Fils d’un volontaire garibaldien Mauro et d’Anna Marzucchi, Vittorio Pini, dont un grand père avait été pendu en 1831 pour conspiration, avait eu une enfance très difficile et misérable — plusieurs de ses frères décédèrent de misère — et avait dû commencer à travailler dans un atelier de typographie dès l’âge de 12 ans puis dans l’imprimerie d’un journal républicain où il commença à s’intéresser à la politique. Déçu après la victoire de la gauche aux élections de 1876, il adhéra à l’Internationale après avoir assisté à une conférence de Giuseppe Barbani. Puis il s’installa à Milan où il participa à une grève de 6 mois des typographes qui fut un échec et finit de le convaincre de l’inutilité de ce genre de luttes. A cette époque et pour survivre il travailla comme pompier et sauva une famille dans une maison en feu.
En 1886 il émigra d’abord en Suisse puis en France où il allait travailler tour à tour comme garçon de café, vendeur ambulant et cordonnier. Selon le journal La Révolte (3 août 1889), il avait quitté l’Italie après avoir été condamné à 2 ans de prison pour avoir rossé le baron Franchetti, richissime propriétaire qui voulait forcer les fermiers à voter pour lui.
Se réclamant alors de l’anarchisme individualiste, il avait fondé à Paris le groupe Gli Intransigenti di Londra e Parigi (appelé aussi I ribelli di Saint-Denis, il grupo degli introvabili, Gli straccióni di Parigi — avec notamment Luigi Parmeggiani, Caio Zavoli et Alessandro Marroco. Partisan de la reprise individuelle, Pini allait alors théoriser l’expropriation comme un moyen révolutionnaire d’abolir la propriété individuelle, passage nécessaire à l’avènement du communisme anarchiste. Il allait dès lors être l’auteur d’un très grand nombre de vols et cambriolages permettant de financer diverses activités : il monta notamment une imprimerie rue de Bellefond et finança les journaux Il Ciclone (Paris, 1 numéro, 4 septembre 1887) — qui aurait été composé selon Jean Grave à l’imprimerie de La Révolte et lui aurait valu un convocation à la police — puis Il Pugnale (Paris, 2 numéros avril et 14 août 1889) dont il fut le directeur avec Parmeggiani.
Il aurait eu pour compagne une certaine Maria Carronis qui fut par la suite compagne d’un autre anarchiste italien Parazzi (ou Sarazzi) réfugié à Londres.
Le 19 octobre 1886 il avait été condamé par défaut à Paris à 2 mois de prison ppur “escroquerie”, puis le 26 janvier 1887 à 13 mois de prison pour “abus de confiance” et lle 4 juillet, sous le faux nom de Poggi, à 4 mois pour « coups et blessures ».
Soupçonné de complicité dans l’attentat à la dynamité perpétré le 6 juillet 1887 rue Vignier et 46 rue Berthe à Paris il s’était par la suite réfugué en octobre à Bruxelles où il était caché par Alfonso Danesi qui l’avait fait embaucher au journal La Réforme avec également le compagnon Guidetti. En novembre, suite au renvoi de Da,esi de La Réforme, il s’était trouvé sans ressources.
Le 23 ou 24 décembre 1887, n’ayant pas mangé depuis trois jours, il s’était affassé dans un cabaret de la rue des Six Jetons et avait semble-t-il été hospitalisé puis emprisonné avant d’être remis en liberté le 27 décembre. Ce même jour un indicateur écrivait qu’il était « nécessaire de le mettre à la frontière sans retard car Marocco lui enverra des fonds et il ne sera plus en état de vagabondage ». Il était alors l’objet d’une demande d’extradition des autorités françaises. Le 7 janvier 1888 employé comme typographe chez un imprimeur de Bruxelles, il avait été arrêté, soupçonné d’avoir participé à un vol de diamants à Paris, trois ans avant. Il avait immédiatement prouvé, qu’à l’époque du vol il était incorporé aux pompiers à Milan et qu’il n’était arrové à Paris qu’en 1887. Incarcéré à la prison des Petits Carmes et objet d’un arrêté d’expulsion (du 12 décembre 1887) il fut rapidement remis en liberté et avait déclaré partir pour Londres.
A l’automne 1888 il publia plusiieurs manifestes dont le Manifesto degli anarchici in lingua italiana al popolo d’Italia (voir portfolio), appelant le peuple à l’insurrection et critiquant sévèrement Amicare Cipriani accusé d’avoir trahi l’idéal de révolution sociale. Deux députés socialistes — C. Ceretti et C. Prampolini — ayant pris la défense de Cipriani et ayant accusé les auteurs du Manifesto d’être à la solde de la police, Pini et Parmeggiani partirent en Italie pour leur donner une leçon. Le 13 février 1889 ils poignardaient Ceretti à Mirandola et étaient interceptés 3 jours plus tard par la police alors qu’ils se dirigeaient vers Reggio Emilia où résidait Prampolini. Tous deux parvenaient à s’enfuir et Pini était ensuite revenu en France tandis que Parmeggiani s’était réfugié à Londres.
Le 18 juin 1889, sans soute à la suite d’une dénonciation, lors d’une perquisition, la police trouvait à son domicile un matériel de cambrioleur et le produit de nombreux vols. Pini était alors arrêté avec Placide Schouppe et la compagne de ce dernier, Maria Soenen. Traduit les 4 et 5 novembre 1889 devant la Cour d’Assises avec ses compagnons, il fut condamné le 4 novembre à 20 ans de travaux forcés, sentence accueillie aux cris de « Vive l’anarchie, A bas les voleurs ». P. Schouppe avait été condamné à 10 ans de travaux forcés, et Maria Soenen à 5 ans. Sa défense intitulée Mort aux voleurs fut éditée sous forme d’affiche, accompagnée d’un Manifeste du groupe parisien de propagande anarchiste ce qui ranima au sein du mouvement un intense débat sur la légitimité du vol…
Lors de son départ pour le bagne de Guyane le 15 août 1890, il tenta de s’évader mais fut repris. En juillet 1891 il s’évada avec Placide Schouppe avec lequel en pirogue il remonta l’estuaire du Maroni. Puis début août avec Schouppe, il partit à pieds pour le Vénézuela, mais dut bientôt renoncer, ses pieds gonflés ne lui permettant plus de marcher. Vers le 19 août, surpris par la police hollandaise alors qu’il était en train de repeindre un bateau, il tenta de fuir mais fut blessé à la jambe par un tir. Après 2 mois à l’hôpital de Surinam, il fut reconduit à Cayenne et fut condamné à 2 ans aux îles du Salut.
Le 14 juillet (ou septembre) 1890, il avait été condamné par contumace à 10 ans de réclusion et 20 ans de surveillance par la Cour d’assises du Brabant.
Vittorio Pini, qui avait le matricule 24216 et avait bénéficié en 1902 d’une remise de peine de 3 ans, est décédé de maladie le 8 juin 1903 au bagne de Cayenne.