Dictionnaire international des militants anarchistes
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JAHN, Octave, François, Aimable “SOUVARINE”
Né le 10 février 1869 à Cherbourg (Manche) – mort le 9 juin 1917 - Ouvrier Typographe ; voyageur de commerce - Paris – Lyon (Rhône) – Marseille (Bouches-du-Rhône) – Valence (Levant) – Mexico
Article mis en ligne le 18 décembre 2007
dernière modification le 12 mars 2024

par R.D.
Octave Jahn

Octave Jahn qu’un rapport de police qualifiait d’être “un agitateur des plus actifs” allait tour à tour habiter et militer à Paris, Lyon, Grenoble et Marseille, parcourant la France en tous sens pour faire de la propagande et, souvent pour échapper aux nombreuses condamnations dont il fut l’objet, faisant de nombreux séjours à l’étranger. Il était l’aîné de 6 enfants d’une famille de tailleurs, Adolphe et Hortense Bihel.

Dès l’âge de 15 ans, après un apprentissage d’imprimeur et être entré en février 1882 comme porteur de dépêches dans l’administration des postes, il organisa en 1884 à Paris une grève des télégraphistes. Sur le point d’être révoqué, il démissionna de son poste en janvier 1886, mais participa activement à l’organisation le 30 mai 1886 au meeting dit "des petits télégraphistes" (voir Portfolio) tenu salle Tessier, 104 rue des Entrepreneurs, présidé par Coudry et où il dénonça notamment les humiliations et le mouchardage dont étaient victimes les employés de la poste. Puis il reprit son métier d’imprimeur.

Le 14 juillet 1886, il fut arrêté à Paris, Place de la République, où il plantait un drapeau noir sur le piédestal de la statue en criant “A bas le drapeau tricolore !”. Il développait également une intense propagande antimilitariste incitant les conscrits à se soustraire aux obligations militaires "L’armée est inutile, gardons nos balles pour les exploiteurs".

Il était alors l’un des organisateurs de la Jeunesse anarchiste de la rive gauche (ancien groupe Les Misérables) avec entre autres Sureau, E. Villaret, Robquin, Arcougeon, le cadet des frères Moucheraud, Adrien Martin et Legrand et était sans doute sans domicile : un indicateur, fin juillet 1886, signalait que ses camarades avaient convenu qu’il “serait nourri et logé par chacun d’eux à tour de rôle jusqu’à ce qu’il ait définitivement trouvé asile chez un ami". (cf. APpo BA 1506)

Toujours selon la police, il aurait été avec Villaret l’auteur d’un tract, tiré à 500 exemplaires, signé d’un soi disant Groupe la Main noire appelant les ouvriers sans travail à manifester le 12 août Place de la Bourse (voir Portfolio). Toutefois, il semblerait que cette manifestation ait été un leurre monté par le groupe de la jeunesse pour provoquer un déploiement de policiers sans nécessité. Deux jours avant Jahn avait été arrêté" avec deux autres compagnons - Hubert Louis Coudry et Martin - alors qu’il distribuait le tract rue Quincampois. Poursuivis pour "provocation à attroupement", tous trois bénéficièrent d’un non-lieu fin août.

En août 1886, avec les compagnons Tortelier, Marie Murjas, Tennevin, Niquet (voir ce nom) et Bidault il fonda à Paris la Ligue des Antipatriotes qui allait éditer plusieurs placards (notamment Aux Conscrits) et organiser des conférences antimilitaristes. En août il fut arrêté après avoir été trouvé porteur de plusieurs placards. Le 10 octobre, il fut l’organisateur d’une réunion salle Tessier où devait être organisée une tombola dont le produit devait servir à payer l’imprimeur des affiches de la Ligue. Le 4 octobre précédent, il avait été l’organisateur salle Droz, rue de Richelieu, d’une réunion de toutes les sections de la Ligue à laquelle avaient participé une vingtainede compagnons dont Couchot, Lucas, Fleury, Pons, Despin et Coudry.

Début décembre 1886, il fut blessé à une jambe lors d’une expédition avec Tennevin, Couchot, Vallade et deux autres chez un concierge pour y récupérer une machine à faire des enveloppes qui appartenait à la sœur de Tennevin. Hospitalisé à l’Hôpital du Midi, une quête fut effectuée à son profit le 29 décembre lors d’une réunion de la Ligue des antipatriotes, rue de Pigalle. Toutefois, lorsque les compagnons étaient allés à l’hôpital pour lui porter le produit de la collecte, ils ne l’avaient pas trouvé et avaient supposé qu’il s’y trouvait sous une fausse identité.

