarchiste (Paris, 8 numéros de novembre 1924 à juin 1925) dont le gérant était S. Férandel

En 1934, André Respaut montait à Paris pour étudier la philosophie à l’École des Hautes Etudes Sociales où il suivit les cours de Félicien Challaye à qui il vouera toute sa vie une admiration et une affection profonde. Il poursuivit des études de chant, fut également élève de l’école Desbonnet et devint masseur et professeur de culture physique tout en continuant dans la capitale de militer dans le mouvement libertaire.

Pendant la guerre d’Espagne où son frère Fortuné était parti comme volontaire, il fut l’un des animateurs de la Solidarité Internationale Antifasciste (SIA) et assura le passage de nombreux camions d’armes et de ravitaillement au profit de la CNT. Il participa également à de nombreuses réunions et meetings de soutien aux combattants espagnols dans le sud de la France. A la fin de la guerre il revient à Narbonne avec sa compagne espagnole Téri Sisquella, qui, sur ordre du sous-préfet de Narbonne sera internée au camp d’Argelès.

André Respaut (Buchenwald)

Pendant l’occupation allemande, il entra en contact avec le mouvement Combat et intègra la résistance, d’abord en distribuant des tracts puis à partir de fin 1942 comme agent de renseignement. Parallèlement, avec des militants anarchistes d’Alès, de Perpignan et la CNT espagnole, il participa à des passages vers l’Espagne. Le 18 octobre 1943 il était arrêté par la Gestapo : sachant son arrestation imminente il avait préparé un dispositif lui permettant d’y échapper, mais y avait renoncé, craignant que les Allemands n’arrêtent sa vieille maman. Longuement interrogé et torturé, André Respaut, qui n’a pas parlé, fut ensuite transféré au camp de Compiègne, d’où le 12 décembre 1943, il fut déporté en wagons plombés pour le camp de concentration de Buchenwald. Grâce à son entraînement physique, à son courage et à sa générosité, il survivra à l’horreur du camp et y sauvera plusieurs déportés d’une mort certaine dont le futur Député-sénateur Émile Roux. Après la libération du camp le 11 avril 1945 par les troupes américaines, André Respaut fut rapatrié en France à la fin du mois.

A son retour à Narbonne, André Respaut fut l’un des fondateurs de l’Association des anciens internés et déportés, puis Fédération Nationale des Déportés Internés Résistants (FNDIR) dont il sera plusieurs années le président régional. Parallèlement, il reconstituait en 1946 le groupe anarchiste adhérent à la Fédération anarchiste (FA) ainsi que la section locale de la CNTF. Il collabora également à la revue franco-espagole Universo (Toulouse, 13 numéros de novembre 1946 à mai 1948) dont le gérant était Louis Vaquer, ainsi qu’à Défense de l’Homme de L. Louvet. Il fut ensuite membre du groupe de Narbonne de la Fédération communiste libertaire (FCL).

Au début des années 1960 il fut à plusieurs reprises l’orateur des meetings de soutien au peuple espagnol organisés par la CNT française et la CNT en exil.

André Respaut, dont « L’immense bonté se cachait sous un aspect froid, glacial parfois…était par contre très pointilleux, très rigoureux sur les valeurs humaines ; il pensait l’Homme suprême, c’est-à-dire l’homme qui vivrait sans dogmes, ni religion, mais avec une morale sans coercition, ni obligations impérieuses et sans sanctions surnaturelles » (cf. G. Berthuel), est décédé le 26 avril 1973.

Œuvres : — Buchenwald, terre maudite (Narbonne, 1946, 185 p.) ; — Sociologie fédéraliste libertaire (Toulouse, 1961, 118 p., avec une préf. de R. Louzon).


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