Dictionnaire international des militants anarchistes
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PLANCHE, Fernand, Claude
Né à Saint-Rémy-sur-Durolle (Puy-de-Dôme) le 12 février 1900 – mort le 20 avril 1974 - Ouvrier polisseur ; représentant en coutellerie - UA – AFA – FAF - FA – Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine)– Paris 3 – Nouméa (Nouvelle-Calédonie)
Article mis en ligne le 24 janvier 2009
dernière modification le 20 avril 2024

par R.D.
(bois gravé de J. Lébedeff)

Orphelin très tôt de père, puis de mère, Fernand Planche fut recueilli par ses grands parents. Après avoir travailé comme apprenti coupeur, il fut placé, à sa demande, par son grand-père comme apprenti polisseur au salaire de 5 francs par semaine, un travai particulièrement pénible consistant à polir des cristaux sur des meules installées sur la Durolle, petite rivière pasant par Thiers. Après la mort de ses grands parents, il quitta à l’âge de 19 ans l’Auvergne pour Paris, puis effectua son service militaire à Dijon puis en Allemagne occupée comme mécanicien dans l’aviation.

A son retour en région parisienne, il commença à travailler comme coutelier et se mit à fréquenter les milieux libertaires. Il assista au 3e congrès tenu par l’Union anarchiste (UA) à la Maison du peuple de Levallois les 2-4 décembre 1922 (voir Haussard) et commença l’année suivante à collaborer à la série quotidienne du Libertaire pour lequel il avait souscit à l’emprunt.

En juin 1923, suie à ses absences répétées au Comité d’nitiative de l’UA, avec Content où tous deux représentaient la Fédération de la Somme, ils avaient été remplacés par Saintomer et Meunier.

Lors des élections législatives du printemps 1924, il fut candidat abstentionniste sur la liste libertaire dans la 4e circonscription de Saint-Denis et Sceaux. Opposé à la ligne plateformiste suivie par l’UA et partisan de la synthèse anarchiste, il participa ensuite à l’Association des Fédéralistes anarchistes (AFA) créée le 8 janvier 1928 et collabora à son organe La Voix Libertaire (Limoges, 1929-1939). Dans le numéro du 18 mars 1933, il plaida en faveur de « la maison anarchiste » qui devait être construite à Paris par l’intermédiaire d’une coopérative d’achat devant fournir l’argent nécessaire à l’acquisition du terrain et la construction de la maison. Il résidait à cette époque 42 rue de Meudon à Boulogne-Billancourt avec sa compagne Laure et vendait dans une sorte de bazar tous les instruments coupants et aussi les appareils les plus divers, étant aussi réparateur et rémouleur.

Les 20-21 mai 1934 il assista au congrès de l’Union anarchiste communiste, dit congrès de l’unité, mais refusa d’intégrer la commission administrative et même d’adhérer à la nouvelle union anarchiste “ne croyant pas à la sincérité de l’unité anarchiste”. Il fonda alors le Groupe de la synthèse anarchiste de Boulogne-sur-Seine, qui compta une quinzaine d’adhérents, se réunissait chaque mardi à la salle de conférences de la mairie de Boulogne et organisa en 1934 et 1935 deux soirées ai profit du comité de l’Ent’raide. Puis, avec Bidault, Thillon, P.V. Berthier, Rhillon, Louis Dorlet et Nadaud il participa au congrès de l’organe La Conquête du pain (Boulogne-Billancourt, 45 numéros du 13 octobre 1934 au 13 décembre 1935), ouvert à toutes les tendances de l’anarchisme, dont il fut l’administrateur et l’un des rédacteurs et dont Bidault était le gérant.

En avril 1936 il fut de nouveau candidat abstentionniste dans le IIIe arrondissement à l’occasion des élections législatives.

A son retour de Barcelone où il s’était rendu fin juillet 1936 et reprochant toujours à l’UA ses tendances au centralisme, il participait, avec entre autres Roger Lepoil, Marius Ricros, Laurent, Voline, Prudhommeaux et Remy Dugne, à la fondation de la Fédération anarchiste de langue française (FAF) lors d’un congrès tenu à Toulouse les 15-16 août 1936 et devint en octobre le secrétaire de la Commission administrative de cette organisation et rédacteur de son organe Terre libre (Paris-Nîmes, 1934-1939) dont il sera l’administrateur de mars à août 1937. Les autres membres de la Commission administrative étaient Émile Babouot (trésorier), Moissan (trésorier adjoint), Andres, Perron, Sanzy, Baudon, Rieros, Prospero, Henri, Hertmann et Laurent. A la fin 1936 il demeurait 42 rue de Meudon à Billancourt.

En 1939 il fut arrêté et inculpé de « complicité de désertion » pour avoir rédigé un mot de recommandation à un déserteur. Interné préventivement à la prison de la Santé, il écrivait régulièrement à P.V. Berthier qui raconta plus tard dans le journal Espoir : « …dans mon courrier, presque chaque matin, je trouve la lettre qui vient de la rue de la Santé, à Paris. Les missives sont parfois assez moroses. L’hiver est venu : l’hiver 1939-1940 est un des plus féroces qu’on ait vu de mémoire d’homme ; ce n’est partout que neige et glace. Planche est dans une cellule non chauffée. En des lettres écrites d’une main que le froid a fait trembler, au point que j’ai peine à en déchiffrer certains passages, il me confie sa misère : « je suis obligé d’arpentert le local de long en large, et il n’est ni très long, ni très large, en me battant les flancs et en tapant la semelle pour me remuer le sang ». Au début de sa détention il était à la 8e Division, cellule 34, et à la fin de celle-ci à la 3e Division, cellule 98. C’est de sa cellule qu’il écrivit au ministre de la Justice pour réclamer l’inculpation di Préfet de police, arguant que « sa lettre de recommandation n’avait été que d’un faible secours à X… pour déserter, alors que le passeport délivré par la Préfecture de police lui avait été d’une bien plus grande utilité ».

