Ancien camelot devenu ébéniste, Louis Jacques Tournadre dit Marius aurait participé au début des années 1880 à la fondation du groupe Les Egaux troyens. Au milieu des années 1880, la police signalait qu’il hébergeait à Troyes les compagnons venant de Reims où il avait auparavant milité. Puis il aurait quitté l’Aube et réapparaissait à Clermont-Ferrand où en 1886 il rédigeait et envoyait à la préfecture les statuts de la société Les Egaux clermontois, qui serait le premier groupe anarchiste créé dans le Puy-de-Dôme. Il travaillait alors comme rhabilleur de billards, avenue Charras.
Fin octobre 1886, il était signalé dans l’arrondissement d’Issoire-bassin minier de Brissac — où, selon le préfet, il faisait partie d’un groupe d’agitateurs anarchistes sillonnant la région « pour soulever le bassin minier ». Le 25 octobre, suite à une rixe à Saint-Flour, il était inculpé d’« outrage à la gendarmerie », ce qui constituait le début d’une longue série d’inculpations.
En 1890 il avait participé avec Rozier et Lamarre à la fondation de la Fédération des jeunesses révolutionnaire-socialiste qui ne tarda pas à passer à l’anarchisme notamment sous l’influence d’un groupe de militantes partisanes de l’amour libre, dont Eliska Coquus dite Bruguière.
A cette époque il était un proche du compagnon Henry Dupont Souvarine (voir ce nom).
Au début des années 1890 il aurait été le gérant d’un journal, La Lutte (non retrouvé) et début juin 1891, Tournadre, que Le Père Peinard qualifiait de « possibiliste », fut jugé avec Louis Vivier dit Pas d’erreur, pour « provocation à la désobéissance » et acquitté tandis que Vivier était condamné à 3 mois de prison. Il demeurait alors rue Ramey à Paris. En juin 1892, la gendarmerie signalait qu’il était dans les auberges du canton de Latour (Issoire) où il « glorifiait Ravachol » et se présentait « comme son disciple ».
A la mi août 1892 il était signalé au Havre où il était hébergé par le compagnon Goubot. Selon la police il aurait été l’auteur de la lettre du « Père peinard au compagnon souverain pontife » parue dans le journal L’Eclair du 9 août.
L’année suivante il fut candidat socialiste révolutionnaire à Thiers lors des élections législatives ; le 21 août, lors du scrutin, il tenta de se saisir d’une urne et de disperser les bulletins au cri de « Vive la Révolution ». A l’été 1894, de passage à Epernay, il fut l’objet d’un procès-verbal pour « filouterie d’aliments » (il avait déjeuné sans payer dans un hôtel) et pour « contravention à la police des chemins de fer » (il voyageait sans billet).
A :l’été 1894 Le Courrier de la Creuse où il était de passage le décrivait comme « un grand pauvre diable, assez proprement vêtu, le dos vouté, à barbe rougeâtre et au faciès méphistophélique ».
Il fut de nouveau candidat à Thiers lors des élections de 1895, et, selon la police, organisa « des conférences sauvages » et semait « Le désordre ».
Il y a vraisemblablement identité avec Marius Tournade qui, en 1892, résidait à Paris, 52 rue Ramey, et avait été condamné, suite à un article paru dans La Lutte, par défaut à 6 mois de prison pour diffamation envers l’administrateur du bureau de bienfaisance du XVIIIe arrondissement. Tournade avait fait opposition à ce jugement et avait confié sa défense à Eliska Coquus dite Bruguière qui ne put intervenir à l’audience, l’opposition ayant été rejetée au prétexte que Tournade n’avait pas respecté les formes requises.
En mai 1893, Tournade avait servi de secrétaire à Achille Le Roy, habillé en insurgé bolivien, lors de sa candidature à l’Académie française. Avec ce dernier et Maxime Lisbonne tous deux anciens communards et candidats, il avait déposé chez chaque académicien défavorable à ces candidatures une marmite en fer ressemblant à une bombe accompagnée de leurs cartes de visite et de leurs candidatures. Début janvier 1894, il avait été arrêté lors des rafles anti anarchistes et était accusé par la police d’être un un escroc spécialiste de
« l’estampage ». Le 10 février 1894 il avait été acquitté lors d’un procès pour diffamation envers un député. Arrêté le 3 mars 1894 il fut poursuivi pour « association de malfaiteurs » avant d’être remis en liberté provisoire le 3 avril suivant. Le 24 juillet 1894 il fut de nouveau arrêté à Paris pour avoir frappé le 22 mai à Tarbes un député socialiste.
En 1896, il était représentant de commerce d’une droguerie pour les quartiers de La Villette, Montmartre et Belleville. Il était toujours l’objet de surveillance au début des années 1900.