Dictionnaire international des militants anarchistes
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CHARRIER, Jacques, Mecislas
Né à Paris le 2 mai 1895 – guillotiné le 3 août 1922 - Paris
Article mis en ligne le 9 février 2008
dernière modification le 7 septembre 2023

par R.D.
Mecislas Charrier

Anarchiste individualiste, Mecislas Charrier était le fils de l’étudiante Berthe Charrier et de Mecislas Goldberg qui ne le reconnut pas mais l’éleva seul jusqu’à l’âge de 5 ans, avant de le laisser, faute de moyens, à sa mère. Selon Mme Delesalle « il eut pour berceau le tiroir d’une commode ». N’ayant pu terminer des études, il travailla comme aide patissier à Paris, puis émigra à Oran où il fit des petits métiers avant de s’embarquer comme marin sur un vapeur de la ligne du Maroc. Atteint de tuberculose, il fut ensuite débarqué à Marseille.

Mobilisé en 1914 il fut affecté dans une section d’infirmiers, puis, après une rechute de sa tuberculose, fut mis en convalescence. Suite à un chantage auprès d’une ancienne compagne, il passa alors en conseil de guerre et fut condamné à 6 mois de prison. Réformé et libéré le 1er juin 1915, il revint à Marseille où un nouveau chantage auprès de son ancienne compagne lui valut d’être condamné à 8 mois de prison. Libéré de la prison de Nîmes en février 1918, il était envoyé aux Bataillons d’Afrique avant d’être rapatrié, victime d’une congestion pulmonaire et démobilisé. Il parvenait alors, par un subterfuge, à toucher six fois la prime de démobilisation, escroquerie qui lui valut une peine de deux ans de prison à Grenoble.

Libéré en juin 1921, il participait comme guetteur le 25 juillet, avec deux malfaiteurs dont il avait fait la connaissance à la prison de Grenoble, à l’attaque de voyageurs dans le train Pari-Marseille. Un jeune homme, qui avait résisté, fut tué dans l’attaque. Le 30 juillet, Mecislas Charrier était arrêté sous le nom de Dujardin dans un hôtel de la rue des Fossés-Saint-Jacques (5e arr.) par la police qui trouvait une somme d’argent et le plan de l’attaque du train. Charrier reconnaissait les faits et dénonçait ses complices, qui le jour même étaient abattus lors de leur arrestation après avoir tué un inspecteur. Inculpé de « vol et de complicité volontaire d’homicide », Mecislas Charrier que la presse présentait comme « un petit jeune homme maigre, au teint olivâtre, aux cheveux noirs, au long nez, avec de petits yeux de chinois » (cf. Figaro, 29 avril 1922) fut, bien que n’ayant pas directement de sang sur les mains, condamné à mort lors du procès tenu en avril 1922. Dans une lettre datée du 18 mai, Mécislas Charrier écrivait au Libertaire : « Certes, je fus un de vos fervents adeptes jadis, mais au fil des jours malheureux, d’obstaclesn de douleur en douleur, de déception en déception, je jugeai utile de ne pas trop me sacrifier moi-même. C’est alors que je me mos à songer à la vengeance. Vous n’admettez pas ces théories, vous n’êtes pas individualistes, vous réprouvez toute application du principe de la reprise individuelle, vous réfutez la violence ayant pour but un intérêt personnel, je le comprends fort bien… Ce n’est pas sans amertume que j’écris ces lignes, car enfin je ne puis me défendre de la sympathie que j’éprouve pour vos conceptions ; j’en reconnais toute la valeur, mais que voulez-vous, j’ai trop souffert pour ne pas vouloir me venger, et j’ai été trop écoeuré par les inégalités sociales pour vous suivre dans l’âpre voie du travail ». Après avoir rédigé le testament suivant, « Je soussigné Jacques Mecislas Charrier, étudaint en médecine, militant libertaire et condamné à mort par la grâce de douze enfants terribles, légue : mon estomac à l’avocat général qui en a manqué ; ma peau… lisse au chef de la Sûreté ; ma plante des pieds au jardin… des plantes ; mes seins à l’église romaine, mes pectoraux à la pharmacie Cannone. Non terminé pour cause de décès involontaire », Mécislas Charrier fut guillotiné dans la cour de la prison de la Santé le 3 août 1922.

André Colomer au lendemain de son exécution écrivit "Fils d’intellectuel paria, orphelin, sans métier, vagabond, traqué sans merci à chaque recoin de sa vie et du monde par les nécessités impitoyables d’une société de fer, le voilà qui lutte seul, déclassé, seul contre toute une meute aboyante… Il fut un beau révolté qui sut au fur et à mesure qu’il se rapprochait de la mort, atteindre à une affirmation de plus en plus grande de la conscience anarchiste " (cf. Le Libertaire, 4 août 1922). Il ajoutait : “A quatre heures et demie, mercredi matin, nos camardes du quartier politique de la Santé qui ne dormaient pas très profondément furent réveillés par une voix fière et mâle qui, dans le silence du matin, chantait le premier couplet de l’Internationale. Tout de suite ils comprirent, c’était Charrier qui traversait les couloirs de la prison, sortant de sa cellule, allant à la guillotine… Aussitôt nos camarades se précipitèrent, qui à leurs portes, qui à leurs fenêtres… ils crièrent de tut la fre de leurs poumons Vive Charrier !’ (ibid.)


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