Libéré au bout de onze mois, il fut immédiatement « interné administratif » au camp de Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise) où le gouvernement de Daladier faisait interner « les gens susceptibles de nuire à la Défense Nationale ». Après l’évacuation du camp le 10 mai 1940, vers le sud de la France, au moment de la débacle, et profitant d’un bombardement lors du passage de la Loire à Meung, il parvint à s’échapper et, à l’aide d’une bicyclette volée, parcourut 120 km et gagna Issoudun où il se réfugia chez le compagnon P.V. Berthier où il était arrivé le 18 juin « couverte de poussière et de poux »… Puis, après avoir obtenu de la Mairie une attestation spécifiant que les communications étaient coupées avec le sud, et toujours à bicyclette, il regagna Paris avant la fermeture de la ligne de démarcation et y retrouva sa compagne. Son dossier pour aide à désertion étant rouvert, pour échapper à une nouvelle incarcération, il souscrivit un engagement d’un an comme travailleur volontaire en Allemagne et partit pour Berlin. Pendant ce séjour il était condamné par le tribunal correctionnel à 6 mois de prison (couverts par sa détention à la Santé) pour « provocation à l’insoumission ».

A son retour en France et suite à un bombardement où son domicile de Billancourt avait été touché, il était relogé dans le 3e arrondissement de Paris, 11 Cité Dupetit-Thouars où son logement allait bientôt servir de lieu de réunion et de planque pour de nombreux camarades : « Providence des militants d’extrême gauche, des clandestins et des illégaux, F. Planche vivait en étage dans un intérieur si sombre que les lampes devaient y brûler tout le jour… Comme il avait accoutumé à discuter fort avant dans la nuit avec les camarades qui défilaient à son domicile, lui et sa compagne se levaient à 11 heures… et se couchaient à l’heure où beaucoup se lèvent… A chaque repas, des pique assiettes s’invitaient d’autorité » (cf. P.V. Berthier in « Plume d’oie »).

Après la guerre Planche travailla alors comme représentant en coutellerie et participa à la reconstruction de la Fédération anarchiste (FA). Il collabora au Libertaire parfois sous la signature de Fernand Granier, à L’Unique (Prléans, 1945-1956) d’E. Armand et à Pensée et Action (Bruxelles, 1945-1952) de Hem Day. Puis il écrivit plusieurs ouvrages biographiques publiés chez SLIM (voir bibliographie), fit rééditer « L’unique et sa propriété » de Stirner dont il écrivit l’avant-propos et aida le groupe les Amis de Voline à publier « La Révolution inconnue ». Il résidait toujours à cette époque dans son appartement du 3e arrondissement : « dans un troisième étage invraisemblablement bourré de livres dont certaines piles s’élevaient jusqu’au plafond, tandis que la Géographie universelle d’Élisée Reclus occupait avec ses vingt et quelques tomes, tout le dessus du buffert de la salle à manger. Il était demeuré le même : la prison, la persécution, l’exil, l’avaient laissé tel. En revanche Laure avait moins bien supporté les rigueurs de la guerre » (cf. P.V. Berthier).

En 1950 il partait avec sa compagne pour la Nouvelle-Calédonie dans l’intention de monter une petite briquetterie qui se solda très vite par un échec, la nature du sable destiné à la fabrique des briques ne correspondant pas à la machine qu’il avait amenée avec lui. Sa compagne, Laure, très éprouvée par la guerre, ne tarda pas à être internée à l’hôpital psychiatrique de l’île Nou où elle décédera. Fernand Planche reprit alors son métier de rémouleur et horloger à Nouméa d’où il collabora au journal de Lecoin et Louvet Défense de l’Homme. Il publia également pendant trois ans un petit journal ronéoté, La Raison (Nouméa, 39 numéros de février 1954 à mars 1957) sous-titré « Organe de l’association des Libres penseurs de Nouvelle Calédinie et dépendances » et donna également à la radio plusieurs causeries sur Louise Michel, la Commune et l’anarchisme.

Puis il tenta de pratiquer l’élevage au sud de l’île, mais, semble-t-il, suite à des démélés avec les Kanaques de l’île Ouen, il dut revendre l’exploitation à perte. Il se livra alors à la pêche des coquillages qu’il vendait pour subsister puis trouva un emploi de veilleur de nuit. Jusqu’à son décès, il envoyait chaque année au compagnon hongrois François Szücs, à Budapest, un sachet de coquillages espérant qu’il pourrait en tirer quelques sous.

Fernand Planche est mort à Nouméa le 19 avril 1974.

Œuvres : - Durolle (Ed. SLIM, 1948, 216 p.) ; - La vie ardente et intrépide de Louise Michel (Ed. SLIM, 1946, 250 p.) ; - Kropotkine (en collaboration avec Jean Delphy et bois gravé de J. Lebedeff, Ed. SLIM, 1948, 200 p.) ; - Préface d’une réédition de L’unique et sa propriété de M. Stirner.

La Conquete du pain présentation et collection (Archives Autonomie)