Dictionnaire international des militants anarchistes
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DOUCE, Joseph, Constant
Né en 1843 à Reims - Marchand de faïence - Reims (Marne) - Guyane
Article mis en ligne le 30 septembre 2012
dernière modification le 14 septembre 2023

par Dominique Petit, R.D.

Joseph Douce, qui travaillait au début des années 1880 comme garçon dans une buvette, participait aux réunions socialistes révolutionnaires. Durant les grèves de 1880 à Reims, Douce s’était signalé par son ardeur à pousser les ouvriers à se débarrasser des patrons en les tuant. Orateur des réunions publiques, il invitait les travailleurs « à courir sus contre l’éternel ennemi du prolétaire, le bourgeois, l’infâme bourgeois, capitaliste, propriétaire et jouisseur ».
Il fut condamné pour provocation à des rassemblements armés.

Après le congrès ouvrier de Reims (30 octobre – 6 novembre 1881), il se créa sur la ville un cercle anarchiste, dont Douce aurait été à l’initiative. Ce groupe d’hommes résolus, issus du Parti Ouvrier dont il ne s’était pas encore clairement séparé, aurait été composé de Melin, Beaudelot, Maillot, Lachenay, Brot, Faille, Thévenin et Douce. Le groupe avait prévu de « faire l’affaire » de « Bidel », le directeur de l’usine Pierrard qui il y a deux ans avait remis leur livret à plusieurs ouvriers qui faisaient de la propagande socialiste dans ses ateliers. A la suite de ces renvois, il reçut plusieurs lettres de menaces où il était dit « qu’on lui ferait son affaire » sur le trajet de l’usine à son domicile. Le directeur communiqua ces lettres anonymes au commissaire central et une surveillance fut organisée durant quelques jours mais rien ne se passa.
Après tirage au sort, Douce avait été désigné pour agir contre « Bidel » mais à la veille de faire le coup, Faille eut peur et réussit à convaincre le groupe de renoncer au projet. Douce resta seul partisan de l’action mais se refusa à agir en solitaire.

Le 2 décembre 1882, une conférence fut organisée à Reims avec le concours de Paule Minck, après la réunion, les organisateurs et l’oratrice se rendirent dans une maison de tolérance où travaillaient Douce et sa femme, comme domestiques. Elle y rencontra Pedron, l’animateur du Parti Ouvrier sur Reims, la conversation se poursuivit de 1h à 3h du matin. Après quelques flûtes de Champagne Paule Minck s’endormit sur un canapé.
Le lendemain déjeunant avec Douce, elle luit fit le reproche de l’avoir conduite dans cet endroit, expliquant que si cette visite était connue de la presse cela lui causerait le plus grand tort. Cette brouille entraîna ensuite une polémique par courriers entre les rémois et Paule Minck à propos de questions financières.

Il fit partie du groupe anarchiste Les résolus fondé en août 1884 à Reims autour notamment de Leprêtre et de Faucher à la suite d’une scission survenue dans le Parti ouvrier (POF). C’est à son domicile que se réunissait parfois le groupe. Au printemps 1885 il fut soupçonné d’être l’auteur d’un vol de dynamite à Germaine, qu’il aurait ensuite enterrée dans son jardin, ce qui lui valut d’être l’objet d’une perquisition qui ne donna aucun résultat.

Douce et sa femme purent acheter une maisonnette, 7 rue de la Briqueterie et s’y établir comme marchands faïenciers. Pendant qu’il colportait de la vaisselle à la campagne, sa femme parcourait les rues de Reims avec un petite voiture à bras, contenant de la poterie.

Le 23 mai 1888, à l’occasion d’un accident de circulation, Mme Douce fut blessée par M. Renard, président du tribunal civil.
Apprenant l’accident Douce s’emporta : « Ah ! Criait-t-il. Ils écrasent les femmes du peuple ! Eh bien ! Je vais faire un exemple… Je vais tuer un bourgeois ! ». Douce prit son revolver et se rendit chez M. Renard, qui refusa de le recevoir, il sortit dans la rue et se posta à un carrefour : « Rien ne m’empêchera aujourd’hui de tuer un bourgeois ! Il me faut la peau d’un bourgeois ! ». Il vit arriver dans une calèche, M. Paul Delens, négociant en vins. Douce se dirigea vers la voiture et tira deux coups de revolver sur M. Delens qui fut atteint d’une balle au front. Douce jeta son arme dans un fossé et s’écria : « Enfin, j’ai fait ce que je voulais depuis si longtemps. J’ai tué un bourgeois ! ». Mais la balle, amortie par l’épaisseur du chapeau avait glissé sur l’arcade sourcilière, la blessure put se guérir rapidement.

Le 24 juillet 1888, Douce comparut devant la cours d’assises de la Marne. Lors de son réquisitoire le procureur fut interrompu par des cris de « Crève de faim ! » poussés dans le fond de la salle, le président fit expulser l’anarchiste qui les avait proférés.
Le jury accorda des circonstances atténuantes à Douce mais le condamna à 12 ans de travaux forcés pour "tentative de meurtre“…
Douce fut envoyé en Guyane dont il s’évada en 1890.

Au printemps 1894, selon la police, les compagnons Bandler et Lequet auraient eu l’intention de demander à la femme de Douce l’autorisation de creuser dans le jardin pour y retrouver la dynamite volée à Germaine par son mari, mais doutaient que cette dernière les y autorise.


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