Dictionnaire international des militants anarchistes
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BIANCO, René, Louis
Né à Marseille le 4 octobre 1941 – Mort le 31 juillet 2005 - Instituteur ; professeur d’histoire - FA-CIRA – SNI (EE) – Marseille (Bouches-du-Rhône)
Article mis en ligne le 6 septembre 2011
dernière modification le 27 octobre 2023

par R.D.
René Bianco (1989)

René Bianco, qui était issu d’un milieu modeste d’origine italienne, avait appris à lire dans Le Canard enchaîné et Le Libertaire auxquels son père, Antonin Louis, qui fut notamment facteur auxiliaire des Postes à Auriol puis à Plan de Cuques (Bouches-du-Rhône) était abonné. C’est dans cette dernière localité qu’il fréquenta l’école élémentaire. Il obtint une bourse qui lui permit de poursuivre ses études comme pensionnaire au lycée Saint-Charles de Marseille jusqu’au baccalauréat de philosophie. Pour ne pas être à la charge de sa famille, il exerça divers métiers (ouvrier dans une usine de jouets, livreur, préparateur en pharmacie, etc.). Recruté comme instituteur suppléant en octobre 1961, il passa son CAP en mai 1963 et fut titularisé l’année suivante. Assez rapidement, il se vit alors chargé des classes réservées aux élèves difficiles et obtint en décembre 1967 son diplôme d’instituteur spécialisé (classes pratiques). Il devint Professeur d’enseignement général des collèges (PEGC) en septembre 1975 et professeur certifié d’Histoire et Géographie (septembre 1989).

Au début des années 1960, René Bianco qui fréquentait rue du Terras, à Marseille, le dojo fondé par le libertaire Pierre Jouventin (spécialiste des terres australes devenu directeur de recherches au CNRS), fut l’un des secrétaires de la Ligue de Provence d’Aïki-do. Dans le même temps, il milita au sein du Syndicat national des instituteurs (SNI) dans le courant École émancipée - dont il démissionnera après les événements de 68 - à la Libre Pensée et à la Fédération anarchiste (FA). Il soutint également, de façon très active, l’action entreprise par Louis Lecoin en faveur de l’objection de conscience et participa, avec entre autres José Barrachina, à un petit groupe clandestin de lutte contre l’OAS et d’aide aux insoumis.

Sursitaire, il réussit à se faire réformer (octobre 1963) et resta donc à Marseille où, avec une vingtaine de jeunes dont la moitié issue de familles espagnoles exilées, et suite aux efforts du compagnon italien Vertice Persici, de l’espagnol Juan Morata et du français Arru qui avaient pris l’initiative de convoquer un certain nombre de jeunes sympathisants, il avait participé, en avril 1960, à la fondation du groupe Jeunes Libertaires dont il assurera l’animation pendant près de dix ans. À ce titre, il participa activement à l’organisation des Campings internationaux qui permettaient, chaque été et dans un lieu différent (en France ou à l’étranger) aux familles libertaires de diverses nationalités de se retrouver et d’échanger des idées. Ces rencontres l’entraînèrent à participer un moment aux activités de la Fédération ibérique des jeunesses libertaires (FIJL) en exil qui à cette époque menait une campagne d’actions directes (attentats, enlèvements de personnalités, campagne contre le tourisme en Espagne) contre l’État franquiste. Tout en collaborant souvent sous le pseudonyme Relb ou Serge R au bulletin national Jeunes Libertaires (Paris, 51 numéros d’avril 1953 à mai-juin 1967), il fut également le responsable du bulletin local Jeunes libertaires (Marseille, 5 numéros en deux séries, de juin 1960 à automne 1964) auxquels collaborèrent notamment Tomas Ibañez, Suzanne Guy et André Arru.

René Bianco, partisan de la synthèse anarchiste et grand admirateur de Sébastien Faure et de Voline, fut l’un des principaux animateurs, avec André Arru du groupe Marseille-Centre de la Fédération anarchiste. Il fut alors l’administrateur du bulletin intérieur de liaison des anarchistes de la région de Provence-Côte d’Azur-Corse Echos Libertaires (Marseille, 9 numéros et 5 hors série de janvier 1966 à juin 1968) auquel collaborèrent notamment Pierre Jouventin, Robert Camoin et René Audibert. Il fut à de nombreuses reprises délégué aux congrès de la FA à laquelle le groupe adhérait. En 1965 à Toulouse et 1966, il fut président de séance du congrès. C’est à cette période qu’il fonda, avec son ami Roland Lewin, du groupe de Grenoble, la commission d’histoire et d’édition de la FA. Il collabora à cette époque régulièrement au Monde Libertaire pour lequel il écrivit notamment une série d’articles sur les pédagogues libertaires ou sur La Commune de Marseille (mai 1965). En décembre 1965, il se maria avec Lilyane Naviliat, sa compagne depuis déjà plusieurs années. Ils eurent une fille, Karine, née en juillet 1967.