En janvier 1887, aux cotés notamment de Tortelier, Devertus et Louise Michel, il participa à divers meetings de protestation contre la condamnation à mort de C. Duval. Il s’y fit remarquer par la violence de ses paroles, faisant l’apologie du vol et du pillage et affirmant qu’il imiterait l’exemple de Duval dès que l’occasion s’en présenterait. Il aurait alors été membre d’un groupe dit La main noire.

En 1887, après avoir notamment dénoncé le journal Le Révolté qu’il ne considérait plus comme anarchiste, il fut l’un des rédacteurs avec Tennevin, Murjas et Paillette du journal L’Avant-garde cosmopolite (Paris, 8 numéros du 28 mai au 23 juillet). Il fut également le fondateur du groupe “les pieds plats” spécialisé en déménagement "à la cloche de bois", proche de la Ligue des anti-propriétaires et dont il avait composé la chanson (voir portfolio) lors d’un emprisonnement en Belgique.

Le 26 février 1887, lors d’une réunin tenue 46 rue de la Montagne Sainte Geneviève (Vè arr.) il avait déclaré : "Puisque l’on traque les anarchistes comme des bêtes fauves, ils doivent se défendre comme tels : le feu, le pillage, le meurtre, voila les moyens que nous devons employer pour nous venger de la bourgeoisie".

Le 28 février, avec notamment Louiche et une dizaine d’autres révolutionnaires, il assistait à l’enterrement de l’ouvrier Albert Deruyter qui dans les jours précédent avait assassiné quai de Grenelle le directeur de l’aciérie Dorlodot, son ancien patron, puis s’était suicidé.

Le 5 mars 1887 il fut condamné par le tribunal de la Seine à 5 francs d’amende pour “contravention à la police des chemins de fer”. Le 12 mars, aux cotés notamment de Louise Michel, Murjas et Hemery Dufoug, il fut l’un des orateurs de la réunion publique organisée salle François, 33 rue Blomet, par la Jeunesse anarchiste, le groupe anarchiste du XVe et le groupe L’Avant garde du XVè. Devant environ 300 personnes dont “20 femmes appartenant à la classe ouvrière”, il avait appelé à “se débarrasser par n’importe quel moyen des membres du gouvernement, de la magistrature et à incendier tous les monuments publics, tels que la Chambre des députés, le sénat, la bourse, l’hôtel de ville et surtout la préfecture de police avec tous ses roussins". Remonté sur la tribune en fin de meeting, il avait ajouté qu’il venait d’être condamné à 5 francs d’amende pour avoir voyagé en train sans billet et avait assuré que lorsque il aurait 21 ans, il refuserait d’être soldat. Parlant de la misère où il se trouvait, il avait raconté qu’un de ses amis lui “avait prêté une paire de souliers et une culotte et qu’il ne pouvait plus trouver de travail à Paris à cause de ses idées anarchistes”, raison pour laquelle il avait dû prendre le train pour aller en province.

Le 17 mars suivant, aux cotés notamment de Louise Michel, il fut l’un des orateurs de la réunion familiale organisée salle du Commerce par les groupes anarchistes de Paris avec les concours des groupes italiens, allemands, autrichiens et russes pour fêter l’anniversaire de la Commune, réunion à laquelle avaient assisté environ 300 personnes dont Duprat et sa femme, Leboucher, Tennevin, Lucas, Bidault, Devertus, Niquet, Duplessis, Léveillé, Sourisseau, Morel, Lecourt et sa femme.

Le 28 mars, lors d’une réunion organisée avec Louise Michel à la salle Gaudin, rue Saint-Charles, par le groupe L’Avant Garde, Jahn, monté sur une estrade, avait laissé tombé de sa poche “une cartouche ou une amorce qui avait éclaté et fait une détonation semblable à celle d’un coup de revolver". Puis il avait évoqué la manifestation la veille des garçons limonadiers aux Halles : “Voilà le commencement de la révolution ! Saluons ces limonadiers qui osent ce que nous hésitons à faire. Il faut le jour de la révolution massacrer tous nos ennemis qui sont les propriétaires et les mouchards, les mouchards qui sont dans la salle et qu prennent des notes… Mort à la bourgeoisie !".

