Fils de Louis Valero, né en 1910 en Algérie, ouvrier, et de Marceline Rodriguez, née en 1917 en Espagne, ouvrière, Georges Valero a vécu son enfance à Villeurbanne, banlieue ouvrière de Lyon, à l’exception d’un long séjour à Dieulefit à la suite d’une primo-infection tuberculeuse.
Après un BEPC préparé au cours complémentaires de la rue Faÿs, à Villeurbanne, il entra en classe de seconde au collège moderne de garçons de la rue Chaponnay, à Lyon, puis en classe de première au lycée Ampère. Il abandonna ses études secondaires à la rentrée 1955, sans avoir eu la première partie du baccalauréat qu’il obtint en candidat libre à la session de 1956, l’année même où il fut reçu au concours d’agent d’exploitation des PTT après une année à effectuer divers travaux, notamment comme forain dans les marchés.
Vivant dans un environnement très influencé par le Parti communiste, c’est lors de son passage au lycée Ampère qu’il s’est engagé dans l’UJRF (Union des jeunesses républicaines de France), organisation de jeunesse du PC. Dans ces milieux lycéens, il a eu l’occasion de côtoyer nombre de jeunes militants, comme Jean-Jacques Brochier et André Glucksmann. Lorsqu’il fut embauché au centre de Lyon-chèques, il se syndiqua à la CGT et y milita avec un de ses voisins de casier, Louis Viannet.
Il fut appelé pour le service militaire en septembre 1957, six mois après son mariage avec Denise Zederman, une étudiante en histoire communiste. Plus d’un an plus tard, en novembre 1958, il était affecté dans les transmissions à Tizi-Ouzou et participait à la guerre, notamment des opérations menées dans l’Oranais.
C’est à ce moment que, sur les conseils d’amis qui voyaient là pour lui une chance de ne pas « devenir zinzin », il se lança dans l’écriture de son premier roman, La Méditerranée traversait la France, ouvrage antimilitariste qui décrit les mésaventures de soldats en guerre dans les Aurès.
Il revint en décembre 1959 et reprit son travail au centre de chèques postaux avant d’obtenir une affectation au centre de tri postal de Lyon-gare, à côté de la gare de Perrache, où il a fait l’essentiel de sa carrière (en étant affecté au nouveau centre de tri de Montrochet, après le déménagement du site en 1978).
Après son retour d’Algérie, il s’est éloigné peu à peu du Parti communiste, qu’il a quitté fin 1965 après le soutien du PC à la candidature de François Mitterrand aux élections présidentielles. Il était alors, discrètement, au moins sympathisant du groupe trotskiste Révoltes. Après Mai 1968, il fut proche de la Gauche prolétarienne et milita au Secours rouge, puis s’inscrivit brièvement au PSU en 1975, attiré par le discours sur l’autogestion et les possibilités d’une action qu’il estimait proche dans ce cadre du syndicalisme révolutionnaire. Il se tint ensuite à distance de toute organisation politique, se disant dès lors « anarcho-syndicaliste ».
L’action syndicale et les luttes sociales ont joué un rôle énorme dans sa vie, constituant notamment la trame de trois de ses romans. Opposant au sein de la CGT, il en fut exclu en 1969, puis se syndiqua en 1972 à la CFDT et devint secrétaire de sa section de Lyon-gare. C’est dans cette organisation qu’il vécut la grande grève des PTT de l’automne 1974, tentant en vain de faire adopter le principe de l’occupation des locaux. Séduit par le discours d’une partie de la CFDT sur l’autogestion, il fut enthousiasmé par le conflit de l’usine Lip de Besançon.
Avec d’autres militants, il a participé à la promotion d’un fonctionnement démocratique au sein de sa section, notamment par l’organisation de réunions permettant à chacun de participer dans un cadre de travail où les horaires représentaient un handicap pour une telle activité. En septembre 1977, il fut exclu de la CFDT avec les 21 membres de la commission exécutive de la section de Lyon-gare, dont Patrice Sanchez, Bernard Fanjat, Bernard Brottat, Taymind Palmier et Noel Thomas ; en dépit d’une longue lutte interne, ces militants ne parvinrent pas à faire annuler cette décision. Quelques exclus fondèrent alors le SAT (Syndicat autogestionnaire des travailleurs), qu’il rejoint. Ce syndicat s’est dissout après quelques années sur le constat d’échec d’une petite organisation non fédérée. Georges Valero adhéra ensuite à la CNT, à l’occasion de la grève de Montrochet en 1988, alors que des postiers du centre de tri militaient dans cette organisation.
