Dictionnaire international des militants anarchistes
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MATHA, Armand “Louis”
Né à Castelljaloux (Lot-et-Garonne) le 10 (ou le 6 ?) avril 1861 – mort le 12 février 1930 - Coiffeur ; publiciste - Paris – Londres – Draveil (Essonne)
Article mis en ligne le 15 juillet 2008
dernière modification le 27 octobre 2023

par R.D.
Louis Matha

Ouvrier coiffeur à Castelljaloux et militant libertaire depuis au moins 1887, Louis Matha était monté à Paris à la fin des années 1880. En novembre 1891 il avait été nommé trésorier du groupe anarchiste du XXe arrondissement qui venait de se constituer et dont faisaient entre autres partie Charveron et Duprat.

Gérant à partir du numéro 39 (31 janvier 1892) du journal L’En-Dehors (Paris, 91 numéros du 5 mai 1891 au 19 février 1893) publié par Zo d’Axa et où il avait remplacé Charles Chatel, Louis Matha fut poursuivit à la suite d’un article et condamné à deux peines de 18 mois de prison les 4 juin et 5 juillet 1892 pour « provocation au meurtre » par la Cour d’assises de la Seine. Le 23 mai précédent, en tant que gérant du périodique Le Falot Cherbourgeois (Cherbourg, au moins 8 numéros, 1er janvier -15 avril 1892) où il avait sans doute remplacé G. Havard, il avait été condamné avec S. Lespalier à huit amendes de 5 francs pour délits de presse : il n’avait pas signé 4 exemplaires (de mars et avril) déposés au procureur de la République. Il se réfugia alors à Londres où il fréquenta avec Émile Henry les réunions du club Autonomie, et fut remplacé à la gérance de L’En Dehors par Félix Bichon. C’est de Londres qu’il fit parvenir le communiqué suivant au journal La Révolte (20 mai 1893) : « Les camarades anarchistes de Londres préviennent les compagnons du continent que le mouchard Coulon, démasqué dans le procès de Walsall (Angleterre) fait paraître le nouveau journal « L’internationale » avec la collaboration du nommé Dupont. Avis aux camarades ».

Revenu à Paris en février 1894, il aurait tenté en vain d’empêcher Émile Henry de commettre l’attentat au café le Terminus (12 février 1894), mais après l’attentat, et selon un rapport de police (APpo BA 141 & Arc. Nat. F7/13053) se serait rendu avec Léon Ortiz et Millet au domicile d’E. Henry rue des Enviergés pour y enlever tout matériel compromettant. Il fut également arrêté le 24 avril 1894, après l’attentat commis le 4 avril au restaurant Foyot, mais fut relâché faute de preuves.

Le 6 août 1894 il fut impliqué dans le Procès des Trente avec entre autres, Jean Grave, Sébastien Faure, Charles Chatel, Félix Fénéon et plusieurs militants illégalistes. « Voici Matha, l’ami d’Émile Henry, l’ancien coiffeur de Castelljaloux tout en cheveux avec une barbe égyptienne qui semble avoir été roulée au petit fer… il avait d’ailleurs été surnommé le compagnon Belle-Barbe » (cf. H. Bataille « Causes criminelles et mondaines de 1894 »). En fait, tous les accusés furent acquittés, sauf trois illégalistes, Ortiz (15 ans de travaux forcés), Chericotti (8 ans de la même peine), et Bertani. Les « contumaces », Paul Reclus, C. Martin, E. Pouget, A. Cohen, Duprat furent condamnés à 20 ans de travaux forcés le 31 octobre suivant, mais la peine fut amnistiée dès le 2 février 1895.

C’est avec l’aide de L. Matha et Constant Martin que Sébastien Faure lança le 16 novembre 1895 l’hebdomadaire Le Libertaire dont Matha fut le premier gérant. C’est à ce titre, pour des articles de commémoration de la Semaine sanglante et sur Émile Henry - article "Un précurseur" signé Eugène Lephay, 23 mai 1896 -, qu’il fut arrêté à Bordeaux en juin 1896, poursuivi pour « apologie de crimes » et que le 15 juillet 1896 il fut condamné à 20 jours de prison. Ayant effectué déjà 21 jours de préventive, il fut remis en liberté à l’issue de l’audience. Lephay qui était en fuite fut condamné à 2 ans de prison.

De 1895 à 1898 il organisa de très nombreuses tournées de conférences avec Sébastien Faure qu’il connaissait depuis 1887.

