C’est encore adolescent à Livourne que Bruno Salvadori était entré en contact avec les anarchistes lors d’une bagarre avec les fascistes. Après la mort de sa mère vers 1928, il émigrait en France et se fixait à Marseille. Le 7 octobre 1930 il était l’objet d’une première mesure d’expulsion et était « rapatrié » pour accomplir son service militaire à Mantoue. Il semblerait avoir ensuite déserté et être retourné à Marseille où il aurait participé à divers cambriolages puis aurait fait de la contrebande et du passage de propagande à la frontière espagnole.

Arrêté le 22 décembre 1934 à Perpignan pour « violences et voies de fait », il était condamné le 26 à quatre mois de prison. Il était à nouveau arrêté au Boulou le 3 août 1935 et était condamné le 22 à six mois de prison par le Tribunal de Céret pour « infraction au décret d’expulsion ». Il passait ensuite vraisemblablement en Espagne puisque il était arrêté à Barcelone le 25 mai 1935 après avoir tenté de vendre son passeport, ce qui entraînera l’ouverture d’un dossier à son nom en tant qu’élément subversif par la police mussolinienne. Expulsé d’Espagne vers le Portugal le 25 mai 1935, il ne tardait pas à revenir et était une nouvelle fois arrêté le 22 février 1936 à Barcelone et interné à la prison Modelo. C’est à cette époque qu’il était entré en relation épistolaire avec Giuseppe Pasotti à Perpignan. Ce dernier compagnon était chargé des passages d’hommes et de propagande et du soutien aux prisonniers.

Expulsé à la fin de sa peine vers la France, Bruno Salvadori restait en Espagne sous le nom d’Antoine Giménez, une fausse identité sans doute fournie par Pasotti et qu’il allait conserver pour le restant de sa vie. Il résidait alors dans la province de Lérida, était membre de la CNT et travaillait dans une propriété agricole de Vallmanya.

Lors du coup d’État franquiste de juillet 1936, il intégrait la Colonne Durruti puis le groupe international qui se constituait à Pina de Ebro. Il participait aux combats de Sietamo, Farlete et Perdiguera et aurait été délégué de groupe avant la militarisation. Sur le front d’Aragon il fit la connaissance d’Antonia Mateo Clavel qu’il allait épouser.

Démobilisé en 1938 comme tous les volontaires étrangers, il regagnait Barcelone où il allait travailler jusqu’à la Retirada où, le 9 février 1939, il entrait en France par Port Bou. Toujours sous le nom d’Antoine Giménez il était interné au camp d’Argelès où il était membre du groupe Liberta o morte regroupant plus d’une centaine de militants libertaires.

Pendant l’Occupation il fut affecté à une Compagnie de travailleurs étrangers d’abord dans la région de Royan où il aurait participé à divers sabotages et actes de Résistance puis en Corrèze sur le chantier du barrage de Treignac. Libéré en octobre 1944, il résida alors avec sa famille à Limoges jusqu’en 1951, date à laquelle il partait pour Marseille où il avait trouvé un emploi de boiseur-coffreur à la Société des travaux du Midi. Il ne semble pas avoir rejoint pendant toute cette époque une quelconque organisation.

Au début des années 1970, il commençait à rédiger ses souvenirs et en 1976 reprenait contact avec le mouvement libertaire. Il fréquentait alors le groupe de Marseille de la Fédération anarchiste au local du 72 Boulevard Eugène Pierre, puis 3 rue Fontaine de Caylus au quartier du Panier, où il assurait souvent des permanences.

Antoine Giménez est décédé d’un cancer à Marseille le 26 décembre 1982. C’est sous cette fausse identité qu’il fut enregistré à l’état civil.

Œuvre : - Les fils de la nuit : souvenirs de la guerre d’Espagne (L’insomniaque & les Giménologues, 2006)