Parallèlement il adhérait au Centre international de recherches sur l’anarchisme (CIRA), alors à Genève, et commençait à récupérer auprès des vieux militants tout ce qui pouvait l’être afin d’envoyer ou de convoyer en Suisse toute sorte de matériaux (journaux, livres, brochures…). Confronté rapidement aux problèmes des doublets, il fut alors décidé de créer un dépôt annexe à Marseille en 1965.

En 1967, il fonda à Marseille, avec notamment Jean Claude Sempere dit Pedro, les Éditions Culture et liberté, qui, outre l’animation de débats hebdomadaires, de conférences et d’un ciné-club, publièrent notamment l’ouvrage de Léo Campion, Les Anarchistes dans la Franc-Maçonnerie, ou les maillons libertaires de la chaîne d’Union (1969, 242 p.) ainsi que plusieurs autres titres de Campion, l’étude de René Bianco Une figure originale de l’anarchisme français ; Paraf Javal (1980) et en 1970 deux cartes postales (portraits de Sébastien Faure et de Francisco Ferrer dessinés par Aline Aurouet-Bontemps). Par ailleurs, il participa à la création de plusieurs associations culturelles (théâtre, poésie etc.). A la fin de cette même année 1967 il tenta de lancer avec Roland Lewin la revue trimestrielle d’études historiques Le Mouvement libertaire (Marseille, 1 numéro en décembre 1967) qui, faute de moyens financiers et du peu d’intérêt manifesté à l’époque pour cre genre de publications, fut une tentative avortée.

En juin 1968, il fut l’organisateur, avec le groupe de Marseille, du congrès de la FA qui le désigna comme responsable de la rédaction et de l’administration du Bulletin intérieur de la Fédération, poste où, à partir de septembre 1968 (n°68), avec sa compagne Lily et Pierre Jouventin, il succédait à Aristide Lapeyre et qu’il occupa jusqu’en avril 1970 (n°81). Cette même année, lors du congrès extraordinaire de Paris (29-30 juin 1968), René Bianco qui avait collaboré au Bulletin de la Commission préparatoire du Congrès international de fédérations anarchistes (Paris, 11 numéros de septembre 1966 à août 1968), commission où, en 1966 il avait été mandaté par Juan R. Alvarez comme représentant du Mouvement Libertaire cubain en exil - mandat qu’il ne semble pas avoir accompli –et où il se prononça assez rapidement contre un congrès réservé aux seules Fédérations anarchistes, fut désigné avec cinq autres délégués – Maurice Joyeux, Suzy Chevet, Guy Malouvier, Michel Cavallier, Richard Pérez- pour représenter la Fédération anarchiste de langue française au Congrès international anarchiste de Carrare (Italie) qui se déroula du 31 août au 2 septembre 1968 et à la suite duquel le secrétariat de l’Internationale des fédérations anarchistes (IFA) fut confié aux militants de l’Organisation révolutionnaire anarchiste (ORA), une tendance de la FA représentée au congrès par Malouvier, Cavallier et Pérez.

Au congrès d’Asnières (29-31 mai 1971) de la FA, il fut désigné, avec Gérard Escoubet et Jean Barrué au Secrétariat aux Relations internationales et, à ce titre, il fonda alors l’Agence de Presse Anarchiste qui, d’octobre 1971 à mai 1972 fit, en 45 expéditions (de 2 à 6 p.) parvenir à la presse anarchiste mondiale des informations diverses sur les luttes sociales et les activités des groupes anarchistes en France et dans le monde. Parallèlement il était le responsable de la page internationale du Monde libertaire. Sa démission au printemps 1972 de la Fédération anarchiste entraîna la disparition de ces activités.

Tout en exerçant ses activités militantes et professionnelles, il s’inscrivit à la faculté des Lettres d’Aix-en-Provence et entreprit des études supérieures à la rentrée 1969. En 1972, il obtint le diplôme de l’IEP (Institut d’études politiques) d’Aix-en-Provence, qui lui décerna en outre la même année le prix du meilleur Mémoire. Pendant près de dix ans René Bianco consacra ses vacances à visiter les archives en France, mais aussi en Suisse, Hollande, Grande-Bretagne, pour y répertorier les collections de journaux anarchistes de langue française. Cet énorme travail aboutit à la soutenance à l’Université de Provence, en octobre 1977, d’un doctorat de 3e cycle en histoire et, en avril 1988, à une thèse d’État : Un siècle de presse anarchiste d’expression française dans le mond, 1880-1983, (7 vol, 3 503 p.).

Après sa démission de la FA, il se consacra surtout au développement et aux activités du CIRA de Marseille, qu’il avait fondé en juin 1965 avec Henri Julien, Roger Camoin et Clotaire Henez et dont il assura à partir de janvier 1966, tant intellectuellement que matériellement, l’édition d’un Bulletin ayant pour objet de favoriser les recherches sur l’anarchisme. En avril 1979, il organisa à Marseille la Première rencontre des Centres d’études et de documentation libertaires existants qui donna naissance à la Fédération internationale (FICEDL). Il collabora également à la rédaction des notices de militants anarchistes pour le Dictionnaire biographique du Mouvement ouvrier français et participa également régulièrement à partir de 1980 à plusieurs jurys de thèse et à de très nombreux colloques (notamment le colloque sur Louise Michel en 1980).

