Ouvrier plâtrier, père de 5 enfants en bas âge et au chômage depuis le milieu de l’année 1889, Victor Ragot, militant anarchiste de Saint-Amand, n’avait pu payé ses impôts personnels et mobiliers et avait été poursuivi et l’objet d’une contrainte par corps. Début janvier 1890 il avait tenté de faire sortir les gendarmes venus le saisir et avait été arrêté et poursuivi pour « menaces et injures à agents ». Quelques jours avant, le 7 janvier, il avait adressé une lettre au procureur qui lui avait accordé une modération de la moitié (6, 75 francs) de ses impôts où il écrivait notamment : « …J’ai le regret de vous informer qu’il ne m’est pas plus possible de payer cette modération que la contribution entière ; car, quoique propriétaire, comme le dit si triomphalement le rapport, d’une bicoque entièrement construite de mes mains, et sur un terrain qui ne m’appartient pas, la dite bicoque construite en brique sur champ, dans laquelle je rôtis en été et je gèle en hiver, ne me donne pas d’argent, elle abrite tant mal que bien ma famille et c’est tout ce que je désirais… Si pour être déchargé complètement, il faut être inscrit sur une liste d’un bureau de charité, je vous déclare que je n’accepterai jamais cette mise en carte d’un homme qui veut vivre en travaillant quand les deux tiers de la nation vivent bien dans l’abondance en ne produisant rien. Je ne demande pas d’aumône et si je dois devenir un voleur, ce ne serait certes pas pour verse le produit de mon vol dans les caisses de l’État, mais bien pour nourrir ma famille. Soyez assuré, Monsieur, de l’énergie de ma résolution et agréez mon salut révolutionnaire ».