Dictionnaire international des militants anarchistes
Slogan du site

Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

SARTINI, Giuseppe

Né le 9 janvier 1876 à Grosseto (Bologne) – mort début janvier 1957 Peintre en bâtiment – UAI - FAI – USI – Carrare (Toscane) - Piacenza & Bologne (Émilie-Romagne)
Article mis en ligne le 1er décembre 2024
dernière modification le 7 janvier 2025

par R.D.

Après « quelques années » de lycée, Giuseppe Sartini, fils d’Antonio et Adélaïde Ginanneschi travailla d’abord comme peintre en bâtiment, puis comme commis à l’état civil. Ayant abordé très jeune l’anarchisme, il était considéré au début du siècle comme « l’un des dirigeants du parti » dans la région de Grosseto.

Licencié en mai 1902 « pour troubles et pour ses principes subversifs », il s’installa l’année suivante à Carrare, poussé par les anarchistes locaux avec lesquels il était en contact et le journal Combattiamo !, auquel il collabora avec des articles signés par G. S. et Nitisar et prit la direction du secrétariat de la Chambre du Travail (CdL), en remplacement d’Enrico Petri, également anarchiste. La CdL carrarais avait été récemment exclue de la Fédération des Chambres du Travail pour avoir favorisé la création d’une Fédération du Marbre, la Marmorea, en opposition à la Fédération du Bâtiment, et les relations particulièrement tendues avec les socialistes, enracinées dans le Comité des Carrières, Ce n’est qu’à l’été 1904 que le problème sera résolu par la réadmission de la CDL au sein de la Fédération.

En août 1904, alors qu’il en était le secrétaire de la CDL, fut confronté à un affrontement très dur avec le Consortium des Industriels, qui, après le boycott ouvrier et le lock-out patronal, se termina début septembre par un seul compromis apparemment honorable pour l’organisation syndicale, fragilisée par les divisions et l’âpreté de la lutte. Quelques semaines après la grève générale nationale consécutive aux massacres de Buggerru et Castelluzzo, on voit les dirigeants de la CdL, Sartini en tête, avec davantage de positions attentistes, pour freiner l’impatience de la base populaire, visant à reconstituer l’unité avec le Comité Cavatori, réalisée au début de 1905.

En janvier 1905, Santini. participa au Congrès de Gênes (Ve des Chambres du Travail) où il soutint la ligne de la CdL de Milan au sujet d’une grève générale, exprimant une forte méfiance à l’égard des fédérations professionnelles. Fin novembre de la même année, il représenta le CdL Apuan à la conférence syndicale de Bologne, promu par Ottavio Dinale réunissant anarchistes et socialistes favorables à l’action directe et syndicale et à laquelle participèrent entre autres aux côtés de Borghi, Pietro Gori, Leda Rafanelli, Rodolfo Felicioli, Domenico Zavattero et Luigi Fabbri

Cependant, en mai-juillet précédent, un nouvel affrontement avec les entreprises du consortium, aboutissait à un lock-out de 50 jours et se terminait par une défaite, laissant la CDL exsangue pendant plusieurs mois. Sartini lui-même avait été arrêté au plus fort des combats et condamné à 25 jours de prison. Ayant perdu son emploi, Il resta au chômage jusqu’en avril 1907, date à laquelle il s’installa à La Spezia, car il fut appelé à titre expérimental à diriger le secrétariat de la CdL locale, soutenu par le républicain Ciro Corradetti, ancien secrétaire de chambre. Avec Sartini, la CdL réaffirma « la poursuite de la tactique adoptée dans le passé et conforme aux principes révolutionnaires les plus sincères et les plus sains » (Spezia, Il Libertario, 6 juin 1907) et en novembre 1907 il participa à Parme au Congrès de la résistance, prenant parti en faveur de la motion Badiali, en faveur d’une scission avec la CGdL.

Fin mai 1908, lors de la grève générale de Parme, la Chambre du Travail de La Spezia fut parmi celles qui accueillirent les enfants des grévistes et l’une des rares, fin juin, à proclamer « la grève générale tous azimuts ». après l’assaut de l’armée contre la CdL de Parme. Les nombreux échecs au niveau local et la diminution des effectifs conduisirent les républicains à revoir leur position isolationniste à l’égard de la CGdL, ce qui entraîna le retrait de Sartini, peu soutenu par Binazzi et les anarchistes.

Après avoir déménagé à Vicence, toujours comme secrétaire de chambre, en août 1910, Sartini s’installa à Bologne, où, aux côtés de Borghi, il se consacra à une intense propagande anarchiste, ayant toujours comme point de référence "le syndicalisme révolutionnaire, antiétatique et antiautoritaire". (Incohérences syndicalistes, Il Pensiero, 1er juillet 1910). En décembre, toujours avec Borghi, il participa aux congrès bolognais définis respectivement comme « syndicaliste » et « d’action directe », du deuxième desquels est né le Comité national d’action directe.

Rédacteur en chef de Il Risveglio sindacale, organe du syndicat provincial du bâtiment, dont le secrétaire était toujours Borghi, et du périodique anarchiste L’Agitatore où il collaborait sous le pseudonyme Adelante, Sartini participa à la publication du numéro du 5 novembre 1911, où Maria Rygier glorifiait le geste du soldat Masetti. Accusé, avec toute la rédaction de L’Agitatore d’incitation au crime et d’apologie du crime dans la presse, Sartini parvint d’abord à échapper à l’arrestation, puis se présenta spontanément à la Cour de justice en avril 1912 à Bologne… Condamné à 13 mois et 22 jours de détention avec Dainesi et Vedova tandis que Maria Rygier était condamnée à 3 ans de détention, il se cacha de nouveau et se réfugia à Lugano, où il resta jusqu’au début de 1913, date à laquelle il profita d’une amnistie et retourna à Bologne, reprenant son activité de propagandiste et participant à la conférence anarchiste de mai à Bologne.

