Piotr Archinov (souvent orthographié Archinoff) avait participé au mouvement révolutionnaire de 1904 et adhéré d’abord au groupe bolchévique du parti social démocrate russe. Ouvrier métallurgiste aux ateliers de chemin de fer de Kisil-Arvat (Turkestan) il était en 1905-06 le rédacteur de Molot (Marteau) paraissant illégalement à Kisil-Arvat près de la mer Caspienne, journal qui aura une grande influence dans le développement des idées révolutionnairs chez les cheminots de l’Asie centrale.
Pour échapper à la police, il allait en 1906 à Ekaterinoslav (Ukraine) où il devenait anarchiste et militait alors comme propagandiste et organisateur à l’usine Shoduar. Cette même année, où se multipliaient les procès contre les révolutionnaires il faisait sauter le 22 décembre un bâtiment de la police à Nisnedneprovsk, attentat dans lequel étaient tués trois officiers cosaques et plusieurs policiers. L’année suivante, le 7 mars, il attentait à la vie de Vassilenko le chef des ateliers principaux des chemins de fer d’Alexandrovsk : Vassilenko avait dénoncé 120 ouvriers qui avaient pris part à une émeute armée à Alexandrovsk et sur ses dénonciations 100 d’entre eux avaient été condamnés à mort ou aux travaux forcés. Arrêté sur le champ Archinov était condamné, deux jours après, à la pendaison. L’exécution avait été momentanément suspendue, l’affaire devant passer devant un conseil de guerre, ce qui permit à Archinov de sauver sa vie. Dans la nuit du 22 avril 1907, il parvenait à s’évader avec d’autres prisonniers puis gagnait la France où il restait un an et demi.
Il retournait en Russie en 1909 où, à l’automne, il était arrêté pour son activité anarchiste à Briansk. Il s’évadait une nouvelle fois et continuait ses activités clandestines en particulier dans les provinces de Kostrom et de Smolensk où en mai et juillet 1910 il participait avec d’autres militants anarchistes à plusieurs attaques à main armée. En septembre1910 il était arrêté en Autriche avec un transport d’armes et de propagande à destination de la Russie et interné à Tarnopol. A la demande du gouvernement russe il était extradé neuf mois plus tard, en mai 1911, et interné à Moscou sous la fausse identité de F. I. Mikhailski. Traduit le 25 juin 1911 devant la cour d’asises avec 36 autres révolutionnaires, il était condamné en octobre à vingt ans de travaux forcés. C’est à cette époque qu’il rencontrait Nestor Makhno à la prison Boutiky de Moscou.
Libéré par la révolution, le 1er mars 1917 il participait alors très activement aux évènements. Il a été l’un des organisateurs de la maison d’édition libertaire de Moscou et du journal de la fédération libertaire Anarkhia. En 1918 il était membre du Bureau des anarchistes du bassin du Donetz et rédacteur de son organe Golos Anarkhista et participait en juin à la conférence anarchiste de Moscou.
Responsable de l’organisation Nabat, il partait en avril 1919 pour l’Ukraine où il devenait membre du conseil de l’état-major de l’armée Makhnoviste. Responsable de la section culturelle il assurait avec A. Baron la publication des journaux Pouts’k Svobodie (Voix de la liberté) qui avait une édition russe et une autre ukrainienne, et de Golos Makhnovtsa (La Voix du Makhnoviste, Kharkov, 1920) qui publiera 3 n° (n°3= 21 novembre 1920). Il était également l’un des éditeurs du journal Nabat. Il participait très activement à l’organisation du front contre Denikine et à toute l’aventure Makhnoviste.
Activement recherché et poursuivi par les autorités bolchéviques après la défaite, il parvenait à passer en Allemagne avec sa compagne. En 1923-24 il était à Berlin rédacteur de Anarkhitchneski Vestnik et rédigeait l’histoire du mouvement makhnoviste. Il fut l’auteur du texte Réponse aux ex-anarchistes ralliés au bolchevisme qui fut traduit et publié dans Le Libertaire quotidien à partir de décembre 1923. Dans Le Libertaire (5 août 1924) il répondit aux mensonges et calomnies notamment contre Makhno et Voline parus dans un dossier de La Vie ouvrière (4 et 11 juillet 1924).
Il s’installait en France vers 1925 et travaillait à Paris comme cordonnier. Il collaborait alors à l’Encyclopédie Anarchiste de Sébastien Faure et jusqu’en 1930 à l’organe des anarchistes russes et polonais de Paris Dielo Truda (Paris, 1925-1929, puis Chicago, 1930). En 1926 il était le secrétaire du groupe anarchiste russe de Paris. Il a été le principal auteur du projet de Plate forme organisationnelle qui allait diviser le mouvement libertaire. Il a été l’un des organisateurs de la conférence internationale de Bourg-la-Reine en 1927 et a participé à la rédaction de “Réponse aux confusionnistes de l’Anarchie”.
Dans les années 1930 il demeurait 128 rue Diderot à Vincennes, figurait sur une liste d’anarchistes de la région parisienne et son véritable nom aurait été selon la police Wladimir Pankowski.
Séparé de sa femme, souffrant du mal du pays, devenu amer après l’échec du mouvement plateformiste et les dures critiques de nombreux militants anarchistes, il était expulsé de France en 1931 et prenait contact alors avec le bolchévique Ordzhonide, qu’il avait connu en prison, et qui lui promettait de l’aider à rentrer en URSS s’il abandonnait ses critiques du bolchévisme et rompait avec l’anarchisme. Archinov publiait alors les deux pamphlets anti anarchistes « L’anarchisme et la dictature du prolétariat » (octobre 1931) et « Éléments neufs et anciens de l’anarchisme » (1933). Il rentrait en URSS en 1933 et travaillait alors comme correcteur. Le 30 juin 1935 il publiait dans les Izvestia un article sur l’échec de l’anarchisme. En 1938 lors des grandes purges staliniennes, il était arrêté et condamné à mort pour “avoir voulu restaurer l’anarchisme en URSS”. Il aurait alors été déporté puis fusillé.
Œuvres : — Plateforme d’organisation de l’Union générale des anarchistes.-Paris, Ed. la librairie internationale anarchiste, octobre 1926, 32 p. — Supplément à la plateforme… : questions et réponses.- 15 p. — L’anarchisme et la dictature du prolétariat. (octobre 1931) ; — Éléments neufs et anciens de l’anarchisme (1933).-Histoire du mouvement makhnoviste 1918-1921.- Paris, s.d. (1923), Ed. de la librairie internationale, 424 p., préface de Voline et portrait de Makhno.