Dictionnaire international des militants anarchistes
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NAHON, Jean, Pierre, Joseph, dit “{Ernest}”
Né le 26 février 1862 à Caussade (Tarn-et-Garonne) - colporteur en articles de mercerie ; cafetier - Marseille (Bouches-du-Rhône) – Lyon (Rhône) – Gap (Hautes-Alpes) - Toulon (Var)
Article mis en ligne le 9 octobre 2008
dernière modification le 20 avril 2024

par R.D., René Bianco

Ernest Nahon profita, dans les années 1880-1890, de son métier de marchand forain pour faire de la propagande anarchiste dans le sud-est de la France (Var, Hérault, Bouches-du-Rhône…). Il vint une première fois à Marseille en 1886 et y donna plusieurs causeries dans divers quartiers de la ville.

Revenu à Marseille il se montra très critique envers les syndicats dont il disait qu’ils étaient bons « tout au plus à engraisser quelques exploiteurs au détriment des travailleurs ». Le 10 novembre 1888, il tint au Bar Livergne, chemin d’Endoume, une réunion à laquelle assistèrent, selon la police, « vingt personnes, dont huit italiens et quatre femmes » et qui avait pour but de « préparer le terrain en vie de la création d’un cercle anarchiste au dessus de cet établissement ». Il fut fin 1889 membre du groupe marseillais Les Penseurs et en janvier logea 3 rue de l’École de Médecine, domicile qu’il quitta « furtivement sans payer ». Le 22 octobre 1889, suite à une réunion tenue Caveau du Marché, les membres du groupe avaient parcouru les rues en chantant La Carmagnole et trois compagnons italiens avaient été arrêtés. Nahon, craignant d’être arrêté à son tour, avait alors quitté Marseille à destination de Toulon.

Selon la police il était également l’un des animateurs du groupe de Toulon où “sa facilité de parole lui donnait de la prépondérance sur ses compagnons illettrés pour la plupart”. Au printemps 1890, au nom du groupe anarchiste de Toulon, il fut avec Pierre Caneppa, Dominique Fouque et Jean Philippot, le signataire d’un manifeste pour le 1er Mai.
Fin mai 1890, il donna avec Caneppa deux conférences publiques et contradictoires à Nice sur le thème “La société passée, présente, future et les réformes utiles”. Une quarantaine de personnes, la plupart étrangères, y auraient participé. A l’été 1890 et sur le même thème il tint une série de conférences dans la région (Grasse, Cannes, Vallauris…). Lors d’un conférence à Cannes il avait notamment déclaré : “Ce qu’il faut c’est l’autonomie, c’est à dire l’anarchie.On peut arriver à faire le bonheur de tout le monde par l’union des hommes contre la nature et non par l’union des hommes contre d’autres hommes. Ce sont là les principes d’harmonie et de solidarité sur lesquels repose l’anarchie… Le jour de la révolution attendue, il faudra brûler toutes les paperasses que comporte l’institution criminelle, qui est la cause de la mort de 283 mille malheureux par an, et ménager autant que possible les hommes, car les hommes ne sont pas méchants ; ce sont les institutions qui sont mauvaises”.

Le 4 septembre 1890, aux côtés d’Octave Jahn et de Monod de Dijon, il avait été l’un des orateurs de la réunion tenue salle Rivoire à Lyon devant 500 persones. Il y avait violemment apostrophé le commissaire de police, le traitant de "lâche, pourri et vendu". Le lendemain il avait été arrêté au domicile de Perret avec les compagnons Lauze, Petit et Dheme (cf. Le Temps 5 septembre 1890).

Il déménagea une nouvelle fois « à la cloche de bois » en novembre 1890 du garni qu’il occupait 2 rue Molière à Marseille. Entre 1880 et 1883 il fut condamné à 4 reprises (Grasse, Chatillon sur Seine, Marseille) à de courtes peines de prison pour "vagabondage, vol à la tire ou mendicité".

Il était alors parti pour Lyon où l e 1er novembre 1890, il prit part, aux côtés d’Octave Jahn et de P. Bernard, à l’organisation d’un congrès régional de tous les groupes anarchistes de la région de l’Est ; 150 délégués y discutèrent de la grève générale et de l’entrée des anarchistes dans les syndicats. Nahon, jugeant la grève inutile, s’opposa à l’entrée dans les syndicats et préconisa la révolte armée. Le congrès avait été précédé, la veille, d’un grand meeting public, salle Rivoire, où des discours très violents avaient été prononcés à propos de la grève générale, de la révolution pour le 1er mai 1891 et des actes de propagande par le fait. Nahon se fit particulièrement remarquer par sa violence et par les injures qu’il adressa au commissaire de police présent dans la salle. Le 2 novembre la police opéra cinq arrestations parmi les délégués du congrès. Nahon fut arrêté et condamné à deux mois de prison pour outrage envers le commissaire de police.

En février 1891, il participa à Romans (Drôme) à une grande réunion contradictoire puis retourna sans doute à Marseille, puisqu’en mai 1891, il y déménageait de nouveau « à la cloche de bois » d’un garni situé 8 rue des Consuls. En septembre, au nom du groupe communiste anarchiste Les Penseurs il tenta, avec Maurice, d’organiser à Marseille un congrès international qui n’aura pas lieu, faute de fonds (cf. La Révolte, 1er août 1891). Puis il partit pour Toulon où en 1893 et 1894, il prit une part active aux réunions anarchistes et où il demeurait alors 9 rue Corneille. Lors d’une conférence tenue le 14 mai 1893 à la Salle du comptoir Marseillais, après avoir dénoncé les errements de l’instruction obligatoire instituée par le gouvernement, il avait notamment déclaré : "…Révolution future, proche ou lointaine, va droit au but, prends la bête universitaire et assomme là. Ecrase tous les germes empoisonnés qu’elle recèle dans ses flancs pourris. Frappe, frappe sans cesse, car la bête a meurtri de coups, abêti des intelligences, gangréné des cœurs, vidé des cerveaux. Elle a fait des lâches, des brutes, des prostituées, des détraqués, des marchands de chair humaine ! Ne pardonne pas aux hommes qui la représentent, car en faisant celà, ils savent ce qu’ils font. Démoli par tous les moyens qui te sont bons, descends dans la rue, propage ta doctrine, prends un fusil, bats toi comme un bon, ne recule jamais, avance toujours, en un mot détruit tous les édifices qui sont sur ton passage et qui t’empêchent d’arriver au but où tu te proposes d’arriver, c’est à dire à prendre la part de plaisir qui te revient”.

Lors d’une conférence tenue à Marseille en janvier 1894 par Dumas de Saint-Étienne, Nahon aurait, selon le commissaire de police, « encensé la fameuse marmite… qui doit épurer la société gangrenée et pourrie » ajoutant que « le drapeau tricolore est bon tout au plus à faire des mêches pour les marmites révolutionnaires » (cf. rapport commissaire de police du 11e arrondissement, du 24 janvier 1893).

Puis il se fixa en 1897 à Gap où il tint un débit de boissons. En 1900, avec sa femme et ses deux enfants il s’intallait à Toulon, où, selon la police, bien que continuant à assister à des réunions anarchistes et anticléricales, il « ne prend plus la parole en public » et est « tout à fait assagi ». Toutefois il continuait d’être l’objet de surveillance par la police qui signalait sa disparition de Toulon le 7 mai 1901, puis sa réapparition à Nîmes le 9 où il vendait des couteaux sur les marchés de la région. Le 25 février 1907, grâce à l’appui du député socialiste et ancien anarchiste Ferrero, Ernest Nahon fut radié de l’état vert n° IV.


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