Dictionnaire international des militants anarchistes
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Y’en a pas un sur cent… et pourtant des milliers d’hommes et de femmes de par le monde, souvent persécutés, embastillés, goulagisés et parfois au prix de leurs vies, ont poursuivi leur chevauchée anonyme à la recherche d’un impossible rêve : un monde sans dieux ni maîtres.

MARRET, Marius « MARIO »

Né le 27 mai 1920 à Clermont-Ferrand — mort le 5 janvier 2000 — Serrurier ; ferronnier d’art ; opérateur radio ; psychanalyste — SIA — Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) — Lyon (Rhône) — Alger — Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône)
Article mis en ligne le 27 janvier 2012
dernière modification le 1er novembre 2024

par R.D.
Mario Marret (1952)

Fils d’un modeste cantonnier, Mario Marret avait fait son apprentissage de serrurier à l’école Amédée-Gasquet de Clermont-Ferrand où en 1935 il fut en contact avec des réfugiés allemands ayant fui le nazisme. Pendant le Front populaire il organisait des pelotons de grévistes qui sillonnaient la campagne à vélo et étaient souvent pourchassés par les paysans réactionnaires de la région. Il était alors membre des Auberges de jeunesse, pratiquait l’espéranto et appartenait au groupe anarchiste local avec lequel il participa, dans le cadre de la lutte anticléricale, au dynamitage de quelques calvaires des campagnes auvergnates.

Marret était en mars 1939 le secrétaire du groupe de Clermont-Ferrand de la Solidarité internationale antifasciste (SIA). En août 1939, envoyé par Le Libertaire, il parvenait à entrer clandestinement dans le camp d’Argelès-sur-Mer pour y recueillir les témoignages des compagnons espagnols qui y étaient internés. Quelques semaines plus tard il parvenait à sortir tout aussi clandestinement du camp, mais la déclaration de guerre de septembre l’empêcha d’envoyer son témoignage à l’organe de l’Union anarchiste. C’est au camp d’Argelès qu’il avait rencontré un compagnon italien qui l’avait convaincu de l’utilité de la radio dans la lutte antifasciste. Il s’était alors inscrit au cours de radio Thouzet à Clermont.

A l’automne 1940, lors d’un congrès anarchiste il avait fait adopter une motion intitulée « Paix avec le Diable contre Hitler ».

En septembre 1941 il avait été mobilisé au Groupement des communications radio-électriques de Hauterive, près de Vichy où il fut affecté au service des repérages. A la fin 1941, prévenu par le directeur que la police de Vichy s’intéressait à lui et pour rejoindre la Résistance, il gagnait Alger où, profitant de ses connaissances en radio, il se fit recruter au Centre d’écoutes radio-électriques de l’armée française situé dans le quartier algérois de Kouba. Il y fut chargé de traquer les postes clandestins de l’Abwehr émettant depuis Alger. Deux mois plus tard il était congédié son dossier d’Hauterive ayant été transmis en Algérie. Il s’embaucha alors au magasin Général Radio Contrôle, 48 rue Sadi Carnot, qui servait en fait de couverture aux services de renseignement alliés et où il fut recruté par l’OSS Américaine. Après le débarquement de novembre 1942 en Afrique du nord, il fut un des opérateurs radio de l’OSS à Alger. Le 4 décembre 1942 il se faisait volontairement remobilisé pour être « mis à la disposition du consulat américain » et en avril 1943 il demandait à être parachuté en France.

Transféré à Londres et après une formation, il fut parachuté en août 1943 en France avec un autre agent de l’OSS, Jean Alziary de Roquefort dans le Puy-de-Dôme. Puis tous deux organisèrent un réseau de l’OSS (Penny Farthing) et son émetteur baptisé Ravina à Lyon. Mario fut avec un autre opérateur radio le responsable des transmissions et, outre les nombreuses informations envoyées à Londres et Alger sur les troupes allemandes de la région, organisèrent les parachutages de matériel destiné à la Résistance. Le 3 décembre 1943, alors qu’ils émettaient à Irigny, depuis une villa des bords du Rhône, ils échappaient de peu à une descente de la Gestapo. Dès le 16 décembre Mario reprenait ses émissions sur un nouveau poste baptisé Alpina.

Le 11 avril 1944, suite à l’infiltration d’un agent de l’Abwehr dans le réseau, Mario Marret était arrêté à Lyon avec sa secrétaire Yvonne Loiseau et plusieurs membres du réseau. Torturé pendant plusieurs jours et interné au Fort de Montluc, Marret qui avait reconnu être un espion nord-américain (s’inventant même une nationalité canadienne), fut ensuite confié à des officiers de l’Abwehr. Tout en tentant de préparer une évasion, Mario qui était parvenu à rétablir un contact avec l’extérieur, parvint au cours des interrogatoires à gagner du temps et à mystifier les agents de l’Abwehr. Il parvint, à la condition de leur garantir l’impunité, à obtenir en juillet la libération de sa secrétaire. Le 23 août 1944, les deux agents allemands venaient récupérer au Fort de Montluc Marret, qui devait être exécuté ce même jour et avec lui se dirigèrent en voiture vers les avants gardes des troupes alliées qui avaient débarqué en Provence le 15 août précédent. Ils furent finalement interceptés par un groupe des FFI, Marret libéré et les Allemands arrêtés. Marret rejoignit alors la DGER, le tout nouveau service de renseignement gaulliste tattaché au BCRA de J. Soustelle.

Après la guerre Marret participa dès la fin des années 1940 aux expéditions polaires de Paul-Émile Victor au cours desquelles il réalisa plusieurs films documentaires (Terre Adélie en 1951, Images d’un été, Les Pingouins empereurs et Aptenodytes Forster en 1953). Il fut également l’animateur dans les années 1960-60 du ciné-club d’Apt et membre du Parti communiste. Il fut l’un des premiers à se mobiliser contre l’implantation des fusées sur le plateau d’Albion.

Engagé dans le soutien au FLN pendant la guerre d’Algérie, il participa lors de l’indépendance à la création de la télévision algérienne et fut notamment l’auteur de plusieurs films sur les mouvements de libération de l’Afrique portugaise, notamment de Nossa Terra (1966) sur la Guinée portugaise. Membre du collectif de cinéastes Medvekine de Chris Marker, il fut le co-réalisateur du film A bientôt j’espère lors de la grève en 1967 des ouvriers de la Rhodiaceta à Besançon. Pendant la guerre du Vietnam, Marret, qui avait été décoré de la Distinguished Service Cross pour ses activités dans la Résistance, renvoya cette décoration aux Américains. Dans les années 1970 il était devenu psychanalyste à Aix-en-Provence où il devait décéder le 5 janvier 2000.

En 2004, l’administration des Postes émettait un timbre à son effigie dans une série philatémique consacrée aux terres australes.

Oeuvre : Outre les films cités ci-dessus, M. Marret est l’auteur des courts métrages Images d’un été, Le Ferronier (1955), Un enfant d’Ireli, La Piste blanche (1960), Allo Charcot (1960), Montagnes du désespoir et du récit Sept hommes chez les pingouins (Ed. de l’Aube, 1996) sur ses expériences en Terre Adélie.


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