Le 9 avril suivant, lors d’une réunion publique du groupe L’Avant Garde organisée à la salle de l’Alcazar d’Italie, avenue de Choisy, il avat annoncé qu’après le refus du journal Le Matin d’insérer un rectificatif à un article accusant un membre de la Ligue des antipropriétaires d’avoir volé les meubles d’un étudiant, il allait se rendre ce jour avec ses compagnons dans es bureaux du journal pour “y casser la gueule des rédacteurs".

Le 18 avril, lors d’une réunion publique à la salle Pétrelle, présidée par Alain Gouzien et organisée entre autres par les groupes Le Léopard du Panthéon, Les insurgés du 3e, Le Drapeau noir de Charonne, Les Indisciplinés, La sentinelle de Montmartre et la chambre syndicale des hommes de peine, il avait appelé à détruire violemment les bureaux de placement.

A cette même époque, il avait été menacé par son père d’être interné à la Petite Roquette jusqu’à l’âge de 21 ans et aurait reçu du Cri du Peuple, 40 francs pour pouvoir organiser son évasion éventuelle.

Le 6 juin il fut à nouveau condamné à 6 mois de prison pour “outrage à magistrat” après avoir insulté un commissaire de police lors d’une réunion le 18 avril précédent dans le cadre de la campagne contre les bureaux de placement.

Pour éviter la prison, il s’était réfugié, dès la fin avril, en Belgique où il fut arrêté à la Louvière le 22 mai lors de grèves où il avait organisé trois meetings où il distrubuait notamment l’organe communiste anarchiste La Liberté (Bruxelles-Verviers, 23 octobre 1886-26 mai 1887) de F. Pintelonb et Jean Davister et après l’explosion d’une cartouche de dynamite sur le seuil de l’hôtel du Commerce de La Louvière - il bénéficia le 3 août 1887 d’un nin lieu faute de preuves suffisantes - et où le 16 novembre la Cour d’assises du Hainault le condamnait à 2 ans et 6 de prison respectivement pour “excitation suivie d’effets, à la destruction de propriété et vagabondage et port d’ame prohinée”. Dans l’un des meetings aux grévistes il avait notamment déclaré : “… Vous vous contentez de vous promener dans les rues avec des drapeaux rouges, en chantant. Vous chantez votre misère, vous chantez que vous crevez de faim. On vous massacre. Et vous restez calmes ! Vous voulez l’égalité, n’est ce pas ? Mais un gendarme n’est pas plus que vous : Quand un gendarme vous donne un coup, répondez lui par un coup ! Allons, du sang, du sang ! Vous voulez la liberté, on vous la refuse ! Prenez la… Tant que l’organisation actuelle subsistera, vous serez des esclaves. Puisque le Borinage se lève, levez vous donc aussi. Tous les moyens sont légitimes contre les tyrans… Ce ne sont pas des sanglots qu’il faut, mais de la colère pour tout briser…”. Lors de ces meetings Le Journal de Bruxelles (24 mai 1887) l’avait ainsi décrit : "C’est un type de jeune faubourien parisien : hâve, imberbe, il porte un costume mi-bourgeois, mi-ouvrier, une jacquette crasseuse, une blouse de typographe...Il a certainement un grand fond de talent oratoire naturel. Son langage presque correct et plein de coloris est d’une énergie sauvage. Les intonations et les gestes sont fort justes. Mais quel démon en ce qu’il dit ! Il crache le sang et le feu".

Dans le compte rendu du procès La Révolte le décrivait ainsi : “C’est un tout jeune homme maigriot, à la figure intelligente et fière. Il est calme, très pâli par la longue incarcération qu’il a subie, mais son regard clair vibre et brille. Il n’a que de pauvres vêtements de travail, mais il ne les porte pas sans une certaine élégance inconsciente”. Selon la presse belge il avait comparu "vêtu de noir et porte une flamboyante cravate rouge". Sa défense fut reproduite dans divers placards puis plus tard dans le journal L’Etoile Socialiste (Bruxelles) dans les numéros 14 (4 avril) à 16 (18 avril 1897). Il fut interné à la prison de Saint Gilles, puis en juin 1887 à celle de Mons où en février 1888 il était malade. En mars 1888 il avait été l’objet d’un arrêté d’expulsion du Royaume.

