Dictionnaire international des militants anarchistes
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GIRELLI, Domenico
Né à Civitella di Romagna (Forli) le 19 février 1893 - mort dans la nuit du 3 au 4 mai 1991 - Ouvrier métallurgiste - Homécourt (Meurthe-et-Moselle) – Civitella – Bologne - Paris - Puteaux & Suresnes (Hauts-de-Seine)
Article mis en ligne le 29 août 2007
dernière modification le 2 mars 2024

par R.D.
Domenico Girelli (1988)

C’est en 1905 à l’âge de 12 ans que Domenico Girelli avait suivit son père Giovanni, manoeuvre aux usines d’Homécourt (Meurthe-et-Moselle). Il commençait à travailler comme plongeur à 20f par mois dans un petit restaurant géré par les immigrés italiens. En 1908 il se vieillit d’un an en traficant sa date de naissance pour pouvoir être embauché à l’usine où travaillait son père. C’est à cette époque que, sous l’influence de Virgilio Gemelli responsable du groupe anarchiste local, il devint anarchiste et que, passionné de lectures auxquelles il consacrait 5 à 6h après chaque journée de travail, il put acquérir une solide culture d’autodidacte. Lors de vacances passées à Civitella il devenait l’ami de plusieurs jeunes anarchistes dont Cairo Giovannini et l’anarchiste individualiste Leandro Arpinati qui deviendra plus tard l’un des responsables fascistes de Bologne.

En 1913, après que son père l’ait convaincu de pas s’insoumettre, il rentrait en Italie pour effectuer son service militaire. Au bout de quelques mois, il était dans un tel état de dépression morale et physique qu’il obtenait une année de convalescence à passer à son domicile. C’est pendant cette convalescence qu’éclata en juin 1914 la grève insurrectionnelle de la « semaine rouge ». Domenico participait alors très activement à toutes les manifestations (c’est lui qui avait déployé un drapeau rouge et noir au sommet d’une tour à Civitella). Après la fin du mouvement, il retournait dans son bataillon à Verone. Après la déclaration de guerre, il refusa de porter les armes et déclara préférer aller en prison. Il accepta alors le compromis d’aller au front mais comme infirmier. En novembre 1917 il fut fait prisonnier par les autrichiens et envoyé dans un camp d’internement en Hongrie où dans les derniers mois de la guerre il travaillait dans une famille dans un village. Libéré à la fin de la guerre, il terminait son service militaire avant de retourner à Civitella où lors des élections de 1919 il participa très activement à la propagande anti électorale.

Domenico Girelli lisan "La Donna Libertaria" (1912-1913)

Fin 1919, à la recherche de travail, il allait à Bologne où le 8 janvier 1920 il était arrêté pendant une manifestation, condamné à une peine avec sursis et renvoyé à Civitella. Revenu très vite à Bologne il commençait à travailler à l’usine métallurgique San Martino Macchine Agricole où travaillaient une quinzaine de compagnons dont Emilio Grassini. Il participait aux activités du groupe de l’USI – sans toutefois y adhérer – et en septembre 1920 à l’occupation de l’usine qui continuait à fonctionner sous le contrôle des ouvriers. Avec d’autres compagnons il participa alors à la fabrication de plusieurs bombes et fut impliqué dans un vol d’armes dans une caserne fin décembre. Il décidait alors de revenir en France, d’abord à Romans (Drôme) puis allait à Paris où pendant six ans il allait travailler aux usines Renault et dont il était licencié après la grève du 1er mai 1930. Il était plusieurs fois poursuivi et arrêté par la police suite à son militantisme.

En 1935 il résidait 26 rue Cartault à Puteaux et figurait sur une liste d’anarchistes de la région parisienne.

En août 1936 il partait comme volontaire en Espagne et combattait sur le front d’Aragon. En avril 1937 il obtenait une permission et allait à Paris pour visiter sa compagne et leurs enfants. C’est en tentant de retourner en Espagne avec un groupe de compagnons qu’il était arrêté à la frontière et était emprisonné quatre mois à Perpignan, puis allait à Montpellier avant de regagner Paris après avoir renoncé à retourner en Espagne suite aux évènements de mai 1937 et à la répression stalinienne. A Paris, lors de débats publics il allait alors affronter le dirigeant communiste Luigi Longo, l’accusant de complicité dans l’assassinat de Camillo Berneri et d’autres compagnons.

En juillet 1938 lors de la visite à Paris des souverains britanniques, il était arrêté et expulsé en Belgique, mais dès le lendemain regagnait clandestinement la région parisienne où il allait faire mille métiers, finissant toujours par être licencié à cause de ses idées.

En 1940, sur dénonciation de la police française le signalant comme « antifasciste et ancien combattant en Espagne », il était emprisonné à la prison de la Santé par les Allemands. Lors d’un interrogatoire de la Gestapo, il déclara être allé en Espagne pour trouver du travail. Au bout de quatre mois, sans doute parce qu’à cette époque les Allemands étaient plus intéressés à mettre la main sur les intellectuels antifascistes, il était libéré. Pendant la guerre, son fils, envoyé au service du travail obligatoire en Allemagne, décédera. A la différence de nombreux compagnons, Domenico Girelli ne participa pas à la résistance, considérant le conflit comme une affaire entre états.

A la libération il était arrêté et emprisonné pendant quatre mois pour avoir caché des armes provenant de la résistance. Après guerre, il résidait à Suresnes et continuait de défendre les idées anarchistes y compris à la Maison de l’Italie et au Centre Culturel italien de Paris. Il participait à de nombreux congrès –dont le congrès international de Carrare en 1968 – et dans les années 1970 à de nombreux débats et réunions tenus au local de la CNT espagnole, rue des Vignoles (Paris 20e). Après la mort de sa compagne, il soutint également dans les années 1970-80 de nombreux compagnons italiens exilés suite aux « années de plomb » ce qui lui valut d’être perquisitionné.

Domenico Girelli est mort dans la nuit du 3 au 4 mai 1991. Rationaliste et libre penseur, il avait fait don de son corps à la médecine, puis avait été incinéré.

Selon le témoignage d’une de ses voisines à Suresnes, Domenico Girelli était “un homme hors du commun, aux qualités exceptionnelles tout à fait en concordance avec ses idées. Végétarien, ne buvant jamais d’alcool et faisant chaque jour des pompes dans le jardin, il adorait inviter les gens à manger… Il disait "ce qui est à moi est à tout le monde" et en donnait la preuve… Personne ne l’a jamais vu en colère ; ses collègues à l’usine avaient essayé de le provoquer en cachant sa bicyclette : en sortant du travail, il l’avait un peu cherchée, puis après avoir déclaré "bon, quelqu’un en aura eu besoin", il était rentré à pied”.


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