Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

MARIE, François, Auguste

Né le 5 décembre 1879 à Oulnes (Vendée) — mort fin janvier ou début février 1938 — typographe — FRC (?) — CGT — Paris
Article mis en ligne le 11 avril 2016
dernière modification le 8 août 2024

par Guillaume Davranche, ps

François Marie fit sa première apparition sur la scène militante comme gérant de La Revue communiste, un périodique de tendance « milieux libres » édité par Émile Tissier et Eugène Merle de décembre 1903 à avril 1904.

De 1906 à 1914, il fut un des responsables syndicalistes parisiens les plus ouvertement liés au mouvement anarchiste. Sa signature apparaissait fréquemment au bas de ses manifestes et à la tribune de ses meetings.

Dans la nécrologie que lui consacra René de Marmande en 1938 dans Syndicats, il l’évoquait comme « un gars souple et nonchalant, dégingandé et gouailleur, venu de Vendée ».

En avril- mai1906, François Marie anima la grève de l’imprimerie Crété à Corbeil et participa très activement à la manifestation du 1er mai, ce qui lui valut d’être condamné le 2 mai à 4 mois de prison pour « port d’arme prohibée ». Puis, pour concurrencer la très réformiste Fédération du Livre, il impulsa la petite Fédération des presses typographiques, de tendance révolutionnaire. Il en fut le secrétaire et l’unique représentant au congrès CGT d’Amiens du 8 au 16 octobre 1906. Il y signa la motion que l’histoire retiendra sous le nom de Charte d’Amiens (voir Émile Pouget).

Certaines sources indiquent par erreur qu’il fut signataire de l’« affiche rouge » de l’AIA (voir Roger Sadrin) ou de l’affiche « Aux soldats » (voir Eugène Mouchebœuf).

À l’été 1908, François Marie était régisseur de l’imprimerie confédérale de la CGT, impasse de la Grange-aux-Belles. Suite aux événements sanglants de Villeneuve-Saint-Georges, il fut arrêté le 1er août 1908 en même temps que cinq autres responsables confédéraux. Il ne put donc assister au congrès confédéral CGT de Marseille, où la Fédération des presses typographiques fut représentée par Charles Grauvogel qui annonça la volonté de la fédération de fusionner au sein du Livre.
Comme les autres dirigeants de la CGT incarcérés, François Marie bénéficia d’un non-lieu le 30 octobre 1908 et fut libéré.

Début 1909, dans “Ces Messieurs de la CGT”, les journalistes Leclercq et Girod de Fléaux lui trouvaient « un tempérament de partisan ; fait pour suivre un chef après s’être donné à lui corps et âme, décidé à aller à sa suite n’importe où […] » et résumaient : « Derrière Pouget, Griffuelhes et Yvetot, il marche en confiance. » Ils le décrivaient ainsi : « vêtements débraillés, sa large lavallière noire en bataille, son feutre cabossé en arrière, les bras tombant le long de son ample pantalon de velours, l’air insolent ». Eux aussi le trouvèrent « crâneur, gouailleur et gamin ».

En 1909, il prit la parole dans plusieurs meetings de la Fédération révolutionnaire (voir Lucien Belin). À l’époque il donnait volontiers interviews et articles à La Guerre sociale. À l’automne, il donna un article au périodique Les Révoltés de Georges Durupt et était membre, semble-t-il de la rédaction de Terre libre de Janvion.

Lors d’une réunion de la Jeunesse syndicaliste tenue le 11 mars 1909, rue de Bretagne, il avait notamment déclaré que l’ouvrier n’avait aucun intérêt à défendre la patrie en cas de guerre, car il était surtout incorporé pour la défense du capital et il avait invité les jeunes gens à « bien s’imprégner de ces renseignements et de suivre, le cas échéant, l’exemple des soldats du 17e de Ligne ». Le 28 avril suivant, lors d’un meeting du Comité de Défense sociale, il avait de nouveau invité les assistants à propager les théories antimilitaristes.

Au printemps 1910, il fut membre du Comité révolutionnaire antiparlementaire (voir Jules Grandjouan) et participa à la campagne abstentionniste. Il figura ensuite au conseil d’administrateur de l’imprimerie communiste L’Espérance, fondée le 25 juin 1910 (voir Eugène Martin).

