Dictionnaire international des militants anarchistes
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BERNARD, André & Anita (née Ljungqvist)
Né le 11 avril 1937 à Chevrier (Haute-Savoie) - Electricien puis correcteur - ACNV - FA - CIRA -CGT - CNTF- Bordeaux (Gironde) - Genève - Bruxelles - Paris
Article mis en ligne le 6 décembre 2006
dernière modification le 7 septembre 2023

par R.D.

André Bernard naît le 11 avril 1937 à Chevrier (Haute-Savoie) où son père, ancien journalier, exerçait la profession de douanier après avoir obtenu son certificat d’études à l’armée ; sa mère, sans profession, est d’origine paysanne. Pendant la Seconde Guerre mondiale, son père, libre-penseur, s’engage dans la Résistance (Forces françaises de l’intérieur) où il participe entre autres actions plus violentes, au franchissement frontalier des juifs vers la Suisse ; André reste profondément marqué par l’incendie de son village et aussi d’avoir vu des photos d’atrocités commises par les soldats nazis.

Après un déménagement à Bordeaux, il rencontre le mouvement libertaire par l’intermédiaire du milieu anticlérical : à l’âge de 12 ans, il lit assidûment la Calotte puis va écouter les conférences de Lorulot et de Las Vergnas. Vers 14 ans, il commence à fréquenter le groupe Sébastien Faure de la Fédération anarchiste où il rencontre les frères Paul et Aristide Lapeyre, Joaquim Salamero, Jean Barrué, etc.

Après avoir obtenu le BEPC et suivi une formation professionnelle de monteur-électricien dans le bâtiment à Limoges, André travaille sur un barrage hydraulique.

Refusant la conscription et la participation à la guerre en Algérie, André Bernard se déclare insoumis le 1er octobre 1956 et passe en Suisse où André Bösiger s’active comme maître d’œuvre d’un réseau de soutien aux réfractaires avec l’aide de Pietro Ferrua, insoumis italien. André travaille d’abord dans une coopérative d’installation électrique, puis comme éducateur pour jeunes délinquants.

Il prend part à la fondation du Centre international de recherches sur l’anarchisme (CIRA) et participe au groupe Jeune Résistance (JR), lié au réseau Jeanson d’aide aux indépendantistes algériens, qu’il quitte pour désaccords divers : antimilitariste autant qu’anticolonialiste, il ne peut suivre JR qui se veut avant tout anticolonialiste.

A partir de 1958, il participe à des chantiers du Service civil international (SCI) en Suisse. C’est là, en 1959, qu’il rencontre sa compagne : Anita Ljungqvist, née le 4 septembre 1939 en Suède, dans une famille ouvrière peu politisée. Á cette occasion, elle découvre l’anarchisme, la non-violence, les luttes sociales, et André lui fait connaître les militants du groupe Ravachol de Genève qui édita de 1959 à 1962 au moins cinq numéros d’un périodique ronéoté du même nom où, dans le premier numéro, André écrivit un article où il prenait position pour la non-violence. Depuis, leurs destins sont liés. Partis pour la Belgique, ils y rencontrent le vétéran de la militance anarchiste et non violente belge Hem Day (de son vrai nom Marcel Dieu), et c’est de ce pays qu’ils prennent contact avec l’Action civique non violente (ACNV).

Décidés à rentrer en France pour lutter avec cette dernière organisation contre la guerre d’Algérie, ils se marient en Belgique, le 25 mars 1961, non sans quelques problèmes administratifs, et ce afin qu’Anita obtienne la nationalité française et puisse ainsi avoir une chance de visiter son compagnon quand celui-ci serait emprisonné. Ils passent clandestinement la frontière fin mars 1961 avec l’aide du pasteur Philippe Vernier de Maubeuge puis partent travailler sur un chantier de l’ACNV, d’abord à Nangis puis à Marseille au bidonville du Canet. Quelques semaines après, le 8 mai, André, qui avait prévenu le ministre des Armées de son retour, s’enchaîne devant l’arc-de-triomphe de la Porte d’Aix avec six autres compagnons « solidaires » qui avaient adopté son identité, selon une stratégie mise au point par l’ACNV. Le Canard enchaîné rapportait ces faits en titrant : “Nous sommes tous André Bernard”. Après avoir été finalement identifié le 13 mai, André est conduit à la prison des Baumettes, puis transféré au fort du Hâ de Bordeaux.