Dans une lettre adressée depuis la prison de Mons à un compagnon français, il avait écrit : "Patience, tout va bien. Les anarchistes font déjà tache d’huile et malgré la hache, la potence et la prison, cette tache d’huile s’étend, c’est à dire que les anarchistes voient leurs rangs grossir de jour en jour, parce que la misère est sigrande et les désespérés si nombreux, que c’est comme une fièvre qui passe dans la classe travailleuse et que cette fièvre ammènera fatalement l’explosion de la Marmite sociale" (cf. Le Peuple, 17 novembre 1887).

Octave Jahn, compte rendu du procès (décembre 1887)

Il fut libéré le 23 février 1889 de la prison des Petits Carmes et conduit à la frontière hollandaise. En juin, selon le rapport d’un indicateur, il serait revenu clandetinement quelques jours à Bruxelles pour remercier les compagons de leur aide et aurait alors été alors pris en charge par le compagnon Cardinal, mais avait été recherché en vain. Il partait ensuite pour Barcelone, d’où, recherché par les autorités espagnoles, il revenait en France où son courrier était adressé au compagnon Henri Beaujardin, ouvrier maçon à Bouglon (Lot-et-Garonne). En juillet 1889 il fit une grande tournée de conférences dans le Var (Toulon, Hyères), à Nîmes, Avignon et Lyon.

Le 6 juillet 1889, aux cotés de Brunet, Verdier, Sébastien Faure, Montand dit Monat et Tricot, il avait été l’un des orateurs du meeting organisé à Nîmes par Jean-Pierre Geay auquel avaient assisté environ 70 personnes. En des termes violents il exhorta les jeunes compagnons à déserter, déclarant notamment : “Non je ne serai jamais soldat parce que je n’ai rien à défendre, parce que les bourgeois peuvent défendre eux-mêmes ce qu’ils possèdent, mais, moi, pauvre pied-plat qui n’ai rien, je ne connais pas de patrie, et si j’en ai une, je luis dis merde, parce qu’elle ne me donne pas à bouloter. Oui, compagnons, c’est par ce mot de patrie, c’est au nom de cette loque sordide qu’on appelle le drapeau tricolore que les bourgeois vous avilissent, vous dégradent et font de vous des assassins… Je ne serai pas soldat, car à la patrie, je le répète, je lui dis merde et je chie dessus au drapeau. Je préférerais me faire emprisonner 10 fois que d’endosser la sale casaque qui dégrade et avilit".

En août 1889 Jahn, qui avait été réformé du service militaire, s’installait à Lyon où il travailla comme ouvrier lithographe, demeura chez Paul Bernard, 17 rue de l’hospice des vieillards puis 6 rue de Penthièvre et où, sous son impulsion, les anarchistes entreprirent une campagne abstentionniste à l’occasion des élections de septembre.

Fin octobre 1889, il état signalé à Paris où, dans une réunion du Cercle anarchiste international de la salle Horel, il avait fait un compte rendu de son voyage dans le Nord et le Pas-de-Calais lors de la grève des mineurs. Il avait été envoyé à Lens sur une proposition de Tortelier et avec l’aide du Cercle qu avait mis 60 francs à sa disposition. Il fut accompagné semble-t-il par S. Faure, mais aucun d’eux n’avait pu prendre la parole dans les réunions et la grève s’étant terminée, Jahn était allé ensuite à Lille tandis que Faure était rentré à Paris.

Il organisa par la suite plusieurs conférences et meetings entre autres à Troyes (12 juin 1890), Firminy (22 septembre 1890). Fin mai 1890 il état signalé dans une réunion du groupe Le Réveil du XVe où il avait reproché aux compagnons leur inaction depuis l’affaire Duval. Le 30 juillet 1890 le tribunal de Lyon le condamnait à 1 mois de prison pour “outrage à un commissaire de police et port d’arme prohibée”.

