Ancien Communard devenu anarchiste selon la police, Clair Joseph Sicard (souvent orthographié Sicart) fut l’un des gérants du Père Peinard d’E. Pouget. En 1889 il était membre du Comité de secours aux familles et détenus politiques dont le secrétaire était Benoit Morel et le trésorier G. Cabot.
Il pourrait s’agir du Sicart, réfugié à Bruxelles vers 1887, et où il avait été le fondateur du journal La Réforme puis, avec le compagnon Henry Dupont de l’éphémère Le Rapide et d’une agende presse téléphonique qui avait rapidement fait faillitte.
En juin 1891 il avait remplacé à la gérance du Père Peinard Berthault condamné à 2 ans de prison. C’est à ce titre qu’en septembre 1891, suite à un article sur les grandes manœuvres de l’armée, il fut condamné à son tour à deux ans de prison, 3.000 fr. d’amende et 2 ans de contrainte par corps, peine confirmée aux Assises le 12 octobre et où il avait notamment déclaré : « … Nous ne voulons plus être l’enclume et subir le marteau. Ma vie est celle de tous les prolos : ma mère travaillait depuis l’âge de sept ans dans une filature. Plus tard, mariée avec mon père, elle dît quitter sa place, ne voulant pas être la maîtresse de son patron. Quand je fus grand et marié, travaillant comme des nègres, ma femme et moi, il nous arriva les mêmes désagréments : ma femme fut obligée de quitter son patron pare qu’elle ne voulait pas accepter ses sales propositions. A Paris, il en fut de même pour ma fille : n’ayant pas voulu céder aux caprices du coupeur de la maison Burow et Maston, rue de la Paix, nous dûmes endurer cinq mois de misère. Voilà comment est traité le travailleur, de par le droit du pus fort : pour lui, la prostitution de ses bras ; pour la femme, la vente de son corps, ou bien la mort… Condamnez moi à la prison, vous n’empêcherez pas qu’un jour viendra où il n’y aura plus de prison, plus d’exploitation, plus d’autorité et où votre dieu capital s’écroulera sous les coups des prolos révoltés ». Après sa condamnation, il fut remplacé à la gérance du Père Peinard par J. Dejoux.
Il se réfugia à Bruxelles, puis à Londres, où il fréquenta les milieux anarchistes français. Veuf, Sicard épousa la compagne de Constant Martin (celui-ci était déjà marié) à la fin de 1894, un mariage blanc (elle est italienne et c’est pour qu’elle puisse obtenir le droit de résidence en France que le compagnon Sicard l’épouse). Selon le rapport conservé aux Archives de police, « Sicard a eu de la peine à se décider à renoncer à ses droits d’époux. Quelques compagnons ont même dû intervenir auprès de lui à ce sujet. » (cf. APpo BA 1509). A Londres il hébergea notamment le compagnon Antoine Vignaud, mais aussi l’indicateur signant ses rapports “A41” et qui était semble-t-il un insoumis de l’armée française. Il fut à plusieurs reprises signalé comme lié à Corti et Marraini qui se livraient à divers essais de matériaux explosifs. Selon les rapports d’indicateurs, il était dans la misère, travaillait à de petites réparations dans son logement composé “d’une seule pièce très sale”.
Son nom figure (sans photo) dans l’Album photographique des individus qui doivent être l’objet d’une surveillance spéciale aux frontières (Paris, Imprimerie Chaix, septembre 1894).
Au bénéfice de la loi d’amnistie du 28 janvier 1895, il put toutefois rentrer en France en février (ou septembre ?) 1895, à Paris d’abord où il demeura rue de la Goutte d’Or, puis à Marseille. Fin 1896 il demeurait à Paris, 5 rue Gérando. En septembre 1896, il avait participé rue Pernelle (XVIIe arr.) à une réunion en ue de reconstituer le groupe L’Aiguille.
Par la suite Sicard fut membre du Groupe de secours aux détenus constitué en 1898.