Le 25 mars 1910 lors d’un meeting de la Fédération du Livre à la Bourse du travail, il avait dénoncé l’intervention de la police lors des grèves et avait préconisé de répondre à la violence par la violence car « Le gouvernement emploie l’action directe en envoyant des soldats et des flics contre les ouvriers »
.
La Fédération des presses typographiques ayant fusionné au sein du Livre, François Marie appartint à sa 21e section, fer de lance de la minorité révolutionnaire. En juillet 1910, il fut délégué au congrès fédéral du Livre, à Bordeaux et, avec Sergent, fut le principal porte-parole de la minorité.

En octobre 1910, au congrès CGT de Toulouse, il affirma, contre le dirigeant réformiste du Livre, Liochon, que la fédération du Livre était antimilitariste (cf. compte rendu, pp. 193-195).

Le 11 janvier 1911, il succéda à Jean-Louis Thuillier au secrétariat de l’Union des syndicats de la Seine où il eut Savoie pour adjoint. C’est de là qu’il prit part à la campagne pour Émile Rousset, et organisa la journée du 1er mai 1911 à Paris.
Le 7 janvier 1911, lors de la grève des typographes, il avait participé à un meeting à Montluçon où il s’était élevé contre les bagnes militaires et avait qualifié de « héros » les soldats envoyés en compagnies de discipline.

À partir d’avril 1911, il fut un des principaux rédacteurs de La Bataille syndicaliste dont il avait été l’un des fondateurs.

Un rapport de police de 1911 le considère comme membre de la Fédération révolutionnaire communiste mais sa présence n’est mentionnée dans aucune réunion de l’organisation.

En août 1911, au moment de la crise d’Agadir, il représenta la CGT, avec Georges Dumoulin, dans des meetings internationalistes à Madrid et à Barcelone. Le 29 août, lors d’une réunion des charpentiers à la Bourse du travail de Paris, il avait déclaré que « si la guerre était déclarée, il faudrait que les prolétaires répondent à l’ordre de mobilisation par la grève générale et l’insurrection à main armée »
.
Début 1912, il quitta le secrétariat de l’Union des syndicats de la Seine et, sous le nom de Baubriand (ou Baubriaud), devint gérant d’une imprimerie-papeterie à Ablon (Seine-et-Oise). Il resta cependant très lié au mouvement syndical, continuant de prendre la parole dans les meetings et écrivant dans La Bataille syndicaliste.

De mars à mai 1912, il appartint au Comité antiparlementaire révolutionnaire — impulsé par la FRC — qui mena une campagne abstentionniste à l’occasion des élections municipales de mai (voir Henry Combes).

En juin 1912, il fit partie de la quarantaine de personnalités communistes libertaires et syndicalistes révolutionnaires qui constituaient le comité de L’Entr’aide, une caisse de solidarité avec les militants emprisonnés et leurs familles, impulsée par la FCA en juin 1912 (voir Édouard Lacourte).

En 1914, il était rédacteur en chef de La Bataille syndicaliste quand la guerre éclata. Mobilisé, il appartint au service auxiliaire et fut pendant trois semaines secrétaire d’un service de renseignements à l’École militaire. Il retrouva ensuite son poste de rédacteur en chef — « embusqué » selon Raymond Péricat — à La BS. À ce moment, il se disait toujours « anarchiste » bien qu’il appliquât strictement la ligne confédérale majoritaire d’union sacrée. Après la liquidation de La Bataille syndicaliste, il fut gérant de La Bataille qui lui succéda du 5 octobre 1915 au 31 décembre 1920 (1873 numéros).

Après-guerre, il semble s’être rapproché des syndicalistes révolutionnaires dits « purs », suivant sans doute en cela Victor Griffuelhes. Est-ce le même Marie qui signa en février 1921 le « Pacte » (voir Pierre Besnard) ? Cela reviendrait à une évolution spectaculaire.

De février 1921 à mars 1938, il fut directeur de l’hebdomadaire La Bataille économique, sociale, ouvrière, paysanne. Il y rédigea une nécrologie de Victor Griffuelhes dans le numéro du 6 juillet 1922. Il fut le directeur de La bataille syndicaliste et sociale (Paris, 1921-1922, 1922-1925) qui en 1925 était l’organe de l’Union fédérative des syndicats autonomes et France et des minorités syndicalistes adhérentes aux deux CGT.

François Marie est décédé fin janvier ou début février 1938.


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