Toute sa vie, il a accordé une place essentielle à une culture considérée comme émancipatrice, participant lorsqu’il était lycéen au journal Parti pris et y publiant au moins un article. Cela ne le mettait pas en dehors de la sociabilité des jeunes de son quartier de Villeurbanne ; il créa avec quatre d’entre eux un groupe, « Les Cinq de la chanson », qui se produisait dans la région. C’est lors de ses années de lycée qu’il découvrit le théâtre et le cinéma, qui jouèrent un rôle important dans sa vie. Il monta ainsi et anima dans les années 1960, avec son collègue et ami Michel Barroil, le ciné-club du syndicat CGT des PTT du Rhône dont les séances devinrent un rendez-vous important des cinéphiles lyonnais. Tous deux invitèrent, lors de l’occupation du centre de tri en mai-juin 1968, le Théâtre de la Cité à Lyon-gare. Il s’impliqua également, à partir de la fin des années 1970, dans le combat des « radios pirates » puis, après leur légalisation, anima plusieurs émissions de ces radios associatives (notamment Radio-Léon-Motivation et ses avatars).
Mais c’est l’écrit qui est demeuré, tout au long de sa vie, au centre de ses préoccupations. D’abord comme lecteur. Comme promoteur également, notamment en montant avec d’autres militants une bibliothèque syndicale au sein de la section CFDT de Lyon-gare et en participant aux activités de la librairie libertaire lyonnaise La Gryffe à partir de 1978. Comme éditeur enfin, en faisant partie du groupe qui s’est rassemblé en 1975 pour lancer les éditions Fédérop. Il en dirigea, jusqu’à son départ en décembre 1977 à la suite de dissensions coutumières dans l’extrême gauche lyonnaise, la collection « Des travailleurs eux-mêmes » dont l’objectif, expliquait-il, était « de permettre aux exploités de s’exprimer avec leur propre langage ». Parmi d’autres ouvrages, c’est dans cette collection qu’il édita, après l’avoir traduit (avec Jean-Paul Cortada), L’espoir demeure. Les commissions ouvrières de Barcelone.
Mais c’est aussi par l’écriture qu’il montrait à quel point le livre lui paraissait un élément important d’émancipation. Après son roman sur la guerre d’Algérie, il rédigea avant 1968 Dans un bien-être sûr, roman populiste fort peu édifiant qui décrit le milieu des travailleurs du centre de tri. Puis il se lança, en pleine période du gauchisme, dans l’écriture de Vivre Quoi ?, qui narre de manière assez misérabiliste la vie d’ouvriers immigrés dans une banlieue de grands ensembles sur fond de lutte idéologique entre l’extrême gauche et le Parti communiste. Il écrit ensuite Tous les chevaux ont couru, polar politique assez désespéré dont l’action se situe lors d’un conflit social. Et s’il est impossible de dresser une liste des nombreux articles qu’il a écrits, ne serait-ce que parce que la plupart n’était pas signés, il rédigea à la fin des années 1980 une autobiographie, Ni Dieu ni Maire De Charléty aux moutons noirs, qui s’attarde sur son expérience au sein de la CFDT. Ces deux derniers ouvrages sont édités par les éditions La Digitale qu’animait à Quimperlé son ami Jean-Jacques Cellier, qu’il avait connu dans un cadre militant à la fin des années 1960.
Georges Valero est décédé à Nice le 6 mai 1990.
Il a eu quatre enfants nés en 1957 (Myriam), 1967 (Valérie), 1975 (Rachel) et 1976 (Manuel).
ŒUVRE (par ordre chronologique d’écriture) : La Méditerranée traversait la France, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 1980 ; Dans un bien-être sûr, Lyon, Fédérop, 1975 ; Vivre Quoi ?(roman inédit) ; Tous les chevaux ont couru, Quimperlé, La Digitale, 1989 ; Ni Dieu ni Maire. De Charléty aux moutons noirs, La Digitale, Quimperlé, 1989.