René Bianco avait adhéré en février 1963 à la loge Les vieux amis du Grand Orient de France dans laquelle il occupa plusieurs offices y compris celui de Vénérable (président). Il constitua par la suite d’autres ateliers affiliés à la même obédience ainsi qu’une loge totalement indépendante. Il gravit successivement tous les degrés du Rite Écossais ancien accepté et après avoir présidé une Loge de Perfection, un Chapitre et enfin le Consistoire Hermès de Provence, il fut coopté en 1997 au sein du Suprême Conseil du Grand Collège des Rites, organe sommital de cette juridiction.

A partir des années 1980, René Bianco, qui aimait à se ressourcer dans les collines autour d’Aubagne et du Garlaban, se prit de passion pour cette Provence chère à Giono et commença à étudier le provençal et à participer à diverses sociétés savantes locales.

En septembre 2002 il fut l’un des organisateurs du colloque Han Ryner tenu à Marseille où il présenta une contribution (reprise en 2004 dans Bulletin de la Société d’études scientifiques et archéologique de Draguignan et du Var) : « Un écrivain franco-provençal méconnu : Han Ryner (Henri Ner), 1861-1938 ») et dont les actes (250 p.) furent publiés en 2003 par le CIRA et la Société des Amis de Han Ryner.

En septembre 2002, il prit sa retraite et partagea dès lors son temps entre la Provence et la Champagne, dont était originaire sa compagne, tout en poursuivant ses recherches jusqu’à son décès survenu à Marseille le 31 juillet 2005 des suites d’un cancer. En janvier précédent il avait contribué à l’hommage rendu à l’occasion du centenaire de la mort de Louise Michel dans le texte Louise Michel en Provence.

Tout au long de sa vie, la maison des Bianco, fut un lieu d’accueil et aussi parfois de refuge pour de nombreux compagnons anarchistes de toutes tendances et de bien des nationalités avec lesquels René Bianco aimait à se confronter, « surtout s’ils ne professaient pas le même anarchisme que [lui] ».

ŒUVRE : Outre des travaux maçonniques, les travaux universitaires mentionnés dans la notice, de nombreux articles dans la presse anarchiste - dont Le Monde libertaire (Paris), Itinéraire (Paris), Bulletin du CIRA (Genève & Marseille), Cahiers du CPCA (Villeneuve-Saint-Georges), Défense de l’homme (Golfe-Juan), Germinal (Évreux), Rivista A (Milan), Rivista storica dell’anarchismo (Pise), Bulletin of Anarchist Research (Lancaster) et plusieurs articles des revues universitaires comme, par exemple, Le Mouvement social (Paris) ou de Sociétés savantes tels les Cahiers Charles Fourier (Besançon) ou les Cahiers Octave Mirbeau (Angers), il est notamment l’auteur en ce qui concerne l’historiographie anarchiste de Sébastien Faure à Marseille en 1892, son procès en correctionnelle et son procès devant la Cour d’assises, in Provence historique, fascicule 110, 1965, 14 p. — Le Mouvement anarchiste à Marseille et dans les Bouches-du-Rhône de 1880 à 1914, éd. du CIRA, Marseille, 1978, tome 1, 453 p. tome 2, (dictionnaire biographique), 82 p. (reproduction en fac similé de la thèse soutenue à Aix-en-Provence en octobre 1977). – Les anarchistes en Provence et leur propagande clandestine avant 1914, in Revue du Vivarais, 1979, 13 p. — Où en est l’Histoire de l’Anarchisme ? Éd. du CIRA, Marseille, 1984, 74 p. — Les Anarchistes et la Résistance - Témoignages (1939-1945), éd. du CIRA, Marseille, 1985, 188 p. – La presse anarchiste de langue française publiée hors de France, Ed. du CIRA, Marseille, 1988, 42 p. – Un siècle d’édition anarchiste, Ed. du CIRA, 1994.

René Bianco avait également collaboré au Dictionnaire universel de la Franc-Maçonnerie, Éd. de Navarre, Paris. 1974. 2 vol., 1454 p. (rééd. PUF, 1988). — Le Théâtre Social, un essai de culture ouvrière, Éd. du CIRA, Marseille, 1978, 72 p. – Les thèmes révolutionnaires dans la presse anarchiste francophone publiée aux États-Unis dans Les Français des États-Unis sous la Dir. de R. Creagh, Université Paul Valéry Montpellier, 1994 — Quand le Coq Rouge chantera (bibliographie sur les anarchistes français et italiens aux États-Unis en collaboration avec Ronald Greagh et Nicole Riffaud Perrot), Presses Universitaires de Montpellier, 1986, 94 p. — Marseille, un destin culturel, Éd. Via Valeriano, Marseille, 1995, 304 p.


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