Dictionnaire international des militants anarchistes
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SALSOU, François [SALSOU, Melanie]
Né le 4 février 1876 à Montlaur (Aveyron) - mort le 19 juillet 1901 - Garçon pâtissier ; ciseleur sur zinc – Paris - Guyane
Article mis en ligne le 5 janvier 2011
dernière modification le 7 mars 2024

par R.D.
François Salsou (1900)

François Salsou, fils d’un agriculteur devenu charron, et d’une employée domestique louée à la journée, devint orphelin de père en mai 1891. Sa mère dut alors élever, seule, ses trois sœurs et son jeune frère. À compter de cette date, François, le cadet de la famille, apporta au foyer l’intégralité du salaire de commissionnaire qu’il percevait. La scolarité de ce bon élève venait de s’arrêter sur le succès à l’examen du certificat d’études primaires auquel il fut reçu premier du canton de Saint-Affrique. Il garda de ce temps d’études un goût prononcé pour la lecture et il affirma que sa conversion aux idées anarchistes fut le résultat de la découverte, à quinze ans, de la Révolution sociale de Proudhon. Il fut, par la suite, un lecteur régulier de la presse et de l’édition anarchistes, consacrant à sa formation tout son temps disponible.

Cependant, il se convainquit « que les discours et les écrits étaient vains, que les actes seuls pouvaient changer quelque chose aux injustices du monde ». Dès lors il « se résolut à faire un coup et à faire le sacrifice de sa vie ». C’est à Alger, puis à Lyon et enfin à Paris qu’il avait forgé ses convictions.

Après avoir envisagé de s’en « prendre au capital » en la personne de Rothschild, il mit à exécution le projet de tuer Casimir Perier auquel il reprochait d’être le responsable des lois scélérates (1893 et 1894). Armé d’un pistolet, il attendit pendant quatre heures le passage du successeur de Carnot, qui, ce jour-là, avait changé son itinéraire de promenade.

L’iniquité de traitement entre des montreurs d’ours persans qui avaient été refoulés aux barrières de Paris, et le Shah d’Iran, « hôte de la France » en visite à l’Exposition universelle, reçu avec tous les honneurs et tous les fastes, décidèrent François Salsou à porter ses coups sur cet « honorable souverain asiatique ». Le 2 août 1900, peu avant 9 heures, avenue de Malakoff, Il attendit le passage du landau royal, écarta les gardiens et sautant sur le marchepied pointa son revolver sur la poitrine du Shah. La gâchette actionnée, le coup ne partit pas car le percuteur avait frappé le culot de la balle et non l’amorce.

Arrêté sans ménagements il cria deux fois un inhabituel slogan anarchiste : « Vivent les enfants du Peuple ! ». Après deux jours de mutisme son identité fut dévoilée sous le nom de Salson. Ce patronyme était celui qui figurait sur les documents judiciaires de ses précédentes condamnations : 1894, 3 mois de prison pour propagande anarchiste. 1899, 8 mois de prison pour coups et blessures portés lors d’une vive discussion de nature politique. Pendant plusieurs jours, à compter du 4 août 1900, François Salson/Salsou sera à la « Une », complète ou partielle, de tous les journaux nationaux et régionaux. La plupart des périodiques s’en tinrent à une information factuelle, mais quelques-uns, et plus particulièrement l’Intransigeant de Rochefort ou les Temps nouveaux avec André Girard produisirent des articles mettant en question la sincérité de l’acte commis par François Salsou : l’attentat fut qualifié « d’attentat pour rire », lui, fut traité « d’anarchiste pieux » et il fut accusé d’être un agent à la solde du préfet de police Lépine.

L’instruction judiciaire, d’une durée de deux mois, montra qu’il avait agi seul, que sa compagne Augustine Coadet ignorait tout de son projet et que son ami le chansonnier anarchiste Auguste Valette n’avait aucune responsabilité dans la tentative d’attentat. Ce dernier avait mis François Salsou en relation avec le poète libertaire Paul Paillette, une des figures du naturianisme montmartrois, dont il partagea les idées.

Le procès devant la Cour d’assises de la Seine se déroula le 10 novembre de 12h à 18h30. Me Lagasse, l’avocat de Ravachol et de Léauthier, assurait la défense de François Salsou. Il axa sa plaidoirie sur le fait que « l’arme n’avait pas touché », qu’il n’y avait pas crime et donc que l’accusé ne pouvait être déféré devant un jury. Entre acquittement et peine de mort le tribunal opta pour les travaux forcés à perpétuité.

De Fresnes, Salsou fut dirigé vers Saint-Martin-de-Ré puis le 31 mai 1901 vers les bagnes de Guyane. Arrivé aux îles du Salut vers la mi-juin sur Le Calédonie, il mourut de « diarrhées et de fièvre » le 19 juillet. Selon Le Libertaire (30 novembre 1901) et le témoignage du compagnon Rullière, son cadavre fut ensuite jeté aux requins.
L’écrivain anarchiste, Charles Malato, dans un article de l’Aurore du 27 novembre 1901 sous le titre : Au dessous des requins. La mort de Salsou. Sport militariste, rendit compte de « ce qu’on a fait de Salsou vivant et mort ». Sa mort, il l’attribua aux tortures auxquelles il était soumis et « aux souffrances physiques et morales essuyées par le forçat ». Rochefort et Girard qui laissaient entendre au moment du procès que François Salsou bénéficierait des lois Bérenger sur l’aménagement des peines restèrent silencieux.

Le chroniqueur judiciaire du Figaro, le 11 novembre 1900 promit à cet anarchiste différent, doux, respectueux et modeste de n’avoir pas son portrait sur la cimaise si un jour les anarchistes organisaient un musée de la propagande par le fait. Et pendant 115 ans il en fut ainsi.


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