En août 1890 il travaillait comme typographe et fut l’un des organisateurs du groupe La Jeunesse cosmopolite spécialisé dans la lutte antimilitariste et l’aide aux déserteurs et insoumis. Ce groupe réunissait une vingtaine de membres et avait son siège au café « Marcellin », 105 avenue de Saxe. Les 16 et 17 août 1890 il avait participé comme délégué de Chambéry au congrès des groupes anarchistes de la région de Genève qui avait réuni dans cette ville une vingtaine de délégués français et suisses et où avait été fondée la Fédération internationale des revendications prolétariennes dont le secrétaire était Chomat et le trésorier Zograffoz.

Ce même mois d’août 1890, lors du procès de Pierre Martin suite aux incidents du 1er mai à Vienne (Isère), il prit la parole, avec également Orcelin, Mollet et Audin, au meeting de soutien organisé à Grenoble où il essaya “de réfuter point à point le réquisitoire du procureur général” et expliqua “la genèse des mouvements insurrectionnels, des actes de désespoir accomplis par la foule exploitée, qui meurt de faim, alors que les richesses s’entassent insolemment autour d’elle. Quoiqu’on fasse, malgré la prison, malgré le bagne, on n’empêchera pas les cris de révolte et d’humanité lancés en Cour d’assises par les Martin, les Tennevin, les Buisson de retentir aux oreilles des malheureux qui ne peuvent avoir l’assurance du lendemain” (cf. La Révolte).

Le 4 septembre 1890 il avait été avec Monod de Dijon et Nahon de Marseille l’un des orateurs à la réunion tenue salle Rivoire à Lyon devant 500 personnes. Il y était venu "sous le costume de sergent d’infanterie afin, disait il, de dépister les agents. Il s’est déhabillé, une fois dans la salle, et a revêtu des vêtements bourgeois" (cf. Le Temps, 5 septembre 1890). A propos de la grève générale (thême de la réunion) il avait déclaré "C’est l’arme à la main qu’il faut descendre dans la rue et, si un policier s’y oppose, il faut le prendre et le foutre dans le Rhône" (cf. ibidem) Suite à cette réunion un commissaire de police avait été molesté ce qui avait entraîné l’arrestation de Nahon, Perret, Petit, Lauze et Dehme. Jahn, en correctionnelle, fut condamné à 1 mois de prison pour "port d’arme prohibée et insulte à la maguistrature" (cf. La Révolte 19 septembre 1890).

Le 7 septembre 1890, lors d’une réunion à Saint-Chamond à laquelle participèrent une centaine de compagnons, dont la compagne de Pierre Martin de Lyon et de Cellard de Vienne, il fut chargé de l’organisation d’un congrès régional pour le mois de novembre.

Le 20 septembre 1890 il donnait avec Paul Bernard une conférence à Firminy et à Roanne qui avait réuni, selon la police, quelques 130 personnes et où il s’était ainsi présenté : " Nous ne faisons pas profession de conférenciers, le compagnon Bernard et moi, nous sommes des ouvriers. Je dis cela pour les journalistes. Nous venons donc pour défendre les intérêts des travailleurs…". Puis à la fin de son exposé destiné aux mineurs, il avait expliqué le sens du mot anarchie “absence d’autorité”, les anarchistes niant l’utilité du gouvernement “on peut se passer des patrons, des propriétaires, des boutiquiers, des curés et du gouvernement. Ce sont tous des voleurs. L’anarchie c’est l’amour, c’est l’entente, c’est l’harmonie”. Le lendemain Jahn, sans Bernard retenu à Lyon, donnait une nouvelle conférence à Saint-Chamond sur le thème "De l’avenir social des travailleurs par les travailleurs eux mêmes" à laquelle participèrent environ 200 personnes et où prirent également la parole Brossy, Chapoton et Celle. Dans la nuit du 27 au 28 septembre 1890 il fut suspecté d’avoir placardé à Lyon l’affiche Aux Coscrits qui se terminait par "Heureux ceux qui pourront déserter pour échapper aux tortures à subir et aux crimes à commettre, leur consciense sera tranquille. Mais si, n’ayat pas le moyen de fuir, vous endossez la tunique du soldat, si on vous oblige à marcher, répondez aux ordres sanguinaires de vos chefs en leur envoyant le plomb de vos fusils".

