Ida Gilman était née dans une famille juive de négociants en étoffe. Etudiante en médecine elle commença à exercer à Kharkov d’où, pour échapper à une commission d’épuration bolchévique, elle gagna Moscou pour y terminer ses études. Elle y fréquenta les milieux anarchistes et, à quelques semaines de l’obtention de son diplôme de docteur en médecine, fut arrêtée par les bolchéviques. Elle parvint à s’échapper, à gagner la Pologne puis en novembre 1925 Paris où, elle s’inscrivit comme étudiante à la Faculté de Lettres. Divorcée de David Tenenbaum, elle deamnda le 4 mai 1926 à la Préfecture de police une autosation à résider deux ans en France pour continuer ses études. Elle demeura de mars à mai 1926 dans un garni du 55 rue Monge (5e arr.) puis 5 rue Véronèse (13e).
Membre du groupe anarchiste polonais et du groupe anarchiste russe de Paris, elle fréquentait assidument les locaux de la Librairie internationale de la rue des Prairies et participait aux activités et réunions du Comité International de défense anarchiste (CIDA). Elle collabora activement au journal Diélo Trouda publié par le groupe d’anarchistes russes et au Libertaire où elle dénonçait la naïveté des délégations ouvrières visitant l’URSS… Jusqu’en 1927 elle fut la secrétaire de Nestor Makhno et celle de la rédaction du journal. Le 20 mars 1927 elle participa à la réunion internationale qui se tint au cinéma Les Roses, rue de Metz, à l’Hay-les-Roses.
Elle rencontra à cette époque Nicolas Lazarevitch dont elle devint la compagne et avec lequel elle participa au projet de Plate forme organisationnelle dite Plate forme d’Archinov, publiée à partir de juin 1926 dans Diélo Trouda et qui sera suivie par une polémique au sein du mouvement libertaire international et la publication en avril 1927 d’une réponse signée par Sobol, Fléchine, Voline, Schwartz, Mollie Steimer, Lia, Roman et Ervantian accusant les auteurs de la plate forme de vouloir bolchéviser l’anarchisme.
Selon un rapport de police, elle fit expédier, à l’été 1927, du siège du Comité Sacco-Vanzetti, 72 rue des Prairies, un cablogramme à la femme de Sacco lui demandant de ne pas envoyer les restes de son mari à Moscou.
Selon le Maitron elle aurait été exclue du groupe anarchiste russe en 1928 pour « pratique religieuse » : à la mort de son père elle avait allumée une bougie selon la coutume juive. Touujours est il qu’en cette année 1928 elle fut expulsée de France avec son compagnon. Tous deux s’installèrent à Liège en Belgique où Ida reprit ses études de médecine tout en continuant à fréquenter les milieux libertaires et où ils rencontrèrent les compagnons espagnols F. Ascaso et B. Durruti lors de leur passage dans ce pays. Elle collaborait également au Libertaire (Paris) où elle célébrait notamment “Le 8 mars, journée internationale de l’ouvrière” (cf. N° du 9 mars 1929).
Au printemps 1931 elle était l’une des animatrices du comité pour la libération de Francesco Ghezzi emprisonné en Russie.
Cette même année 1931, lors de la proclamation de la république le couple partait pour l’Espagne et y assistait à diverses manifestations et émeutes dont Nicolas fera le compte rendu et l’analyse dans La Révolution Prolétarienne(Paris). De retour en Belqique elle travaillait alors dans une firme pharmaceutique. Suite à sa participation à une manifastation contre la guerre à Bruxelles, elle fut poursuivi avec son compagnon et deux militants communistes belges et condamnée le 10 novembre 1934 par le tribunal correctionnel de Bruxelles à 15 jours de prison avec sursis et 420f d’amende. D’autre part elle fut licenciée de son travail. Elle continua ensuite de participer aux campagnes en faveur de F. Ghezzi et Victor Serge emprisonnés en URSS et contre les expulsions d’anarchistes étrangers. Après l’emprisonnement de son compagnon pendant un an, tous deux revenaient en France en 1936.
Ida devint alors la secrétaire du syndicat des employés du gaz de banlieue à la Bourse du travail. Elle collabora à cette époque à la revue La Révolution Prolétarienne dont elle avait été la correspondante en Belgique avec Nicolas. Elle collabora également pendant toute cette période au Libertaire en particulier lors des procès de Moscou où dans le numéro du 28 août 1936 elle publia un article intitulé « Staline extermine la génération d’octobre » où elle écrivait « ce qui se passe en Russie n’est qie l’aboutissement logique d’un régime absolutiste qui règne dans tous les domaines de la vie sociale ». Elle revint sur cette question dans le numéro du 11 septembre sous le titre « Moscou centre de liquidation de la révolution prolétarienne » et l’élargissant aux évènements d’Espagne elle écrivait « …il en résulte que qi la révolution ouvrière ne veut pas périr dans des contradictions internes, su les syndicalistes, anarchistes, membres du POUM et en général les ouvriers ne veulent pas, après la victoire contre les fascistes, être anéantis par les efforts conjugués de la bourgeoisie et des agents de Staline en Espagne, ils doivent dès à présent comprendre qu’ils ont en face d’eux les Franco et De Llano, ennemis avérés, mais aussi des Hernandez et des Passionaria, ennemis non moins redoutables pour la cause ouvrière ».
Le 8 juin 1940 elle fut arrêtée avec son fils Marc âgé de 8 ans et internée au camp de Rieucros (Lozère) tandis que Nicolas était interné au camp du Vernet. Libérée en avril 1941 elle se réfugiait avec les siens en zone « libre » d’abord à Marseille puis en janvier 1942 à La Garde-Freinet puis à Draguignan (Var) jusqu’en 1946 où toute la famille regagna Paris. En 1948 elle publia la brochure « La Commune de Kronstadt, crépuscule sanglant des soviets » qui avait été rédigée avant guerre.
De 1948 à 1951 elle travailla comme médecin dans un préventorium d’enfants juifs à Brunoy tandis que son compagnon reprenait son métier de correcteur. Puis elle travailla comme traductrice technique pour l’industrie chimique, publia plusieurs ouvrages sur la médecine et l’école en URSS et de nombreux articles dans la revue Est et Ouest. Elle réécrira également des souvenirs sur Makhno –écrits perdus pendant la guerre- où elle le lavera de toute accusation d’antisémitisme dont il avait été l’objet.
Ida Lazarevitch est décédée à Paris le 27 juin 1973. Ses archives ont été déposées par son fils Marc à l’Institut international d’histoire sociale d’Amsterdam.
Œuvres : — La Commune de Cronstadt, crépuscule sanglant des soviets (Ed. Spartacus, 1948 & 1977) ; — La médecine en URSS (Ed. Les Iles d’or, 1953) ; — L’École soviétique, enseignement primaire et secondaire (Ed. Les Iles d’or, 1954, en collaboration avec son compagnon) ; — Le paysan russe dans la révolution et la post révolution (Spartacus, 1968) ; — Souvenirs sur Nestor Makhno (Ed. Allia, 1983).