Dictionnaire international des militants anarchistes
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“LE MAGUET, Claude, TRIVAUX, PREVEL, BEHIER, MALAISE” [SALIVES, Jean dit]
Né le 27 avril 1887 à Albas (Lot) - mort le 14 juillet 1979 - Typographe ; correcteur - Paris – Aiglemont (Adennes) – Lens (Pas-de-Calais) - Lausanne & Genève
Article mis en ligne le 27 mars 2008
dernière modification le 7 septembre 2023

par R.D.

Fils d’un receveur des contributions indirectes établi à Paris en 1888, Jean Salives dit Claude Le Maguet fut confié, à l’âge de six ans, à l’orphelinat Prévost à Cempuis (Oise), dirigé par Paul Robin, après le départ de sa mère du domicile conjugal. Il en sortit à seize ans, ayant appris le métier de typographe, marqué par les idées libertaires. À partir de 1903, il travailla d’abord comme apprenti à Paris. Puis, il s’embaucha à l’anarchie où il côtoya Libertad, le jeune Kilbatchiche Victor Serge, Mauricius, Georges Paraf-Javal, André Lorulot, Sébastien Faure. Il rejoignit la petite communauté anarchiste internationale d’Aiglemont, dans les Ardennes, créée Fortuné Henry frère d’Émile. Il y composa des brochures anarchistes. Appelé sous les drapeaux, il déserta après trois semaines passées dans une caserne de Vendée. Ce fut le début d’une longue insoumission et illégalité, d’une vie de vagabond durant laquelle il dut changer de noms, de métiers.

Passé en Belgique, il revint en France à Lens (Pas-de-Calais) où il trouva une place de typographe chez Benoît Broutchoux, d’octobre 1908 à la fin de 1909, et écrivit ses premiers articles dans le Journal du Peuple. Arrêté à Lille lors d’une manifestation en faveur d’un camarade incarcéré, il fut condamné à un mois de prison. Il mena alors une vie errante sous différents pseudonymes : Trivaux, Prevel, Béhier, Malaise. Ayant trouvé un emploi à l’hôtel de ville, il dut l’abandonner à la suite des arrestations consécutives à l’affaire Jules Bonnot. En 1912, il rencontra Marcelle, la cousette qui deviendra la compagne de sa vie. Il passa ensuite en Suisse, travailla comme typographe à Lausanne, puis à Genève. À la déclaration de guerre, il resta fidèle à « l’internationalisme prolétarien » selon sa propre expression.

Claude Le Maguet fit bientôt partie des milieux pacifistes et rencontra Frans Masereel, Henri Guilbeaux, Pierre-Jean. Jouve, René Arcos, Romain Rolland, Birukoff, J. Humbert-Droz. En 1916, peu après la création de la revue « zimmerwaldienne » Demain (Genève, 1916-1919), et sur les conseils de son fondateur Henri Guilbeaux, il fonda, avec F. Masereel, Cécile Noverraz et Albert Ledrappier, la revue les Tablettes (Genève) dont le premier numéro parut en octobre avec un dessin de Masereel. Nées pour dénoncer la guerre, les Tablettes voulaient s’adresser à un public plus large que celui de Demain ; et, à la différence de cette revue, les Tablettes n’adhérèrent jamais aux idées zimmerwaldiennes ni au programme bolchevik. Le Maguet refusa le secrétariat de Demain. Sa revue, marquée d’abord par les idées anarchistes, se rattacha à la philosohie de la non-violence inspirée par Tolstoï qu’il avait lu avant la guerre, notamment "La Loi de violence ou d’amour". En témoigne un beau numéro consacré à Tolstoï en juin 1917, orné d’un bois gravé de Masereel et le texte de Tolstoï « Le patriotisme et la paix » (n°23).

Des textes d’une rare qualité littéraire parurent dans les Tablettes : poèmes de Pierre-Jean Jouve tirés de "la Danse des morts" (1917), de Marcel Martinet tirés des "Temps maudits", de Le Maguet lui-même. Romain Rolland y publia une « Adresse à Gorki » (août 1917) et le jeune Jean de Saint-Prix, dans le même numéro, sa « Lettre aux Suisses », signée Jean-Louis. Les Tablettes cessèrent de paraître en janvier 1919 (numéro 27). « Ce fut la plus libre, la plus noble, la mieux rédigée et la mieux présentée de ces revues protestataires » écrivit M. Martinet en septembre 1919.

Claude Le Maguet collabora également aux journaux suisses, la Voix du Peuple, la Feuille(Genève, 28 août 1917 à 14 août 1920, quotidien puis hebdomadaire) de Jean Debrit (articles non signés jusqu’à la fin de la guerre) et illustré par Masereel et en France aux Cahiers idéalistes, aux Humbles (Roubaix, 1913-1914, puis Paris, 1916-1940) de Maurice Wullens

En 1920, Claude Le Maguet entra comme correcteur à la SDN. En 1939, il fut mis à la retraite pour maladie. Convalescent, il retourna en France, à la déclaration de guerre, ne voulant pas faire figure de réfractaire dans une guerre contre le fascisme. Il fut emprisonné à Lyon, puis à la caserne de Quimper. De retour à Genève, il fut, selon ses propres mots, « happé par la poésie ». Il collabora toutefois à Liberté (Paris, 1958-1971) de Louis Lecoin et aux Cahiers de l’Humanisme libertaire (Paris, 1963-1976) de Gaston Leval.

Le Maguet qui était père d’une fille, est décédé à Genève le 14 juillet 1979.

Oeuvres : Les Anarchistes et le cas de conscience, Paris, Librairie sociale, 1921. — Anthologie des écrivains réfractaires de langue française, Les Humbles, août-octobre 1927. — Un ouvrier de poésie : Claude Le Maguet (Anthologie Vers et proses), La Tour de Feu, n° spécial, cahier 105, mars 1970.


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