Le 11 octobre 1890 il fit avec Paul Bernard et Claude Colas une conférence à Roanne - où il avait notamment déclaré : " L’anarchie dit au prolétaire : ton patron a un coffre fort plein d’or et d’argent, c’est toi qui l’a rempli. Si tu le défoncés, c’est ton droit. Elle lui dit encore : les magasins sont pleins, tu as le droit d’y prendre ce qu’il y a " - à la suite de laquelle tous trois furent condamnés par défaut à un an de prison et 100f d’amende pour “appel au meurtre, au pillage et à l’incendie”.

Puis il participa avec Paul Bernard et Ernest Nahon à la préparation d’un congrès régional de la région de l’est qui devait décider de fonder une Fédération des ouvriers réunis, de la tactique de la grève générale et de l’entrée des anarchistes dans les syndicats. Ce congrès fut précédé d’un meeting public salle Rivière le 31 octobre où des propos violents furent tenu à propos de la Grève générale, du 1er mai et de la propagande par le fait. Le lendemain, 1er novembre, s’ouvrit au café Marcellin le congrès qui regroupa 150 délégués - dont notamment les délégués de Saint-Étienne, Terrenoire, Le Chambon, Saint-Chamond, Roanne, Vienne, Villefranche, Grenoble, Romans, Valence, Dijon et Marseille - malgré le boycott de certains anarchistes qui s’étaient désolidarisés des positions violentes de Jahn. Le lendemain, la police arrêtait cinq des délégués, tandis que Jahn, poursuivi pour avoir refusé de constituer un bureau lors du meeting du 31 octobre, parvenait à s’enfuir et à passer en Suisse. Le 22 novembre il était condamné par défaut à 2 ans de prison et 100f d’amende pour “provocation au meurtre et au pillage”. Quelques jours plus tard, le 8 décembre, la Cour d’Assises de la Loire le condamnait par défaut, avec Colas et Bernard, à une nouvelle peine de un an de prison et 100f d’amende pour les mêmes raisons.

En novembre 1892, selon la police belge, sous le nom de Cauderlier dit l’Espagnol, ou de Coudry, il se serait réfugé à Bruxelles où ce même mois lui avait été signifié un arrêté d’expulsion lui enjoignat e partir pour Londres (cf. Le Peuple, 21 novembre 1892).

Octave Jahn se réfugiait alors une nouvelle fois en Espagne d’abord à Barcelone où il travailla comme imprimeur puis de janvier 1891 à janvier 1894 au Levant où il allait militer dans la région de Valence, travailler comme représentant d’une maison de caractères d’imprimerie et fonder en juin 1893 le journal La Controversia (5 numéros). Suspecté d’un attentat à la bombe dans une église, il fut arrrêté le 3 mai 1892et emprisonné 3 mois à Valence avant de bénéficier d’un non-lieu. C’est sans doute d’Espagne qu’il collabora au journal Le Pot à Colle (Bagnolet, 1891-1892) publié par L. Guérineau. En février 1893 il aurait été arrêté à Bercelone pour "rébellion", puis à Alicante, aurait blessé un agent voulant l’arrêter En janvier 1894, suite aux nombreuses arrestations d’anarchistes à la suite de l’attentat du Liceo, il quittait l’Espagne et s’embarquait à Cartagena (Murcie), sous le nom de Diego Vicente Vilar, pour l’Afrique du nord.

En 1894, après un bref passage à Oran où il collabora notamment au journal Le Petit Fanal d’Oran il gagnait Marseille où, le 20 mars, dans un bar de la Cannebière après avoir échappé une arrestation après avoir menacé un agent avec son poignard, il s’était immédiatement rembarqué pour Alger où, dans le quartier de Mustapha, il fut arrêté le 4 avril et où il fut condamné le 26 avril à un mois de prison et 16 fr d’amende pour "port d’arme prohibée" (un poignard et la gâchette d’un révolver). Début mai il fut transféré en France où très vite furent confirmées les peines auxquelles il avait fait opposition : 2 ans de prison pour “excitation non suivie d’effets au meurtre, pillage et incendie” (20 mai 1894, cour d’Assises du Rhône, affaire de la conférence de Roanne avec Colas et Bernard, 1890), 6 mois de prison (13 juin 1894, tribunal de Marseille) pour "outrage à agent et menaces de mort sous condition", 1 an de prison pour “excitation au meurtre et pillage” (15 juin 1894, Cour d’Assises de la Loire). Concernant l’outrage et manace de mort à agent Jahn avait déclaré au président du tribunal "La police est au corps social ce que la vermine est au corps humain"(cf.Le Temps, 14 juin 1894).