À la fin de la même année, Sartini assuma le rôle de secrétaire de la CdL de Piacenza et participa à ce titre au IIe Congrès de l’Union Syndicalle Italienne (USI) à Milan le décembre 1913), dont il devint un élément dirigeant. A ce congrès l’USI comptait alors 98.037 militants représentés par 191 délégués.

Lors de la “Semaine Rouge” (juin 1914), il dirigea la grève générale de protestation et le déclenchement de la guerre européenne le vit comme le protagoniste des manifestations contre le conflit. Promoteur de la conférence anarchiste de Piacenzia, toujours au début du mois d’août, dans le but de structurer organisationnelle ment le mouvement local, il revint peu après à Bologne et fut l’un des opposants les plus tenaces à la ligne interventionniste de De Ambris, Corridoni et Masotti qui a conduit à la scission de l’USI et au départ de la CDL de Pame et des Milanais. « Un homme doux et gentleman que personne n’aurait dit, s’il ne l’avait pas bien connu, du courant révolutionnaire – écrira Borghi écrira à son sujet après sa mort – Sartini est resté extrêmement fidèle au courant qui niait "l’union sacrée". […] face à la guerre. » Avec le transfert du secrétariat de l’USI dans la capitale émilienne, Sartini devint secrétaire administratif de l’organisation.

Orateur en novembre 1916 lors des rassemblements en faveur de Carlo Tresca à Bologne et Modène, en 1917 Sartini fut appelé aux armes et ne put retourner à Bologne qu’à la fin de la guerre.

A la veille de la grève générale « démonstrative » des 20 et 21 juillet 1919 pour la Russie soviétique et la Hongrie, ainsi que pour l’amnistie, la démobilisation et le retour de Malatesta en Italie, Sartini fut arrêté avec l’ensemble du comité permanent de l’USI (Borghi, Virgilia D’Andrea, Enrico Meledandri – également informateur de la police –, Sacconi et Enrico Bolognini).

En octobre suivant, il assuma le rôle de secrétaire adjoint de la CdL bolognaise, En décembre il présenta le rapport financier à le IIIe Congrès de l’Union Syndicale Italienne (Parme), dont il était membre du Conseil Général.

Son engagement au sein de l’USI ne l’empêcha pas d’être actif dans le mouvement libertaire. Correspondant de Umanità nova toujours sous le pseudonyme d’Adelante, en avril 1920 il présida le congrès régional d’Émilie-Romagne de l’Union anarchiste italienne et début juillet il ouvrit le congrès national de l’UAI au nom de l’Union anarchiste bolognaise.

En octobre, une fois terminée l’occupation des usines et après les arrestations de la rédaction de Umanità nova, de Malatesta et Borghi, Sartini fut emprisonné avec tout le Conseil Général de l’USI.

En 1921, pendant la détention de Borghi, il ne se contenta pas de soutenir dans Guerra di Classe, aux côtés de Giovannetti, de dures polémiques avec les communistes et il tenta de sauver l’unité de l’organisation ébranlée par le cas des « deux députés » (Faggi et Di Vittorio) et par la présence de tendances pro-confédérales, mais il intensifia également son activité politique et fut arrêté à deux reprises à l’occasion de conférences anarchistes tenues à Bologne.

Il avait également été chargé par l’UAI d’effectuer des inspections en Lombardie pour évaluer les différentes situations locales et tenter de reconstituer le mouvement perturbé par le fascisme et la répression suite au massacre de Diana.

En mars 1922, il participa au IVe Congrès de l’Union des syndicats (Rome), mais après l’avènement du fascisme au gouvernement, il se retira de la politique active. Constamment surveillé durant les vingt années suivantes, il résida toujours à Bologne où il « ne donne lieu à aucune remarque ». Cependant, après les grèves de mars 1943, il sentit le changement du climat politique et, même avant la chute de Mussolini, en mai, il rencontra clandestinement à Florence quelques autres anarchistes pour planifier la reconstitution du mouvement.

Après la guerre, membre de la FAI, il participa encore à des conférences et collabora avec la presse libertaire. En 1948 il était membre pour l’Émilie de la rédaction de l’hebdomadaire Umanità nova. En mai 1951, il assista à la Conférence nationale pour les victimes politiques organisée par le Comité du même nom. A l’été 1954, suite à une série d’articles parus dans Umanità nova, il avait été poursuivi avec Umberto Consiglio, Giuseppe Mariani, Gigi Damiani et Riccardo Sacconi pour « injures au Pape et à la religion ».

Il mourut à Bologne au début de janvier 1957.


Dans la même rubrique

SANTANGELO, Angelo

le 19 janvier 2025
par R.D.

SANTI, Tony

le 15 janvier 2025
par R.D.

SANTINI, Federico

le 24 novembre 2024
par R.D.

SARRAZIN (ou SARAZIN)

le 21 avril 2024
par R.D.

SANTANA, Honorio, Bruno

le 4 février 2023
par R.D.