Dans un rapport de police le taxant de "garde du corps" de Sébastien Faure, il était qualifié d’être “un de ces hommes qui mettent leur audace et leurs biceps au service d’un parti sans se rendre un compte bien exact des principes qu’ils sont sensés défendre”, et le commissaire d’ajouter “Au demeurant très énergique, très brave, très audacieux, ne reculerait devant rien, certaines circonstances se produisant.” (cf. Arc. Nat. F7/13053, L’anarchisme en France, 1897). A ce propos, Sébastien Faure écrivit : “D’une activité débordante, d’une vaillance rare, d’un sang froid et d’une présence d’esprit remarquables, d’une vigueur peu commune (à cette époque je n’étais pas précisément manchot), il comptait sur moi et je comptais sur lui si entièrement que rien ne nous faisait reculer” (cf. La Voix libertaire, 1er mars 1930).

Le 8 août 1897, c’est lui qui avait assuré le contrôle des entrées à la matinée spectacle tenue au théâtre de la république au bénéfice des torturés de Montjuich et de leurs familles à laquelle avaient participé environ 3.000 personnes et notamment Sébastien Faure et Charles Malato et dont l’un des orateurs était Tarrida del Marmol.

Au moment de l’affaire Dreyfus, il fut le gérant-imprimeur du manifeste Contre le huis clos (voir Portfolio) et l’administrateur du quotidien Le Journal du Peuple (Paris, 299 numéros du 6 février au 3 décembre 1899) lancé par S. Faure et de la revue monographique Les Hommes de Révolution (Paris, 7 numéros de décembre 1899 à mai 1900) dont le rédacteur était Michel Zévaco et dont le n°2 était consacré à Sébastien Faure.

A partir du 12 juin 1898, lors du transfert du Libertaire de Marseille à Paris, il en fut nommé gérant.

Vers le printemps 1900 il aurait été responsable de l’édition du Libertaire illustré qui dut cesser de paraître en mai, faute de fonds.

Puis, selon la police il se serait brouillé avec S. Faure pour une histoire d’argent et serait devenu croupier dans un cercle de jeux à Oran. A l’été 1901 il fut impliqué dans une affaire de complicité de« vol de titres » à Saint-Étienne mais fut acquitté en décembre par la Cour de Montbrisson après avoir passé trois mois en prison.

Il fut une nouvelle fois le directeur du Libertaire) partir d juin 1904 où il avait remplacé Louis Grandidier, puis de 1908 à septembre 1910. En septembre 1907 il avait été arrêté sous l’inculpation de « complicité de fabrication de fausse monnaie » mais fut acquitté le 21 novembre suivant par la Cour d’Assises de Paris. Il avait été arrêté après que la police, lors d’une perquisition début juin 1907 au siège du Libertaire, ait trouvé dans une cour ouverte à tous, une caisse contenant des outils et de fausses pièces de deux francs ainsi qu’un exemplaire du journal Le Cubillot. Lors de la campagne de soutien à Matha - à laquelle participèrent notamment Paraf Javal, Malato, Fortuné Henry et Lermina - plusieurs compagnons accusèrent la police d’avoir elle même déposer la fameuse caisse. Pendant son incarcération c’est Hélène Lecadieu qu assuma la rédaction et la gestion du Libertaire.

Poursuivi en novembre 1907, il fut acquitté avec Léon Barrier et Denis Domboy, tandis qu’étaient condamnés Roger Cibot et Jourdain à 5 ans de réclusion.

Il fut également l’administrateur de l’imprimerie communiste L’espérance qui dans le 18e arrondissement, rue de Steinkerque, employait une douzaine de compagnons.

En mai 1910, aux cotés notamment de Cachet, Grandjouan, Dolié et Bessede Silvaire, il fut l’un des fondateurs de la Fédération libertaire de l’Est parisien. Au début des années 1910 il appartenait également à la commission exécutive du Comité de défense sociale (CDS) dont le secrétaire était Thuillier et le trésorier Ardouin.

En 1912, selon la police, il tirait la plus grande partie de ses moyens d’existence de la vente d’articles néo-malthusiens et de librairie hygiénique et anti anticonceptionnelle et ne s’occupait plus du Libertaire qu’à de rares moments.

Puis Louis Matha se retira à la cité Paris-Jardins de Draveil (Essonne) où il s’occupa de coopératives, d’œuvres laïques et en particulier de la Caisse des écoles. Louis Matha est décédé à Draveil le 12 février 1930 d’une crise cardiaque. Sa compagne depuis 1909, Louise Souvraz, décédera à Draveil le 29 octobre 1946.

Outre les titres dont il a été l’administrateur, Louis Matha avait également collaboré à La Bataille (Paris, 1915-1920) quotidien syndicaliste et à La Grève Générale (Londres, 3 numéros de mars à juin 1902) publié par Henry Cuisinier et Louis Depoilly.


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