En août 1895, il résida à Marseille dans un garni (26 rue du Baignoir) et fut perquisitionné à deux reprises puis écroué après des propos tenus lors des réunions qu’il avait organisé les 24 et 29 août avec J. Cheylan et qui lui valurent une nouvelle condamnation le 17 octobre, à Marseille, à 2 ans de prison et 500f d’amende pour "apologie de faits qualifiés de crimes et provocation non suivie d’effet à commettre des faits qualifiés de crimes". Lors de ces réunions, il avait notamment vanté l’abnégation de Vaillant et de Ravachol et aurait déclaré : “Nous ne sommes qu’une poignée, mais nous n’en avons non moins fait trembler l’Europe ; nous continuerons et, coute que coute, nous arriverons à nos fins et nous emploierons tous les moyens, quelque terribles qu’ils soient”.

Dès sa libération début septembre 1897, il prenait la parole aux cotés de Louise Michel, Sébastien Faure, Brunet et Wallet à un grand meeting tenu à Clichy pour protester contre l’inquisition en Espagne (affaire de Montjuich), puis il se rendit à Londres où il travailla comme plongeur dans un restaurant et collabora au Libertaire (Paris), avant de gggner Jarnac (Charente) et de revenir à Marseille en avril 1898. Il logea alors avec Salud Borras, compagne de Luis Mas fusillé à Barcelone en 1897 – et ses deux enfants dans un garni de la Belle-de-Mai, 11 rue Saint-Régis, où il hébergea un moment Jean Marestan. Jusqu’en mars 1899 il participa à toutes les activités des groupes marseillais, chantant même des chansons anarchistes lors des fêtes familiales. Il fit alors partie de la rédaction du Libertaire quand ce journal se délocalisa à Marseille entre mars et juin 1898.
Au printemps 1898 il figurait sur un signalement d’anarchistes considérés comme dangereux établi lors de la visite du Président de la République à Nice. A cette même époque il retourna brièvement en Espagne où il fut arrêté à Barcelone lors d’une rafle dans une auberge et fut condamné à 500 pesetas d’amende pour "outrage à la moralité publique". Ne pouvant payer l’amende il fut emprisonné en attente de son expulsion (cf. Le Libertaire, 15 mai 1898).

Le 7 décembre 1898, il participa, avec de nombreux compagnons, à la défense du meeting tenu par F. Pressensé à la salle de L’Alambra de Marseille, attaqué par des contre manifestants de la Ligue antisémite et de la Jeunesse catholique armés de cannes plombées et de coups de poing américain. Dans le compte rendu qu’il en fit dans Le Libertaire (16 décembre 1898) il concluait par ces mots : “… Vous voulez nous ramener aux guerres de religion, dévier le grand courant révolutionnaire au profit de la clique noire, dévots de cette monstrueuse idole, le panache ; vous voulez nous courber sous la botte des prétoriens. Vous nous trouverez sur votre chemin. A vos cris de ’Mort aux juifs !’, nous répondrons ’Mort aux jésuites’. Chaque ’Vive l’armée !’ sera couvert par un ’Vive l’anarchie’ et quand il faudra cogner… le ton pleurard de l’Antijuif marseillais et de La Voix de la France, prouve que nous avons la main légère pour la lever et lourde quand nous l’abattons. A la prochaine, bouffe-youpins ! Nous avons encore un stock de coups de botte à vendre et la seule monnaie que nous toucherons sera votre cuir… vaches”

Il collabora également à cette époque au journal Le Cri de révolte (Paris, 10 numéros du 20 août 1898 au 1er mars 1899) fondé par G. A. Bordes, à L’Homme Libre (Paris, 11 numéros, 24 juin-1er décembre 1899) publié par E. Girault ainsi qu’au quotidien Le Journal du peuple (Paris, 299 numéros du 6 février au 3 décembre 1899) fondé par Sébastien Faure. En 1899 il résida à Paris au quartier de la Goutte d’or (18e). A cette époque il était opposé au syndicalisme et au coopérativisme qu’il jugeait contraire aux principes anarchistes. Il participait aussi aux causeries du groupe Les Iconoclastes animé par Janvion.

