Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

WU ZHIHUI 吳稚輝

Né le 25 mars 1864 à Wujin (Jiangsu) — mort le 30 octobre 1953 — Professeur — Shangaï — Paris — Pékin — Taibei
Article mis en ligne le 30 juin 2010
dernière modification le 1er novembre 2024

par R.D.

Né dans une famille de lettrés, Wu Zhihui (parfois transcris Wi Chih Hui) fut avec Li Shizeng l’une des figures de proue de l’anarchisme chinois. Entre 1897 et 1901 il occupa divers postes d’enseignement à Tientsin et Shangaï avant d’aller étudier à l’École normale supérieure de Tokyo au Japon. Suite à un conflit entre les étudiants chinois et le ministre chinois, il fut expulsé du Japon en 1902 et devint proviseur de l’École patriotique fondée à Shangaï en novembre 1902 par la Société chinoise pour l’enseignement. Au contact des milieux révolutionnaires, il se ralliait alors à la cause anti-mandchoue et dut bientôt fuir Shangaï et s’exiler en Angleterre, d’abord à Edimbourg puis à Londres où il rencontra Sun Yat Sen et adhéra fin 1905 à la Ligue jurée que ce dernier avait fondée en août à Tokyo.

Début 1906 il gagnait Paris où il rejoignait Li Shizeng et Zhang Renjie (ou Jingjiang) avec lesquels il fondait l’Association du Monde (Shinjie she), puis amené à l’anarchisme par Li Shizeng fondait avec lui et Zhang l’hebdomadaire Xin Shiji (Paris, n°1, 22 juin 1907). Sous titré en espéranto La Novaj tempoj, puis, à partir du n°51 du 28 janvier 1909, en français Le Nouveau siècle, sans doute pour rendre hommage aux Temps nouveaux de Jean Grave. D’ailleurs le journal était domicilié 4 rue Broca (aujourd’hui rue Edouard Quenu) dans le même immeuble que le journal de Grave. Le journal qui allait publier plus de 100 numéros en trois ans, avait été financé grâce à Zhang Jingjiang qui avait monté l’un des premiers restaurants chinois de Paris et une petite entreprise de fabrication de Tofu.

Tandis que Li Shizeng se chargeait d’exposer l’idéal anarchiste à travers des traductions et des essais, Wu Zhihui faisait preuve d’un réel talent satirique contre ce qu’il appelait les « écumeurs de vérité » : la monarchie mandchoue, la famille (confucéenne) et autres institutions de la Chine traditionnelle. Il professait un anarchisme « évolutionniste » dans lequel l’anarchie ne pourrait apparaître qu’après une évolution longue et continue au cours de laquelle les anarchistes devaient éclairer le peuple en l’’éduquant. Le groupe anarchiste chinois de Paris sera l’un des foyers du renouveau intellectiel qui permettra l’explosion du mouvement révolutionnaire du 4 mai 1919.

Retourné en Chine lors de la révolution républicaine (1911-1912), il fut l’un des fondateurs avec Li Shizeng à Pékin en 1912 de la la Société pour les études en France et à Shangaï de la Société pour la promotion de la vertu. Ces sociétés seront à l’origine de l’envoi en France de nombreux étudiants chinois, parmi lesquels les futurs responsables communistes Zhou Enlai et Deng Xiioaping. Parallèlement Wu introduisait en Chine les écrits de Kropotkine et fut l’un des principaux responsables de la campagne pour la purification des prononciations de la langue chinoise et l’élaboration d’un alphabet phonétique qui sera adopté en 1918.

Avec Li Shizeng il patronnait à Pékin en 1917-1918 le Bulletin de la Liberté (Shishe Ziyoulu), puis en 1918, avec quelques membres de la revue La Voix du peuple (Minsheng) de Liu Sifu, il fondait à Shangaï la revue Le Travail (Laodong) qui fut l’une des toutes premières manifestations d’intérêt des intellectuels révolutionnaires pour le monde du travail. Il collabora à cette époque au journal anarchiste Le Tocsin du peuple (Mingzhong) publié à Canton et Shangai de 1922 à 1927, fondé par Li Shaoling et Li Jianmin et auquel collaborèrent la pluapart des militants les plus importants des années 1920 : Ou Shengbai, Bajin, Huang Lingshuang, Wei Huilin, etc. Puis au début des années 1920, Wu comme d’autres anarchistes et par anticommunisme, se rapprocha du Guomingtang et de la droite nationaliste, ce qui leur vaudra d’être critiqué par un grand nombre de militants dont Bajin, Ou Shengbai et Liang Bingxian qui étaient opposés à cette collaboration. En 1924 il fut élu à la Comission centrale de contrôle du Guomintang et après 1927 devint le conseiller personnel de Chiang Kai-shek tout en refusant toute fonction gouvernementale. Cela n’empêcha pas qu’à la fin 1929, toute tendance anarchiste avait été supprimée à l’intérieur du Guomintang. En 1931 il fut élu président de l’Assemblée constituante. Pendant la guerre sino-laponaise (1937-1945) il suivit le régime à Chunking et après la victoire maoiste partit pour Taiwan en avril 1949. Wu Zhihui est décédé à Taibei le 30 octobre 1953.

Œuvres : — Propos (Shangaï, 1923) ; — Ecrits culturels (3 vol. Shangaï 1937) ; — Lettres choisies (Shangaï, 1947) ; — Œuvres choisies (5 vol., Taibei, 1964).


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