Souvent prénommé Camille dans différents documents, Cormille Geerooms (ou Gérooms) dit G. Rome, domicilié 295 rue de Normandie, était membre au début des années 1900 du groupe libertaire du Havre. Assez bon orateur il avait une certaine influence sur ses camarades.
Avant de venir s’installer au Havre en 1905, Cormillle Geeroms, militait au sein du syndicat des métallurgistes de Lille et était connu par les agents de police pour son « exaltation » lors des réunions syndicales. En mai 1900, il avait été candidat sur la liste du Parti Ouvrier aux élections municipales de La Madeleine (Nord), dont le tête de liste était Henri Hochedez. En 1902, il publia à Lille une brochure intitulée Bibliothèque syndicale. L’œuvre syndicale, dialogue. Henri et Jean. Brochure de propagande, éditée par la Fédération locale des syndicats de Lille.
Ce militant était marié et avait trois enfants. Son aîné, âgé de quinze ans en 1905, fut embauché avec lui comme ouvrier mouleur à l’usine Westinghouse du Havre.
Inscrit au Carnet B, Geeroms faisait l’objet d’une étroite surveillance dès son arrivée au Havre.
n 1906, il fut, avec son syndicat des mouleurs, dont il était le secrétaire, à l’origine du journal Vérités. Il y signait ses articles G. Rome et y tenait régulièrement des propos antiparlementaires, antimilitaristes et néo-malthusianistes. Ce fut l’un des principaux rédacteurs du journal, de 1906 à 1912. Correspondant de La Vie Ouvrière de Monatte, il écrivait de même des articles pour La Bataille Syndicaliste. Tout comme Adrien Briollet, Geeroms appartenait au groupe libertaire du Havre en 1908.
Responsable de la Fédération Régionale des Syndicats de Normandie de 1907 à 1909 et élu secrétaire de l’Union des Syndicats du Havre et de la Région à la fin de l’année 1910 jusqu’en janvier 1912, c’est lui qui, par conséquent, prit en charge, au titre de secrétaire de l’U.S.H., l’affaire Jules Durand.
Il assista comme délégué au XVIe congrès national corporatif — 10e de la CGT — et à la 3e conférence des Bourses du Travail tenus à Marseille du 5 au 12 octobre 1908. Il y représentait le syndicat des charpentiers du Havre et divers autres syndicats de cette ville. Il assista également au XVIIe congrès, Toulouse octobre 1910 — il s’y prononça pour les Fédérations d’industrie, cf. p. 122 — et au XVIIIe congrès, Le Havre septembre 1912, où il représentait divers syndicats du Havre.
En outre, Geeroms fut à la tête de la grande grève des mouleurs qui dura de novembre 1909 à février 1910 au sein de l’entreprise Westinghouse, au Havre. Il représenta, par ailleurs, de nombreux syndicats havrais lors des congrès confédéraux de la C.G.T. de 1908 à 1912. Geeroms était permanent appointé par l’U.S.H. à la fin de l’année 1910 et en 1911, période où l’Union Locale dépassait les 10 000 adhérents
Le 9 février 1910 il fut condamné à 1 mois de prison pour « entrave à la liberté du travail ».
Le 16 février 1911, lors d’un meeting présidé par Jules Durand, il avait notamment déclaré : « Le sabotage intelligent ne consiste pas à détruire les machines… Notre sabotage consiste à dire : J’ai des bras et de l’intelligence, il faut donc conserver ses forces et faire moins de travail. Ce sabotage est plus dangereux que l’autre, on peut le pratiquer au grand jour. En mai 1911 il avait de nouveau incité les cheminots à avoir recours au sabotage si les syndicats n’étaient pas écoutés.
Le 14 janvier 1912, se tint le Congrès régional, sous les auspices de l’Union des Syndicats du Havre et de la Région, et la gestion financière de l’Union y est une nouvelle fois décriée. Effectivement, de l’argent manquait dans la caisse. Seuls 27 délégués, représentant les diverses organisations syndicales de l’Union, assistaient à ce congrès auquel nul étranger n’était admis. C’est lors de ce congrès qu’un blâme fut infligé à Geeroms pour la gestion financière de l’Union par 14 voix contre 13. Il était indiqué au procès-verbal que ce blâme ne « saurait en aucune façon porter atteinte à l’honneur de Geeroms dont la probité n’(était) nullement suspectée ». En réalité, ce blâme affecta moralement Geeroms. Suite à ce vote émis, Geeroms ne se représenta pas au poste de secrétaire de l’Union des Syndicats du Havre et de la Région, et fut remplacé par Henri Vallin. Geeroms préféra alors s’occuper à temps complet, en qualité de secrétaire, et ce, dès février 1912, du dispensaire de l’Union dont il était à l’origine, avec le Docteur Houdeville.
Nous savons que Geeroms participa néanmoins au Congrès confédéral de la CGT au Havre du 16 au 23 septembre 1912 en tant que représentant des mouleurs. Il fit visiter aux congressistes le dispensaire syndical rue Rollon.
Or, très vite, certains responsables syndicaux proférèrent à nouveau de vives critiques à son égard et contestèrent la façon dont il gérait le dispensaire. Une nouvelle fois attaqué, Geeroms démissionna et rompit tout lien avec le syndicalisme havrais. Quelque temps après, Geeroms abandonna sa fonction de mouleur pour devenir représentant en produits pharmaceutiques et faire la publicité de divers produits. Il finit même par renier ouvertement ses anciennes théories révolutionnaires, ce qui amena les autorités, d’une part, à se féliciter de ce revirement de situation et, d’autre part, à le radier du Carnet B en 1914 : « Sa radiation paraît donc s’imposer en raison de son retour à la sagesse ». Geeroms fut, en vérité, victime de ce que Monatte nommait « L’usure militante » et ne fit plus parler de lui après la Première Guerre mondiale.
Cormille Geeroms s’était marié le 21 septembre 1892 à, Laure Flement à La Madeline (Nord), puis, après le décès de cette dernière le 3 juillet 1911, s’était remarié au Havre le 30 avril 1913 avec Marie Charlotte Dergarceaux (Notes de Jean Luc Dron)