Le 19 mai 1900 il avait été - avec entre autres Malato, Cyvoct, Liard Courtois - l’un des organisateurs du meeting "Les Torturés de Montjuich" tenu à la Maison du peuple au profit des libérés et bannis du procès de Montjuich.

A l’été 1900, il était, selon la police, le responsable d’un petit groupe anarchiste dans le XIIIe arrondissement qui se réunissait au restaurant coopératif de la rue Broca (Ve) et aurait trouvé un travail à l’Exposition universelle.

Le 21 juillet 1900, lors de la fête familiale organisée à la Maison du peuple par le groupe L’Intenational, animé par Janvion, Jahn fut l’un des acteurs de la pièce interdite par la censure Mais quelqu’un troubla la fête du socialiste Marsollau ; il y jouait le rôle du général aux cotés notamment de Sadrin dans le rôle du député et de Louise Reville dans celui de la duchesse. La fête, à laquelle avaient assisté 4 à 500 personnes dont un certain nombre d’italiens et d’espagnols, était destinée à récolter des fonds pour éditer le manifeste Au prolétariat international (voir Janvion)…

Le 5 novembre 1900, lors d’un meeting antimilitariste salle des omnibus où il fut l’un des orateurs avec notamment F. Prost, Libertad, Liard Courtois…(voir affiche en portfolio) et auquel assistèrent 500 à 600 personnes, il avait, selon le rapport de police “engagé les conscrits à la désertion et à la désobéissance, leur faisant ressortir les avantages de la conservation de leur liberté, même à l’étranger, où ils peuvent par leur travail, rendre des services à l’humanité au lieu de se faire des instruments de destruction”.

En décembre 1900 ou janvier 1901, il fut arrêté à Paris avec son beau frère et le compagnon Juan Olle y Sole (ancien banni du procès de Montjuich) qui venait d’arriver de Londres. Il était accusé d’un vol au pavillon du Mexique de l’Exposition internationale où il travaillait.Tous furent libérés au bout d’un mois d’incarcération après avoir prouvé qu’à l’heure du vol, ils avaient été signalés dans une réunion.

En 1901 il résidait à Angoulème où il travaillait comme commis d’un fabricant de cognac, puis en 1902 il épousaSalud Borras dont le premier mari était mort en prison, et le second fusillé à Montjuich en 1897.

Octave Jahn

Au printemps 1908 il émigra au Mexique où, après divers séjours au Guatemala et à Cuba, sous le pseudonyme de Souvarine il collabora à la revue Ariete(Mexico, 1915) organe de la "Casa del Obrero Mundial" et participa à la révolution mexicaine. De janvier à septembre 1915 il fut le secrétaire d’un colonel de l’armée Zapatiste. Le 10 octobre 1915 il participa à l’inauguration de l’école rationaliste de Mexico et le mois suivant, avec entre autres Rafael Quintero, Agustin Aragon et L. Camacho escamilla, fonda l’Ateneo Ciencia-Luz y Verdad de Mexico.

En 1916 en tant que délégué de la « Casa del Obrero » de Mexico il fit une tournée de conférences en France sur la révolution mexicaine et écrivit plusieurs articles sur ce thême en particulier dans le journal Ce Qu’il Faut Dire de Sébastien Faure (cf. n° des 21 et 29 mai, 12 août et 16 septembre 1916). On pouvait alors le contacter au siège du journal Les Hommes du jour (19 rue J.J. Rousseau à Paris 4e) pour lequel il fut l’auteur du numéro consacré au président mexicain V. Carranza. Le 12 août 1916, au cimetière du Père Lachaise à Paris, il fut l’un des orateurs avec Sébastien Faure, Lepetit et Schneider lors de l’incinération de Pierre Martin. Le 21 septembre, lors d’une réunion organisée par le syndicat des terrassiers, il déclara : “Depuis la guerre on ne paie plus les loyers, mais il faudrait que cela continue et on pourrait profiter de l’occasion pour supprimer la propriété individuelle et établir la propriété communiste. Si la classe ouvrière le voulait, ce serait tôt fait, mais il faudrait qu’à la guerre bourgeoise succédât la Guerre sociale, la guerre de classes”.

Octave Jahn retourna vers octobre 1916 au Mexique où il décéda le 9 juin 1917.


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