Le 24 mai 1961, à Bordeaux, devant le tribunal militaire, André, qui avait déjà été jugé par contumace, est condamné à un an de prison avec sursis pour “insoumission en temps de paix”. Sorti libre du tribunal, mais attendu par des militaires, il est arrêté et amené directement à la caserne. Lors d’un deuxième procès, le 25 octobre, André écope de dix-huit mois de prison avec confusion des peines.

Libéré après 21 mois d’incarcération, il rencontre Louis Lecoin qui lui manifeste sa solidarité ; il devient correcteur d’imprimerie, parrainé par May Picqueray tandis qu’Anita va exercer le métier de comptable. Peu après, Anita et André Bernard, avec des jeunes libertaires - dont Mariane Enckell, Denis Durand, Michel Tepernowski -, lancent la revue Anarchisme et Non-Violence (n° 1, avril 1965 à n° 33, janvier-avril 1974) dont l’administrateur sera Marcel Viaud d’Ollioules (Var) ; la revue adhère en tant que publication à l’Internationale des résistants à la guerre (IRG). Participèrent également à la rédaction de la revue Patrice Antona, Claude Borgne, Michel Bouquet, Patricia Dalbard, François Destryker, Dominique Marty et Jacky Turquin.

Entre 1975 et 1977, André participe activement, en tant que correcteur, au conflit du Parisien libéré et aux nombreuses opérations de blocages organisées par les ouvriers du Livre qui interceptent les exemplaires imprimés malgré les consignes syndicales : deux condamnations s’ensuivront. Le patronat tentait alors de casser le monopole syndical de la CGT.

À partir de 1976, André prend part aux activités du groupe surréaliste de Paris, réalisant des collages et des assemblages, puis collabore à la revue S.U.RR… (Surréalisme, Utopie, Rêve, Révolte, n° 1, été 1996).

En pré-retraite depuis 1992, André a participé à la confection et à la maquette de plusieurs publications du mouvement libertaire : les Temps maudits (n° 1, juin 1997), le Combat syndicaliste (CNTF) et Le Monde libertaire, l’hebdomadaire de la Fédération anarchiste ; il a également collaboré aux éditions de l’Atelier de création libertaire (Lyon) et aux éditions de la CNT de la région parisienne.

Anita et André Bernard sont membres du collectif de Réfractions, revue de recherches et d’expressions anarchistes, fondée en 1997. Toutefois André quitta la rédaction de cette revue en 2016.

Depuis 2003, ils participent aussi à un regroupement d’anciens de l’ACNV, destiné à mieux faire connaître le trajet de ces réfractaires et leurs actions pendant la guerre d’Algérie. En 2005, ce groupe publiait sous le pseudonyme collectif de Erika Fraters le livre Réfractaires à la guerre d’Algérie : 1959-1963 (Ed. Syllepse). Un CD-rom de François Chouquet, Comme un seul homme, complète le livre.

André et Anita sont également membres du CIRA (Marseille et Lausanne). Depuis la fin 2012, André Bernard, qui participe à l’émission radiophonique Achaïra animée par le Cercle libertaire Jean Barrué sur la radio La Clé des ondes à Bordeaux, est l’éditeur du bulletin mensuel Chronique de la désobéissance auquel collabore notamment Pierre Sommermeyer, mêlant réflexions, critiques bibliographiques, présentation de poèmes et d’œuvres d’art. Avec ce dernier, Sylvie Knoerr et Lou Marin, André été Anita animent depuis 2010 la collection "Désobéissances libertaires" aux Éditions libertaires (Saint Georges d’Oléron).

Oeuvre : - Ma chandelle est vive, je n’ai pas de dieu : papiers collés et petits textes (ACL, 2008) ; - Etre anarchiste oblige !, Récits de vie, écrits divers (ACL, 2010) ; - Chroniques de la désobéissance et autres textes (ACL, 2012) ; - Ecritures et parlures de désobéissance (ACL, 2014) ; - Du refus de la servitude volontaire (ACL, 2015) ; - Un autre anarchisme est possible (Les Éditions Libertaires, 2016).


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